Le Soir Retraite : …ET LA RUSSIE SACRIFIE SES RETRAITES
"Poutine fait semblant de d�fendre le peuple et, en fait, il nous �trangle"


Une r�forme supprime les avantages sociaux qui compensaient en partie leurs pensions de mis�re. Des milliers de personnes, d�sesp�r�es, descendent dans la rue.
Lorsque l'on tente de demander � des retrait�s russes ce qu'ils pensent de la “r�forme des avantages sociaux”, entr�e en vigueur au 1er janvier 2005, plusieurs fois la sc�ne se r�p�te. “J’ai un cancer, le m�dicament co�te 6 000 roubles (162 euros) par mois, et il n'est plus sur la liste des m�dicaments gratuits”, glisse une femme, qui quitte en pleurs le fonds de retraite de Khimki, une banlieue nord de Moscou. En vertu de la r�forme entr�e en vigueur d�but janvier, elle devrait toucher entre 200 et 550 roubles (5 � 15 euros) suppl�mentaires par mois, pour se payer m�dicaments et transport, jusqu'� pr�sent gratuits. Ce qu'elle vient d'apprendre, c'est sa condamnation � une mort acc�l�r�e, faute d'argent pour �tre soign�e. “Ecrivez-le, �crivez-le, implore Valentin, 75 ans, un autre retrait�, rencontr� au centre des assurances sociales de Khimki, on nous jette 200 roubles comme on jetterait un os � des chiens. A nous qui avons relev� la Russie apr�s la guerre ! Et maintenant, nous devons faire la queue pendant des heures, de guichet en guichet, pour des indemnit�s de mis�re, en attendant qu'on cr�ve.” Pour la premi�re fois depuis que Vladimir Poutine est arriv� au pouvoir, en 2000, une r�forme sociale suscite un vrai mouvement de col�re en Russie. Plusieurs milliers de retrait�s sont descendus dans la rue ces derni�res semaines dans la banlieue de Moscou et dans diff�rentes r�gions du pays. “A mesure que les gens, qui vivotaient avec leurs toutes petites retraites, vont d�couvrir tout ce qu'ils doivent payer de plus pour les transports, les m�dicaments, les factures d'�lectricit�, de gaz, d'eau... il devrait y avoir une nouvelle vague de contestation”, remarque un observateur au fait ders questions sociales.
“Ce qu’on attend de nous, c’est que nous nous posions dans un coin pour mourir”

Pass�e en force en ao�t au Parlement, o� les d�put�s en majorit� acquis � Poutine n'avaient eu que quelques heures pour examiner plus de 700 pages de texte et 5 000 amendements, cette r�forme remet en cause tout le syst�me des avantages sociaux h�rit�s de l'�poque sovi�tique et du d�but des ann�es 1990, quand il avait fallu assurer un minimum de services en nature aux retrait�s qui ne touchaient presque plus d'argent. Au lieu de ces avantages en nature (gratuit� des transports et des m�dicaments, r�duction des charges locatives et des factures de t�l�phone...), les 33 millions de retrait�s ou invalides russes re�oivent, depuis le 1er janvier, des compensations financi�res qui peuvent aller de 200 � 3 500 roubles (5 � 94 euros) par mois. La trag�die est que ces compensations financi�res ne couvriront plus les traitements m�dicaux que pouvaient encore esp�rer des millions de retrait�s et de malades. A Khimki, juste derri�re les nouveaux palais de la consommation — les Auchan, Ikea et autres m�ga centres commerciaux ouverts ces derni�res ann�es pour satisfaire les nouveaux riches de Moscou —, le drame se joue tous les jours dans les couloirs d�labr�s de la polyclinique. Nina, 71 ans, clame sa col�re : “Ce qu'on attend de nous, c'est que nous nous posions dans un coin pour mourir. Ils viennent d'ajouter 200 roubles (5 euros) � ma retraite de 1600 roubles (43 euros). Et, rien que pour mon diab�te, le traitement co�te plus de 700 roubles par mois... Si c'est �a leur r�forme, nous n'avons plus qu'� nous pendre.” Descendre dans la rue, crier leur col�re contre Poutine et son gouvernement ? La plupart de ces retrait�s et de ces malades n'en ont gu�re la force ou l'envie. “Oui, il faut manifester. Poutine est un hypocrite. Il fait semblant de d�fendre le peuple et en fait il nous �trangle”, s'anime Valentin, 75 ans, encore vaillant apr�s deux infarctus, et pr�t � aller braver le froid dans les rues de Khimki. Beaucoup d'autres se pr�occupent surtout de survivre, quelque temps encore : “De toute fa�on, notre opinion ne compte pas, depuis longtemps d�j�, soupire Nina, 69 ans, rencontr�e � la sortie de la polyclinique, o� une fois encore on a refus� de la prendre en charge. Ce qui sera, sera.”
LSR

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