Panorama : KIOSQUE ARABE
Quand Fella supplante Barbie
Par Ahmed HALLI halliahmed@hotmail.com


�a ne vous para�t pas bizarre que des �v�nements et des attitudes se r�p�tent comme si nous avions affaire � un sc�nario bien ficel�. O� se trouvent donc les meilleurs sc�naristes du monde ? A Hollywood, bien s�r ! Si ce qui se passe actuellement au Proche-Orient a �t� programm� par les Etats-Unis, comme on le sugg�re, qui sont alors les ex�cutants ?

Prenons un � un ces complots am�ricains que d�noncent avec vigueur ces m�mes ex�cutants. En Irak, Saddam le matamore harangue les foules en leur annon�ant que l'Irak poss�dera bient�t la bombe atomique. Il ne manquait au discours galvanisant qu'une visite organis�e � la centrale nucl�aire, matrice de la future bombe. Ce sont les Isra�liens qui visit�rent le site en le d�truisant, avec la b�n�diction des Am�ricains. Avec un peu plus de sagacit�, les Irakiens auraient pu accuser Saddam d'intelligence publique avec l'ennemi. Car, enfin, on n'a pas id�e de pr�parer l'extermination de l'autre en l'informant suffisamment � l'avance des modalit�s de cette extermination. Le m�me Saddam d�clenche ensuite une guerre contre l'Iran, avec les encouragements et le soutien de Washington. Avec le m�me soutien tacite, il envahit le Kowe�t. Les Am�ricains �lib�rent� le Kowe�t mais s'abstiennent de lib�rer l'Irak de son dictateur. Au moment o� l'Irak commence � se relever de ses ruines, Saddam tonitrue encore qu'il poss�de des armes de destruction massive. L'Irak est occup�. Hormis quelques bonbonnes de gaz surdimensionn�es, on ne trouve pas trace de ces armes. Aujourd'hui Saddam est prisonnier. Il plastronne au tribunal. Il proclame � son proc�s que les Am�ricains vont finir par n�gocier avec lui. D�sar�onn� par tant d'assurance et d'insolence, le pr�sident du tribunal finit par perdre patience. Il annonce qu'il d�missionne, ce qui donne un nouveau r�pit aux prisonniers. Si ce n'est pas du fignolage, �a en a les apparences. Deuxi�me sc�nario, damasc�ne celui-l�, Bechar Al-Assad pique un fard. N� avec une cuill�re d'argent dans la bouche, le placide h�ritier alaouite n'a pas eu � se battre pour conqu�rir le pouvoir. Il y a �t� propuls� par la volont� paternelle juch�e sur la tourelle d'un char. Il pouvait couler des jours tranquilles, laisser son peuple, majoritairement sunnite, s'enliser dans le wahhabisme. Il a, au contraire, choisi de scier, c�t� tronc, la branche du Baath qui lui servait d'assise. Il a organis� l'assassinat de Hariri en laissant des traces aussi visibles que le crottin de mouton, rue Didouche, la veille de l'A�d. Les Am�ricains brandissent � nouveau la menace d'une invasion � l'irakienne. Les Arabes, croyants et hypocrites m�l�s (1) crient au complot. Oui, il y a complot, un complot dont les principaux �l�ments se trouvent � Damas. Vous remarquerez que, jusqu'ici, je n'ai accus� personne d'�marger � la CIA. Il y a cependant de fortes pr�somptions contre nos idoles des foules. Troisi�me et dernier �l�ment du complot, pardon de la s�rie, l'Iranien Ahmadinjad. Ce monsieur me semble �tre la quintessence de ce que peuvent produire les laboratoires des officines de nos jours. A la diff�rence de Saddam et de Bechar, Ahmadinjad n'est pas venu � la religion sur le tard. L'opportunisme ? Il est n� avec. La religion, pour lui, est un tremplin, un tapis magique pour subjuguer les foules. Si c'est un homme des Am�ricains, chapeau � la CIA et gloire � Bush ! En attendant, avec ses d�fis � la communaut� internationale, il se comporte comme un membre d'un commando infiltr� derri�re les lignes ennemies. Il aura alors m�rit� l'aur�ole qu'il croit avoir vue suspendue au-dessus de sa t�te aux Nations unies. En fait, nous dit le quotidien saoudien Al-Watan, le pr�sident iranien a r�ellement vu une aur�ole. C'est celle que projetait la lampe situ�e au-dessus de son pupitre et destin�e � faciliter aux orateurs la lecture de leurs discours. Al-Watan sugg�re que le nouveau chef de l'Etat iranien serait simplement superstitieux, ce qui pimenterait le sc�nario si Hollywood s'en emparait (2). Al-Watan estime que Ahmadinjad peut tromper des gens incultes mais il ne r�ussira pas � berner les gens dot�s d'un minimum d'intelligence. Ce en quoi il se trompe : Ahmadinjad continue � galvaniser les foules et celles-ci, par d�finition, sont incultes. Prenant le relais sur ce th�me de la superstition, le journal des Emirats Al-Khalidj cite le cas des Arabes de la Djahilia qui se basaient sur le vol des oiseaux (3) pour d�cider de voyager. Ils lan�aient une pierre � un oiseau et si ce dernier s'envolait vers la droite, c'�tait un bon signe. S'il s'envolait vers la gauche, c'�tait de mauvais augure et le voyage �tait report�. Le journal passe �galement en revue les personnalit�s c�l�bres et connues pour �tre tr�s superstitieuses. Il raconte ainsi que le po�te Ibn Al-Roumi avait la manie de chercher des motifs de suspicion dans l'anagramme des pr�noms de ses concitoyens. Un jour, il refusa d'ouvrir sa porte � un certain Hassan parce que, lui dit-il, �l'anagramme de ton pr�nom donne �Nahass� (la guigne)�(3). On peut donc en d�duire que c'est par superstition et pour �viter le mauvais �il que les responsables arabes se montrent si discrets sur leur �tat de sant�. C'est sur ce sujet que le magazine Elaph est revenu la semaine derni�re sous la plume de Khaled Mountassar. Dans sa chronique hebdomadaire des m�dias, notre confr�re est revenu sur la maladie du pr�sident Bouteflika. Il d�plore la mani�re dont les soci�t�s arabes ont trait� la maladie de Bouteflika en la comparant � ce qui a �t� fait en Isra�l pour Sharon. Il note que les Isra�liens ont donn� tous les d�tails possibles sur l'�tat de sant� alors que le cas Bouteflika a �t� trait� au goutte- �-goutte. �M�me les petits enfants savent que le simple fait d'aller se soigner en France fait penser � un cancer�, affirme Khaled Mountassar qui rappelle que ce pays est l'un des mieux �quip�s en ce domaine. �Mais les m�dias officiels arabes pr�f�rent jouer sur le mythe du dirigeant qui ne tombe jamais malade�, note-til. �Les pr�sidents et les rois arabes sont des dieux face � la maladie et leur �tat de sant� rel�ve du secret d'Etat�. Bien plus, ajoute notre confr�re, �c'est un des secrets d'Etat les mieux gard�s sinon le plus gard�. Et puisque nous sommes d�sormais la soci�t� du hidjab pour mieux �tre en phase avec nos soi-disant anc�tres, sachez que l'A�d n'a pas �t� morose pour tout le monde. En Egypte, la poup�e Fella a battu le record des ventes devant la fameuse Barbie. Fella est une poup�e habill�e convenablement de la t�te aux pieds et coiff�e du hidjab que nous avons tous et toutes en t�te. Sous le v�tement ample koreichite, Fella porte un jean et un t-shirt moulant comme les jeunes filles d'Egypte. Quant � savoir ce qu'il y a en dessous, il faut s'adresser aux marchands sp�cialis�s de la rue Meissonier. Barbie, �la juive�, comme la nomment certains pr�cheurs, est encore en vogue dans le monde arabe mais ses jours sont compt�s. Son d�faut, c'est d'en montrer un peu trop. Et comme le dit si bien le sociologue Chaker Naboulci : �Les Arabes pr�f�rent avoir des r�ponses aux questions qu'ils n'ont pas pos�es.� A. H.

(1) Il est pratiquement impossible de les distinguer mais, comme on dit, Dieu reconna�tra les siens. Il faut juste prendre son mal en patience et ne pas se pr�cipiter pour le lapider le diable avec tous les risques que cela comporte.

(2) Les sc�narios d'Hollywood et de Langley (quartier g�n�ral de la CIA) ne sont pas les m�mes mais il arrive souvent que l'intertextualit� y soit de mise.

(3) Faut-il pr�ciser que je n'ai rien contre les �Hassan�, en g�n�ral.

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