Chronique du jour : LETTRE DE PROVINCE
Le pr�sident et ceux de la


Parlez, Monsieur le Pr�sident ! Dans ces moments de grande incertitude, il est de votre devoir de vous exprimer. Ces heures graves qui sonnent � nouveau comme le tocsin pour la R�publique vous interpellent et vous seul ! Dor�navant, il n�y a plus de place ni de cr�dit � tous les propos qui, habituellement, se nourrissent, dit-on, de vos convictions. Venez donc au-devant de ce pays pour lui expliquer ce qu�il doit � son tour penser de la tourmente qui s�est empar�e des esprits !
Empressez-vous de lui dire comment il est encore possible d�agir afin de surmonter le chantage par la terreur dont vous-m�me affirmiez qu�il �tait du domaine du pass� ! Adressez-vous en toute urgence � vos concitoyens r�duits peureusement � raser les murs. Oui ! Monsieur le Pr�sident, l�Alg�rie a peur de nouveau et cherche d�sesp�r�ment � comprendre comment vous comptez l�en gu�rir. Pas une seule voix officielle ne pourra se substituer � la v�tre pour nous dire ce qu�il faut � pr�sent penser de cette conjuration th�ocratique multiforme que l�on courtise dans les all�es du pouvoir et qui, n�anmoins, demeure hostile � la R�publique. Ici, elle participe aux affaires publiques et l�, elle tue quand elle le croit n�cessaire. Et pourtant, elle est la seule � b�n�ficier des subtilit�s s�mantiques gr�ce auxquelles elle est � la fois un partenaire politique et un ennemi que l�on pourchasse. Car, enfin, c�est avec vous et sous votre direction que ce pays a �t� amen� � croire en une possibilit� de paix � travers l�amnistie g�n�rale ! Vous nous aviez, en quelque sorte, convaincus que l�on pouvait avantageusement solder le crime en �change d�une promesse de paix. La paix des braves ! Les couteaux aux vestiaires ! Le silence des armes ! C��tait, � n�en pas douter, un jargon familier ; et pour cause, il nous venait de loin, c�est-�-dire de notre histoire. Bref, ce fut la fable du d�risoire �plat de lentille� que l�Etat accepta de recevoir en conc�dant � ses ennemis une parcelle de sa majest�. D�s septembre 1999, vous aviez fait ce choix et n�aviez eu de cesse de multiplier les gestes de bonne volont� en affirmant que la paix, avec un grand �P�, n�a pas de prix et qu�il faut la r�aliser � n�importe quel� prix. C�est donc de cela que vous devez nous entretenir, toutes affaires cessantes, car il semble que la parenth�se vient de se refermer brutalement sur cette mystique que vous consid�rez comme le grand �uvre de vos huit ann�es. H�las, il va falloir se r�soudre � re-examiner cette option fondamentale qui n�a abouti finalement qu�� mettre sous le boisseau le credo du ch�timent en agitant le pardon sans pourtant restaurer la coh�sion sociale. Les attentats du 11 avril ne sont-ils pas venus pour r�activer une vieille crainte que vous-m�me n�aviez eu cesse de minimiser, voire de la combattre ? Avant m�me que vous ne f�tes �lu en 1999, le candidat que vous �tiez alors, n�affirmait-il pas qu�il �tait temps de dialoguer avec �la montagne � (sic). Puis vous vous y �tes attel� en organisant le cadre juridique de ce grand pardon. A travers deux r�f�rendums et un arsenal de textes r�glementaires, vous avez �blanchi� les gens de la montagne et vid� les prisons. De r�habilitation sociale en recouvrement des droits civiques, tous furent r�ins�r�s de la mani�re que l�on sait puisque la plupart d�entre eux b�n�fici�rent de r�troactivit� dans leurs emplois d�origine. G�n�reuse, la R�publique fut bonne fille � leur �gard. Sauf qu�eux ne voulurent gu�re se contenter de la citoyennet� de base. Ils exig�rent plus, estimant que la reconnaissance de leur statut signifiait l�gitimit� politique. D�o� la gu�guerre, larv�e cette fois-ci, qu�ils men�rent contre le pouvoir. Ce dernier p�cha-t-il par ignorance ou par orgueil ? En tout cas, il oublia superbement que l�islamisme politique, notamment dans sa forme violente, n�est jamais soluble dans les strat�gies consensuelles. Par nature, il ne se con�oit que comme une totalit� qui n�a pas besoin d�interface. Or, pour avoir oubli� ou du moins sous-estim� sa r�surgence, ce pays se retrouve aujourd�hui dans le m�me cas de figure qu�en 1991 avec de surcro�t le fait que la critique des armes lui donne quelques certitudes qu�il n�avait pas par le pass�. Un Etat qui a capitul� une fois peut le faire une seconde fois, se disent-ils entre chefs de guerre. Voil� comment s�explique la pression constante que ces leaders mettent sur le pouvoir. Nous entendons d�j� quelques subtils sp�cialistes faire des distinguos entre le terrorisme d�hier et celui du 11 avril. Ils nous disent qu�entre le �djazarisme� (cette alg�rianit� du combat) des ann�es 90 et le cosmopolitisme d�El Qa�da, la diff�rence est claire. Puis ajoutent que la paix conclue progressivement entre 2000 et 2005 ne doit pas �tre remise en cause par le seul fait que la n�buleuse de Ben Laden ait accord� une franchise � des groupuscules locaux. M�me s�il est toujours tentant de rassurer en �tablissant quelques diff�rences entre le GSPC d�une part et les GIA ou l�AIS d�autre part, l�on ne peut par contre taire la compl�mentarit� de leurs objectifs qui se r�sument dans le r�ve d�un Etat islamique. Sur cela, aucun courant de cette galaxie ne transigera jamais. Cela dit, puisque le chef de l�Etat semble prendre le temps de la r�flexion avant de livrer le fond de sa pens�e, ne gagnerait-il pas d�abord � rappeler � l�ordre son entourage qui s�exprime sur le sujet avec une d�sinvolture atterrante. Ces allumeurs de contrefeux pro-r�conciliation s�appellent toujours Belkhadem et Soltani. L�un comme l�autre sont mont�s au cr�neau sur les d�combres du palais du Gouvernement pour soutenir mordicus qu�il n�y a rien � retrancher � la politique de rapprochement avec l�islamisme. Or, pour pouvoir le dire avec autant d�aplomb, il e�t fallu au pr�alable demander aux Benhadj, Layada et les chefs de guerre de l�AIS qu�ils se d�marquent publiquement des commanditaires de l�op�ration d�Alger. Ils ne l�ont pas fait parce que, d�une part, ils encouraient un refus, et d�autre part, parce qu�ils savaient que tout ce beau monde amnisti� applaudissait en apart� � cet enfer du 11 avril. Pour eux, le GSPC prolonge � l��vidence leur combat d�hier et ils voient dans les attentats parfaitement cibl�s la confirmation de leur activisme discret. La conqu�te du pouvoir demeurant leur horizon, comment pouvaient-ils ne pas se reconna�tre dans cet acte de guerre ? Tous les hommes de bonne volont� et de bon sens pensent que ce 11 avril pr�pare � toutes les r�visions, m�me les plus d�chirantes pour certains cercles influents. Et c�est au pr�sident de la R�publique d�en d�cr�ter les modalit�s d�une r�pudiation salvatrice. Lui-m�me ne peut plus se contenter des incantations et minimiser les effets pervers du 11 avril. Ce terrorisme qui frappe avec tant de violence n�est pas r�siduel comme il se r�p�te mensong�rement depuis 8 ans. Qu�il ait des accointances transnationales importe peu puisque sa matrice est l�islamisme tout court. Voil� pourquoi Monsieur le Pr�sident nous sommes impatients de recevoir vos oracles. Ceux qui peuvent nous �ter tous ces doutes mortels. Dites-nous la v�rit� et dans le m�me temps soulignez leurs faits � ceux qui ont traduit la paix octroy�e en paix des cimeti�res.
B. H.

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