Sports : Me DUPONT (AVOCAT-CONSEIL DE JEAN- MARC BOSMAN)
�Il n'y a pas eu de catastrophe�


L 'avocat belge Jean-Louis Dupont, l'un des conseils de Jean-Marc Bosman en 1995, estime dix ans plus tard que l'arr�t rendu par la Cour europ�enne de justice n'a pas men� � la catastrophe annonc�e par certains observateurs du monde du football. Conscients que l'arr�t Bosman "a boulevers� le syst�me en place", celui qui est maintenant le d�fenseur des plus grands clubs europ�ens (r�unis au sein du G14) continue de regretter l'attitude "dogmatique" de la FIFA dans les affaires qui opposent aujourd'hui encore la F�d�ration internationale aux clubs et aux joueurs.
Le 15 d�cembre 1995, les d�fenseurs de Jean-Marc Bosman avaient-ils pressenti l'impact, �norme, qu'allait avoir l'arr�t de la Cour europ�enne de justice sur le monde du football ?
"Oui, je pense que nous avions bien mesur� cet impact. Nous �tions tout � fait conscients que nous allions bouleverser le syst�me en place. Mais alors que certains criaient � la catastrophe pour l'avenir du football, ce n'�tait pas notre cas. Il n'y a pas eu de "bug"... Et j'ai l'impression que le football ne se porte pas si mal aujourd'hui".
Quelle influence a eu cet arr�t Bosman tant au niveau sportif qu'�conomique ?

"Au niveau sportif, par exemple, les petites nations ont vu leurs �quipes nationales se bonifier rapidement. Les joueurs grecs, croates, turcs ou portugais ont int�gr� les grands Championnats, et, du coup, leurs �quipes nationales sont devenues performantes. Au niveau �conomique, l'impact de l'arr�t a, � mon sens, �t� surestim�. On entend souvent dire que le salaire des grands joueurs a explos� gr�ce � Bosman. C'est en partie vrai mais je pense que l'accroissement impressionnant des droits t�l�s et l'explosion du "sponsoring" ont une part plus importante que l'arr�t de Luxembourg dans ce ph�nom�ne".
L'arr�t Bosman n'a-t-il eu que des effets b�n�fiques ?

"Non. On ne peut nier les difficult�s rencontr�es par les clubs des petits pays. C'est l'effet n�gatif le plus net de l'arr�t. Le march� de l'emploi est devenu un march� europ�en tandis qu'en raison de r�gles de territorialit�, les march�s �conomico- sportifs sont rest�s nationaux. Donc, les petits pays trinquent. Mais il existe une solution � ce d�s�quilibre: les regroupements r�gionaux. Cr�er un Championnat du Benelux, par exemple, permettrait de mettre en place un march� de taille suffisante pour un football d'�lite de qualit� et rentable. A ma connaissance, les pays nordiques songent � un tel regroupement. La Suisse, l'Autriche et la R�publique tch�que �galement".
Il est aujourd'hui beaucoup question des affaires Oulmers et Abidal qui concernent l'utilisation par les �quipes nationales de joueurs pay�s et assur�s exclusivement par les clubs. Vous �tes un des avocats de ces clubs. Peut-on comparer l'importance de ces affaires avec le cas Bosman ?
"Dans les deux cas, une v�ritable question de principe se pose. Comme avec l'arr�t Bosman, nous attendons aujourd'hui une position de principe, qu'une juridiction "dise le droit" dans ces affaires qui opposent des clubs � la FIFA".
Quelle issue attendez-vous des cas Abdelmadjid Oulmers et Eric Abidal, joueurs respectivement de Charleroi et Lyon, qui se sont bless�s en �quipe nationale?
"Les clubs voudraient que la FIFA accepte la mise en place d'un m�canisme de co-d�cision clubs/f�d�rations sur toutes les questions qui concernent les clubs, � l'exception bien entendu de tout ce qui touche aux r�glements purement sportifs. Pour l'heure, la FIFA porte la double casquette de chef d'entreprise et de seul r�gulateur du march�. �a ne va pas. La FIFA organise des comp�titions (le Mondial, par exemple). Pour ce faire, elle exproprie litt�ralement les joueurs en versant une r�mun�ration "z�ro" aux clubs qui doivent par dessus le march� assurer leurs joueurs. Cette utilisation abusive du pouvoir de r�gulation est un abus de position dominante. Un syst�me de co-gestion permettrait la mise en place d'un calendrier international et de m�canismes de mise � disposition des joueurs qui soient v�ritablement respectueux des int�r�ts des clubs, ce qui suppose notamment une juste compensation financi�re.
Actuellement, la FIFA fait la sourde oreille. Cela vous surprend ?

"J'ai l'impression d'assister aux m�mes errements que lors de la p�riode pr�c�dant l'arr�t Bosman. La FIFA fige sa position, dogmatique, au nom de la sacro-sainte pyramide, qui hi�rarchiserait le monde du football. Alors que les clubs demandent simplement d'�tre admis comme co-d�cideurs des questions qui les concernent, ce qui est leur droit le plus strict".
Propos recueillis par Benont No�l (AFP)

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