Panorama : LETTRE DE PROVINCE
Un paraphe ici, un happening l�...


Par Boubekeur Hamidechi
Pour f�ter la fin de son feuilleton, le FLN nous promet, le 26 janvier, un happening de tous les diables. Succ�dant aux arouch, dans le tableau de chasse au pouvoir, il passera � son tour � la trappe des accords imparfaits et de la subordination comme moindre mal.
Ici et l�, ces petites capitulations sont essentiellement per�ues comme des reculs tactiques, alors qu’elles sont annonciatrices de la fin d’une �poque politique. � travers leurs exemples s’esquissent d�j� � grands traits les modalit�s futures pour survivre au rouleau compresseur du nouvel ordre d�mocratique. Appel�es � �tre pilot�es � partir du sommet de l’Etat, les libert�s publiques iront en s’amenuisant jusqu’� grignoter sur la marge �troite de la libert� d’expression et l’existence hypoth�tique et pr�caire des partis eux-m�mes. Rien ne sera plus comme avant… le 8 avril. C’est du moins la conclusion que tirent, du nouveau contexte, � la fois les apparatchiks du FLN et les d�l�gu�s des arouch. Au nom du r�alisme, les uns s’adaptent et n�gocient, quand les autres changent simplement leur fusil d’�paule et ne visent qu’� entrer dans les bonnes gr�ces des ma�tres de l’Etat. Retour sur la petite histoire de ces mutants du champ politique… R�ve d’un FLN omnipotent semblable par son autoritarisme � celui du parti-Etat ! Le coordinateur de la conjuration en caresse secr�tement l’espoir sous son collier de barbe d’instituteur de medersa. Belkhadem qui cumule les comp�tences octroy�es de premier diplomate et de gourou d’un parti, ne joue, dans la r�alit�, que les r�les de charg� de mission � la diplomatie — dont on sait qu’elle est le jardin exclusif du pr�sident de la R�publique — on le compare volontiers � la pl�nipotentiaire d’ambassade que l’on a voulu surexposer aux feux de la rampe � des fins tactiques. Cependant, il en va autrement pour lui au sein de l’appareil du FLN. Bien qu’issus de cette famille politique, les militants demeurent divis�s sur son leadership. Et s’ils obtemp�rent quand m�me � son autorit� c’est qu’il est parachut� pour faire le m�nage et qu’il n’y a pas lieu de le contester. En a-t-il tir� quelques dividendes personnels de cette double casquette ? Sans certitude �tablie, l’on peut croire qu’il fut meilleur dans la manœuvre partisane que dans la subtilit� payante de la diplomatie. Aujourd’hui, gr�ce � sa patience et son habilit� de vieux militant organique, il a su persuader une grande majorit� de la base de la tenue d’un congr�s. Qu’une grogne continue � faire des vagues, il a d�j� convaincu le gros des troupes de cette urgence. En tout cas, il ne fait plus myst�re de la n�cessit� d’aller vers le coup de force de la l�gitimit� quitte � sacrifier quelques irr�ductibles compagnons de routes ayant agi sous la banni�re du “redressement”. N’�tant pas dupe des ambitions qui animent la plupart d’entre eux, il a choisi par calcul froid de rejeter les solutions extr�mes de l’exclusion, afin d’appara�tre comme le continuateur de la “mission” de ce parti. Celle � laquelle aurait failli la direction de Benflis, abusant et �garant du m�me coup une base d�sinform�e. Mais pour autant, il sait que tout n’ira pas pour le mieux au lendemain de ce congr�s de la transition. Car m�me apr�s avoir recoll� ses morceaux, ce FLN-l� ne sera pas forc�ment en meilleure sant� politique gr�ce aux seules incantations d’une messe le 26 janvier. En gardant en m�moire le fait que les divisions du pass� ont d’autres raisons que les triviaux conflits personnels et qu’� la v�rit� Benflis n’a pas concoct� � son seul usage le concept d’�mancipation, voire qu’il avait de solides soutiens dans la base, l’am�nera sans nul doute � occulter tous les d�bats de fond. Ainsi il ne sortira de ce congr�s qu’une petite l�gitimit� organique sans doctrine distinctive si ce n’est celle d’accompagner l’action de l’ex�cutif. Assur�ment, une telle indigence ne fera pas de lui un grand parti, au mieux elle lui rendra la fonction de premier tambour que lui chipote le RND. Sans vitalit� doctrinale, il sera appel� � vivre sous perfusion dans une sorte de pr�dation politicienne. La r�volution qu’il se propose d’accomplir dans ce parti ne sera, d’ores et d�j�, qu’une “r�volution copernicienne”. C’est-�-dire un tour complet sur soi-m�me pour retrouver le chemin de la “maison d’ob�issance” comme l’ordonnait avant lui un autre secr�taire g�n�ral du FLN en 1999. En d’autres termes, le clonage du FLN � partir des g�nes du parti unique ne sera qu’une illusion d’alternatives. Redevenant un appareil �lectoral dont l’ambition cardinale consistera � s’imposer comme premier satellite gravitant autour des ex�cutifs, il lui importera peu en compagnie de qui il partagera le lit des majorit�s gouvernantes. N’�tant pas � un paradoxe pr�s, le FLN s’appr�te � sacrifier son principe de force de proposition auquel il aspirait, pour ne devenir qu’un relais � l’image de la praxis en vigueur chez le RND et qui lui sert d�j� de mod�le ! L’ironie de la situation cr��e par les r�glements de compte autour des pr�sidentielles, c’est qu’ils ont �pargn� le clocher d’Ouyahia et en ont fait du m�me coup celui qui “r�sonne” juste aux oreilles du sommet de l’Etat. De Benflis � Belkhadem, le FLN a chang� de mode d’emploi. Il est repass� d’une fra�cheur de discours vivants � la mortif�re langue de bois. Ailleurs du c�t� du mouvement citoyen, la perspective a, para�t-il, �galement chang�. Et c’est aux arouch que l’on doit de comprendre qu’il y a un temps pour tout. Un temps pour les intempestives manifestations et un autre pour le pragmatisme calculateur. Au-del� de la br�ve morosit� cons�cutive aux retomb�es d’une �lection qu’ils ont combattue, ils se seraient mis � plancher sur les bilans de trois longues ann�es d’affrontement. La conclusion � laquelle ils aboutirent consiste � admettre que toute n�gociation est au bout du compte pr�f�rable aux impasses adoss�es aux principes. Le r�alisme auquel s’est converti ce porte-�tendard de toutes les jacqueries citoyennes semble par ailleurs �tonner, d�cevoir et inqui�ter plus d’un parmi les animateurs de la soci�t� civile. Les euph�mismes qualifiant le r�cent accord sont de leur c�t� l’expression d’un g�ne et d’un reproche cach� devant le bradage d’une cause, au seul motif qu’une organisation d�j� �vanescente se devait au moins de r�cup�rer de substantielles garanties par la n�gociation. “Vague”, selon un commentateur “non dits”, selon un autre : le halo qui enveloppe la d�claration commune, ajoute aux doutes. Alors qu’il est clair qu’elle scelle entre autres un tournant d�finitif � l’initiative du pouvoir. A tort ou � raison, la d�l�gation qui en a accept� l’augure est convaincue que de nouveaux rapports son en train de s’instaurer progressivement et s’imposeront � tous, notamment aux mouvements identiques au leur. Les suspicions quasi injurieuses qui les accablent sont-ils des arguments qui tiennent la route ? A la r�f�rence doctrinale qu’un combat ne se gagne qu’� travers une perp�tuelle tension, eux ont estim� que cet id�alisme de maximaliste est devenu, � l’�preuve de l’usure et l’environnement politique, contre-productif. Et ce qu’il y avait de mieux � faire �tait de passer par pertes et profits certaines des exigences du pass�. Ainsi, au nom du r�alisme tactique et parce qu’ils auraient pris la v�ritable mesure de l’�chec global de la soci�t� qu’ils estim�rent utile de r�pondre � une invitation. En somme, ceux parmi les d�l�gu�s des arouch qui ont paraph� le texte sont convaincus que le temps des accords parfaits n’est sans doute pas proche. Mais que celui du d�litement d’un mouvement est d�j� � la porte. Mais avaient-ils, en conscience, l’obligation de passer des accords sans un large consensus ? C’est bien l� le reproche qui leur est fait sans toutefois qu’ils puissent plaider de leur bonne foi et �viter les accusations injurieuses de faire le double jeu du pouvoir. La normalisation est donc en route. Celle qui vise � standardiser la totalit� de l’espace social en fixant les r�gles et les lignes rouges. Aussi bien la soci�t� politique que les mouvements associatifs seront appel�s � se couler dans les moules officiels. C’est-�-dire � rentrer dans le rang. Autant �crire, int�grer l’ordre, � l’image du vieux parti du FLN, qui retrouve le chemin des “ordres” au sens mystique du terme. Celui qui lui enseigne � d�fendre la religion des pouvoirs en place sans manifester de doute. Ce que l’on attend du FLN et des arouch est �videmment diff�rent. Au parti, il lui est demand� de d�noncer une certaine “apostasie” id�ologique et de retourner dans le giron du pouvoir, alors qu’au mouvement de Kabylie, on lui sugg�re de renoncer aux combats douteux en contrepartie d’indemnisations mat�rielles. Dans les deux cas, les propositions ressemblent d�j� � des injonctions. C’est tout dire.
B. H.

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