Chronique du jour : LETTRE DE PROVINCE
De �l�honneur de l�Alg�rie� aux futurs chaouchs de la R�publique


De m�me que l�on ne fait pas une bonne litt�rature avec de bons sentiments l�on n�engage jamais les v�ritables combats avec des credo tapageurs et une �thique de midinettes. �Pour l�honneur de l�Alg�rie� (1), pr�tendent-ils, ces n�o-r�publicains souscrivent � la n�cessit� �lectorale. Gr�ce � leur manifeste, ouvert aux adh�sions, ils invitent toutes les bonnes �mes partageant ce souci de les rejoindre, en mettant un bulletin dans les urnes le 17 mai. Ainsi, ils nous enseignent que le seul v�ritable changement d�mocratique doit d�sormais passer par la collaboration avec le r�gime en place.
Il faut quand m�me croire que cet �honneur� patriotique n�est pas trop exigeant. Ces nouveaux �amis du manifeste et de la libert� qui se fendent en d�clarations et appellent � la constitution d�un front de r�sistance, ne nous disent, ni pourquoi cette communaut� nationale doit se r�concilier avec le civisme des urnes, ni comment eux vont parvenir � changer les m�urs d�un syst�me. Ce j�suitisme politique qui conjugue les grands principes du droit et de la citoyennet� �pargne �tonnamment le r�gime qui nous gouverne avec le m�pris que l�on conna�t. Ah ! L�honneur du pays� que ne traficote-t-on pas en son nom ! Car il faudra bien fixer un rendez-vous, apr�s le simulacre des l�gislatives, � ces dignes chevaliers qui ces jours derniers portent la bonne parole r�publicaine. Recal�s ou adoub�s, on les attendra avec le m�me tract � la main. Sur le trottoir ou dans l�h�micycle, il faudra bien qu�ils tiennent leurs promesses. Eux qui, pompeusement, s�engagent �au-del� des �ch�ances �lectorales (�) � �tablir une coordination (�) et d�velopper un programme d�action� n�auront plus le droit de se taire ni de s�effacer. Qu�ils ne viennent surtout pas avouer leur erreur, car, lorsque l�on s�approprie un certain �honneur� de la nation, il faut le d�fendre co�te que co�te au risque d��tre � son tour accus� de chiffe molle ou de pi�tre politicard qui n�aurait m�me pas le cynisme de ceux que l�on pr�tend combattre. Cette �lite politique qui reprend � son compte tous les constats �tablis depuis longtemps ne pourra plus se chercher de faux-fuyants plus tard ; ou alors elle aura choisi la pente d�une autre indignit� bien plus tragique que celle dans laquelle sont install�s les caciques des r�gimes. Ceux-l� ont du moins le m�rite de ne pas faire �talage de scrupules. Ils sont cons�quents avec leur carri�risme gr�ce auquel ils se sont fourbi d�autres armes discursives et un autre vocabulaire pour �voquer leur statut. Ainsi sont-ils eux parvenus � faire abstraction de cet id�alisme oratoire qu�on nous donne � lire, aujourd�hui, comme une �Fatiha� politique. Une somme de v�ux pieux qui cachent une certaine tartuferie politicienne. C�est bien de cela qu�il s�agit, d�s l�instant o� l�on jette en p�ture journalistique un texte qui pr�tend dire le contraire de ce que l�on s�appr�te � commettre ! En effet, au moment o� l�affichage des listes a commenc� l�on affiche simultan�ment sa vertu partisane. Appeler � un �sursaut citoyen� (sic) ou bien r�ver � un �retour aux sources des valeurs patriotiques� (re-sic) ; ou encore affirmer sa �volont� de r�habiliter le suffrage universel� (re- re- sic) ne constituent ni une originalit�, ni un monopole de la pens�e. Belkhadem, Ouyahia, Aboudjerra, Sa�d Sadi ou Hanoune peuvent en dire autant. Sauf que tous ces pr�nomm�s s�abstiennent d�allumer ces vieilles lunes et se contentent de ferrailler � l�int�rieur du syst�me pour d�crocher quelques quotas de sin�cures r�mun�r�es. Tel est, par cons�quent, le paradoxe central de ce r�publicanisme honteux qui, tout � la fois, admet qu�il y a une confiscation insoutenable des libert�s publiques mais n�anmoins participe � la com�die du pouvoir. Toute la dialectique de l�entrisme, dont d�autres appareils ont fait usage par le pass�, n�est pas parvenue � am�liorer l��tat de nos libert�s ni m�me adoucir le syst�me autocratique qui r�gente le pays. Pire, ce �collaborationnisme�, pris dans le sens de la suj�tion, a m�me fini par d�mon�tiser surtout le pluralisme dont seuls se gaussent ceux qui tirent des avantages mat�riels. C�est ainsi que se bricolent les institutions d�une r�publique �couscoussi�re�, � comme disait l�autre. Celle qui parvient � corrompre le peu de vigilance d�mocratique irriguant n�importe quelle soci�t� et dont les �lites se commettent avec le �deus ex machina� au nom de la transition pacifique. Par le pass�, et dans une autre id�ologie, ne parlait-on pas de �compagnonnage� et de �convergences tactiques� pour justifier la compromission ? Aujourd�hui, l�on exorcise simplement le changement violent en substituant une certaine urbanit� politicienne au radicalisme pl�b�ien. De ce dernier, nos �lites ont � la fois une crainte qu�il ne se manifeste � nouveau et en m�me temps ils revendiquent sa filiation. A contrario de la coh�rence dans la strat�gie des islamistes qui feignent d��tre conciliants � travers quelques appareils l�galistes alors qu�ils alimentent la pression par le terrorisme, la n�buleuse du r�publicanisme ne cherche en fait que le cocon du r�gime. C�est ce pantouflage politique de quelques personnalit�s en vue qui a progressivement lamin� les vocations militantes gr�ce auxquelles se diffusent des id�aux et se captent les voix des �lecteurs. Redha Malek, Sa�d Sadi, Benyoun�s ou Hanoune ignorent-ils qu�ils n�ont pas de v�ritables bases sociologiques et que leur notori�t� est, au mieux, uniquement m�diatique ? Or, ces quelques personnalit�s s�offrent des postures de guide � la veille de chaque �lection alors qu�il est notoirement admis que leur p�roraison de circonstance ne rencontre d��chos que dans le microcosme. Qui les entend ou les comprend dans le pays profond ? En fait, ils dialoguent avec le pouvoir chaque fois qu�ils s�arrangent � animer un meeting �populaire�. Implicitement, ils sont dans une offre de service toutes les fois qu�ils s�impliquent dans la th��tralit� des urnes. De l�aveu m�me du chef de l�Etat qui exige d�magogiquement que le scrutin soit cette fois-ci transparent, nos votes pass�s n��taient donc pas clairs ! Mais alors pourquoi aujourd�hui doivent-ils prendre pour argent comptant les termes de cette circulaire pr�sidentielle ? De vieille sagesse, il en est des assurances politiques comme des promesses : elles n�engagent que ceux qui les re�oivent. Ces l�gislatives pour lesquelles nos r�publicains participent ne contribueront pas � approfondir la d�mocratie, quoiqu�ils le pr�tendent. Tout au plus elles sont une opportunit� pour le r�gime de redistribuer la donne politique afin de mieux g�rer les derniers 24 mois d�un mandat pr�sidentiel. Autant dire que les d�put�s qui si�geront � partir du 18 mai ne seront pas meilleurs que les �chaouchs� de la r�publique que l�on a d�sign�s en 2002. La seule variante par rapport � la pr�c�dente l�gislature sera l�apparition d�autres �tiquettes politiques. C'est-�-dire de quelques casseroles bruyantes pour mieux enterrer le vertueux pluralisme dont on a longtemps r�v�.
B. H.

(1) lire � l�appel � lanc� par A.N.R et soutenu par quelques personnalit�s publi� dans la presse du jeudi 26 avril.

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