Actualit�s : Bonnes feuilles du livre "Le huiti�me mort de Tibhirine" de Rina Sherman

�Le maquis, c'est Paris, Madame.� C'est ainsi que j'ai fini par r�pondre un jour aux questions insistantes avec lesquelles on me lancine depuis longtemps. Qui a tu� les sept dormants de Tibhirine ? Pourquoi Didier Contant est-il mort au retour de Blida et de sa troisi�me enqu�te sur l'assassinat des moines trappistes ? Pourquoi Didier Contant a-t-il cess� de jouir de son droit � la libert� d'expression ? Et finalement, pourquoi depuis sa mort, aucun journaliste n'a-t-il repris sa th�se ? �tes-vous all�e en Alg�rie, au maquis, pour �lucider les circonstances de la mort de votre compagnon ? Dans les lignes qui suivent, j'offre le r�cit de ce que j'ai vu et v�cu parmi les maquisards de Paris, apr�s sept ans de vie commune avec la famille d'un roi �leveur de b�ufs en Afrique, et apprenant au retour que Didier Contant, mon compagnon, est tomb� du cinqui�me �tage d'un immeuble parisien : parcours que je pourrais aussi d�nommer, Anthropologue, le retour.

Le temps de la lecture, rangeons le pathos. Levons le rideau sur la vie de deux �tres humains ; ils s'aiment, ils ont d�cid� de vivre au grand air d'Afrique, ils ont pleins de projets ensemble. Brutalement, l'un meurt, il s'appelle Didier Contant. L'autre, l'auteur de ses lignes, essaye d'�lucider la v�rit� de cette mort aussi subite que troublante. La recherche a lieu � Paris. Elle s'effectue sur un terrain qu�on pourrait qualifier d'affaire �touff�e. Si apprendre � n�gocier avec l'omerta peut constituer un rite de passage, d�couvrir que Paris est un maquis en est une conclusion. (�) Didier �tait quelqu'un de fort et de solide. Il �tait fier, et il attachait de l'importance � ce que les gens pensaient de lui. Sans famille pour l'�pauler, � seize ans, il avait commenc� sa vie d'adulte � partir de rien. Pourtant, apr�s avoir �t� coursier pour des agences de photos � l'�ge de trente-cinq ans, il �tait devenu r�dacteur en chef de l'agence Gamma. N�anmoins, sa force masquait une certaine fragilit�. Parfois, il me disait que faire des choses pour moi ou avec moi l'aidait � exister. Souvent, il se posait devant moi pour me demander si je le trouvais beau. Cette vuln�rabilit� rendait Didier attachant � mes yeux. Il poss�dait ce qui me manquait cruellement : la capacit� de demander � �tre aim� pour ce qu'il �tait, avec gr�ce et sans fard. (�) La mort n'est pas une fin en soi. Celle de Didier Contant est indissociable de l'enl�vement et de l'assassinat des sept moines trappistes. En ce sens, Didier est une victime � la huiti�me de Tibhirine � de la controverse sur la pouss�e de l'int�grisme musulman de par le monde, qui occupe une place importante dans l'opinion publique depuis bien des ann�es. Face aux nombreuses disparitions, victimes du fanatisme religieux, nous pourrions nous complaire � dire : autrefois, j'aurais �t� r�sistant ou je le serai le moment venu. Ce serait oublier que l'�thique est une question d'ici et de maintenant. Ne pas s'en occuper, c'est la faire p�ricliter. L'exigence du respect de l'autre est l'affaire de tous et de tous les jours. (�) A Mgr Teissier : �Je vous �cris parce que je suis un peu triste de constater qu'il est impossible de remettre en cause, sans le vouloir mais sans h�sitation, la version d'une arm�e alg�rienne responsable de l'enl�vement des moines, sans s'attirer les foudres de ceux qui, arm�s de certitudes, font leurs enqu�tes de Paris. Apr�s notre d�jeuner, j'ai avanc� dans mon travail et j'ai les preuves d�finitives et indiscutables que les moines ont �t� enlev�s par un groupe du GIA : j'ai rencontr� et interview� un t�moin enlev� la m�me nuit et racontant leur captivit� en montagne dans une cache du GIA, et des agriculteurs qui ont vu les traces du groupe et retrouv� une soutane sur le chemin. Ceci s'ajoute au t�moignage du gardien du monast�re et de Sid Ali Benhadjar. Ce soir, je suis d�contenanc� par la violence de l'attaque contre moi, et ne sais que faire de ce travail. (�) Je pense � Didier, dont les yeux s'�claircissaient d�s qu'il �tait question de l'Alg�rie, du Sahara, des gens de l'�glise de l�-bas, si loin. Il me vient � l'esprit les derni�res volont�s du p�re Christian de Cherg� : �Je ne vois pas comment je pourrais me r�jouir que ce peuple que j'aime soit indistinctement accus� de mon meurtre. C'est trop cher pay� ce qu'on appellera, peut-�tre, la "gr�ce du martyre" que de la devoir � un Alg�rien, quel qu'il soit, surtout s'il dit agir en fid�lit� � ce qu'il croit �tre l'islam.� Je pense encore et toujours, chaque jour, � Didier, ce bel homme, fier et sensuel, curieux de tout et plein d'humour, mort inutilement. Pourquoi ? Pour ce qui concerne sa mort physique, nous ne conna�trons peut-�tre jamais exactement le d�roulement des faits qui ont pr�c�d� sa chute du cinqui�me �tage d'un immeuble parisien, mais au fil de mes interrogations, j'ai �t� d�go�t�e par la manipulation de son action. Ind�pendamment de sa volont�, �tant accus� par les s�ides des int�gristes islamistes, d'�tre un ��radicateur�, il s'est retrouv� dans le collimateur du r�seau �Qui tue qui ?�. A la suite de la mort de Didier Contant, aucun journaliste n'a os� reprendre son enqu�te sur l'enl�vement et l'assassinat des moines trappistes. Aucun journaliste n'a os� mener une investigation sur les circonstances de sa mort. Deux ans apr�s sa mort, aucun journaliste sur la place de Paris n'ose citer son nom. (�) Le carnet de bal est vide. L'esprit critique a perdu la partie. Hors de ce carcan impos�, pourrais-je obtenir une autre gr�ce qu'un retour sur soi ? Je l�ve les yeux au ciel pour y suivre l'envol des oiseaux, mais jamais la nuit, car la nuit est � nous. Aurai-je de nouveau un jour une autre envie que celle de vouloir te serrer la main, de sentir ton pied chaud contre le mien, pour nous envoler ensemble depuis la falaise de la Serra da Chela ? Une nuit de voyage en Angola, sur le col sinueux, flanqu� de pentes �troites et c�toyant des pr�cipices terrifiants, nous sommes descendus dans les plaines de Namibe pour nous arr�ter � la croix de Magellan, fix�e au cap d'un escarpement surplombant l'oc�an. Les projets d'amour n'ont pas de raison. Que le temps ne s'�coule plus, que l'espace devienne infini, que la brise me donne des ailes, tel un oiseau je planerai, rien que pour te retrouver.

CE QU'EN DIT LA PRESSE

- �Ce livre, �crit par la compagne de feu Didier Contant et pr�fac� par Antoine Sfeir, offre, enfin, le t�moignage sur le harc�lement sans pareil dont a �t� victime son compagnon, dont les conclusions sur son enqu�te sur l�assassinat des moines de Tibhirine a os� �tre � contre-courant des discours du "qui-tue-qui ?"�. Khadidja Baba-Ahmed, Le Soir d�Alg�rie

- �C�est un livre qui accuse, une sorte de contre-enqu�te sur les causes du suicide le 15 f�vrier 2004 de Didier Contant, quarante-trois ans, provoqu� par une campagne de d�nigrement � l�endroit du journaliste.� Hassane Zerrouki, L�Humanit�

- �Ce livre est � la fois bouleversant et terrifiant. Il pointe du doigt l'effet mortel des campagnes de d�sinformation ayant eu cours durant la p�riode des attentats en Alg�rie. Quand les int�gristes assassinaient et que des journalistes fran�ais pr�f�raient se demander "qui tue qui ?"� Caroline Fourest, ProChoix

-�Le document que publie Rina Sherman, la compagne du journaliste disparu, nous entra�ne dans un maquis parisien qui s�me les fatwas et brouille les pistes. En remontant la fili�re des rendez-vous, des courriels et des derniers SOS lanc�s par Didier (dont l�ultime � Mgr Teissier, archev�que d�Alger), Rina d�couvre que les ennemis du journaliste, notamment un certain Jean-Baptiste Rivoire, avaient lan�� contre lui un terrible processus de diffamation. En affirmant qu�il travaille avec les services secrets alg�riens, on attente � l�honneur de Didier Contant, on ruine ses relations avec les r�dactions pour lesquelles il travaille. Bref, on brise un homme.� Martine Gozlan, Marianne

l �Ce livre, bien �crit d'ailleurs, se lit comme un roman policier... Malheureusement, il ne s'agit pas de fiction mais de r�alit�. L'auteure va jusqu'au bout de sa qu�te de v�rit�. Elle est souvent seule devant des portes ferm�es qu'elle ouvre, ce qui lui permet de d�voiler certains oublis dans l'enqu�te men�e par la police. Mais peu � peu, tout s'explique, notamment le silence de certains journalistes.
Jean-Fran�ois Chalot, ResPUBLICA

Le huiti�me mort de Tibhirinede Rina Sherman
Editions Lazhari Labter et Le Soir d�Alg�rie
200 pages Format15 X 22 avec jaquette
Prix : 600 DA
Publi� aussi aux Editions Tatamis en France

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