Actualit�s : COURS DU P�TROLE
La hausse va-t-elle se poursuivre ? Oui, si...


Les cours du p�trole poursuivent leur course folle, atteignant vendredi dernier le seuil des 126 dollars (126,67 dollars) le baril � New York. Apr�s avoir d�pass� la barre des 100 dollars le 2 janvier dernier, les prix s�envolent de plus en plus vers les niveaux de 130, 50 dollars, voire les 200 dollars. Pour autant, cette hausse va-t-elle se poursuivre ? Des experts et des �conomistes, contact�s hier, estiment, unanimes sur ses causes, que la hausse va se poursuivre, si le mod�le de consommation �nerg�tique ne change pas.
C. B.

ABDERRAHMANE MEBTOUL
(�CONOMISTE, EXPERT INTERNATIONAL) :
"Si le mod�le de consommation ne change pas"

Quels sont les facteurs � l�origine de cette hausse continue des cours du p�trole ?
Abderrahmane Mebtoul :
Plusieurs �l�ments sont � prendre en consid�ration. En premier lieu, il faut relever l�expansion de l��conomie mondiale malgr� la r�cession aux Etats-Unis. Une expansion li�e � la pouss�e des pays �mergents, l�Inde, la Chine, dont les importations d�hydrocarbures ont repr�sent� 50 milliards de dollars en 2007. Si �a continue, la Chine risque, � terme, de devenir la troisi�me puissance �conomique dans le monde et d�tr�ner l�Allemagne. Mais aussi la forte croissance en Russie dont la demande en p�trole est appel�e � cro�tre fortement. En second lieu, il faut noter la relation inversement proportionnelle entre l��volution du cours de la monnaie europ�enne, l�euro, et celle du cours du Brent. Contrairement � l�id�e re�ue, 75% des transactions �conomiques dans le monde se font en dollar. Or, si le dollar baisse, les cours du p�trole, et ceux du gaz qui lui est index�, croissent. Un troisi�me facteur a trait aux tensions g�opolitiques, notamment au Nigeria. Mais aussi le risque de tension avec l�Iran qui pourrait, le cas �ch�ant, �tre amen� � fermer le passage d�Ormuz, lieu de transit de 60% du p�trole du Moyen-Orient. Ce qui provoquerait un pic du p�trole � 200 dollars. En outre, l��conomie mondiale est le terrain d�action de la sp�culation. Les investisseurs anticipent l��volution des cours, le p�trole devient une r�serve, des mati�res premi�res sont stock�es. Ce ph�nom�ne sp�culatif amplifie les autres hausses de prix m�me s�il ne repr�sente que 10% � 15% des facteurs derri�re l�envol des cours de l�or noir. Par ailleurs, il faut rappeler que l�Organisation des pays exportateurs de p�trole (Opep) ne contr�le que 40% de la production. Les 50% sont le fait d�autres pays dont la Russie, grand consommateur mais aussi grand exportateur de gaz, avec son groupe Gazprom qui compte investir sur 5 ans plus de 500 milliards de dollars. Cette hausse de l�or noir est derri�re la flamb�e des denr�es alimentaires. En prenant en consid�ration l�impact des changements climatiques, la ru�e vers la production de biocarburants, � base de c�r�ales, ainsi que l�augmentation du niveau de vie dans certaines r�gions du monde. N�anmoins, un autre facteur est � prendre en consid�ration. A contrario de ce qui s�est pass� en 1974 ou en 1979, les pays d�velopp�s ont absorb� la hausse du dollar, sans rien affecter de l�inflation.
Cette hausse des cours va-t-elle se poursuivre ? Est-elle durable ?

Je rel�ve d�abord que les r�serves de charbon aux Etats-Unis repr�sentent le double des r�serves de l�Arabie saoudite. Il faut �galement prendre en consid�ration les investissements dans les nouvelles formes de consommation �nerg�tique. En fait, deux scenarii sont � prendre en consid�ration pour r�pondre � cette interrogation. Soit on continue dans le mode de consommation, et les cours poursuivront leur hausse, une donn�e appel�e � �tre structurelle, avec des cons�quences dramatiques sur l�environnement. Soit, les changements climatiques mena�ant, on pourra temp�rer cette hausse, l��conomie d��nergie et nouvelles formes de consommation se d�veloppant. Des �nergies alternatives peuvent �tre promues, en notant, dans le cas du solaire, qu�il faut uniquement de la lumi�re. Une prise de conscience se d�veloppe � propose de la n�cessit� de ces investissements lourds et � maturation longue. Certes, la pression des compagnies p�troli�res est � prendre en consid�ration. Toutefois, l�investissement dans la recherche, le d�veloppement technologique et la valorisation de nouvelles ressources peuvent contrecarrer cette pression. Une pression � laquelle s�ajoute celle des Etats pour des raisons de fiscalit�.
Propos recueillis par C. B.

 

MUSTAPHA MEKIDECHE
(�CONOMISTE ET VICE-PR�SIDENT DU CNES) :
"Les prix vont rester �lev�s"

Quelles sont les raisons de cette flamb�e des cours ?
Mustapha Mekideche :
Je constate que le monde est entr� dans une phase de transition �nerg�tique, o� l��nergie devient ch�re. Ainsi, ce qui est mobilis� comme nouvelles ressources ne couvre pas tout ce qui est consomm�. Actuellement, la demande p�troli�re mondiale est tir�e par la Chine, l�Inde, pays � forte croissance �conomique. Un contexte o� les ressources en hydrocarbures ont tendance � s��puiser, � moyen ou long terme, mais o� les prix augmentent. En outre, il y une sp�culation sur les mati�res premi�res, notamment agricoles. La chute du dollar pousse les sp�culateurs � rattraper, par l�augmentation des prix, ce qu�ils perdent en termes de croissance. Les incertitudes g�opolitiques dans les zones instables, que ce soit en Irak, au Venezuela ou au Nigeria, sont �galement � remarquer. Pour r�sumer : des ressources d�hydrocarbures � l�horizon fini, une demande p�troli�re croissante et une instabilit� g�opolitique.
Cette hausse des cours va-t-elle se poursuivre ? Est-elle durable ?
Je crois que les prix vont rester �lev�s encore. Je ne crois pas qu�il y a un bouleversement de cette donne. En tout cas, avec des fondamentaux du march� qui sont stables, mais avec la probl�matique de croissance aux Etats-Unis. Avec une balance des paiements qui affiche un d�ficit important, un taux de croissance qui refl�te la crise financi�re, le probl�me de subprimes et son impact sur la consommation. M�me si pour le moment, cette �conomie semble se maintenir. Gr�ce � l�intervention des Fonds souverains arabes, grands acheteurs d�actifs, et aux placements dans les bons du Tr�sor am�ricain effectu�s par certains pays et en relevant l�impulsion d�une politique de relance par la demande.
C. B.

ABDELMADJID ATTAR
(EXPERT P�TROLIER ET ANCIEN P-DG DE SONATRACH) :
"La hausse va se poursuivre"

La hausse des cours du p�trole s�explique-t-elle ? Va-t-elle se poursuivre ?
Abdelmadjid Attar :
C�est une question � laquelle r�pondre est tr�s difficile. N�anmoins, deux facteurs sont � relever. Quoique la production p�troli�re soit, � l�heure actuelle, quelque peu l�g�rement sup�rieure � la demande qui aura globalement tendance, durant les 20 prochaines ann�es, � augmenter. Le march� est tr�s frileux et les consommateurs sont dans l�incertitude sur le fait de savoir si la production suffira � r�pondre � la demande. Cela cr�e une certaine panique. Je constate, d�autre part, que la capacit� de l�Arabie saoudite � augmenter sa production est probl�matique. Troisi�me �l�ment, il y a trop de sp�culations. Or, ni l�Opep ni autre n�est en mesure de contr�ler les prix qui sont le fait des sp�culateurs. Un autre param�tre, la chute du dollar. Une monnaie qui sert � la facturation du p�trole, et dont la baisse explique la hausse des cours. Je crois que cette hausse va se poursuivre, et les prix du p�trole ne vont pas d�cro�tre � moins de 70 � 90 dollars le baril. L�autre param�tre concerne la situation g�opolitique, en Irak, en Iran et au Venezuela. A mon avis, les prix resteront �lev�s � moyen terme. En n�omettant pas d�indiquer l�augmentation des mati�res premi�res, et donc, la n�cessit� pour les pays consommateurs, producteurs de d�riv�s p�troliers, � ce que ces prix ne baissent pas.
C. B.

HAUSSE DES COURS DE L'OR NOIR
La demande des pays �mergents, la sp�culation,...

Le cours du p�trole a d�pass� vendredi pour la premi�re fois le seuil des 126 dollars � New York, quelques heures apr�s avoir franchi celui de 125 dollars, poursuivant une course folle, nourrie par les craintes sur l'offre, la robustesse de la demande et la sp�culation. Spectaculaire sur un an, la hausse des prix s'est encore acc�l�r�e au premier trimestre cette ann�e : 100 dollars le 2 janvier, 105 dollars le 6 mars, 110 dollars le 13 mars. Et depuis lundi, l'emballement est vertigineux et les records quotidiens. Apr�s la barre des 120 dollars lundi, celles des 121 et 122 dollars ont �t� franchies mardi, les 123 dollars atteints mercredi, puis 124 dollars jeudi et enfin 125 et 126 dollars d'un coup vendredi o� les cours se sont envol�s jusqu'� 126,27 dollars le baril, lors des �changes �lectroniques d'apr�s s�ance � New York, et jusqu'� 125,90 dollars � Londres. Le baril de Light Sweet Crude pour livraison en juin a termin� la s�ance du New York Mercantile Exchange (Nymex) sur un record de cl�ture � 125,96 dollars (+2,27 dollars), tout comme le baril de Brent de la mer du Nord, qui a termin� pour la premi�re fois � 125,40 dollars (+2,56 dollars) � Londres.
La croissance de la demande des pays �mergents inqui�te
Des sabotages sur les installations nig�rianes du groupe p�trolier Shell et un regain de tensions g�opolitiques entre l'Occident et l'Iran, quatri�me producteur mondial de brut, ont servi d'amorce vendredi dernier � cette derni�re flamb�e. Mais ces craintes n'�taient que les derniers ingr�dients de la recette explosive qui a fait doubler en un an les prix du p�trole. Le principal ingr�dient, pr�sent d�s 2002, est l'inqui�tude suscit�e par la croissance de la demande p�troli�re dans les pays �mergents, notamment en Chine, sachant que l'offre, elle, augmente moins vite : ann�e apr�s ann�e, l'�quilibre entre offre et demande se resserre. Dans ce contexte, l'Organisation des pays producteurs de p�trole (40% de la production mondiale) n'a rien fait pour calmer les prix. Depuis septembre, le cartel p�trolier contemple, impassible, l'envol�e des prix et se garde d'agir, de crainte qu'une �ventuelle surproduction ne provoque un effondrement des prix. Jeudi, le secr�taire g�n�ral du cartel, Abdallah El- Badri, s'est content� de d�clarer que l'organisation �tait �pr�te � agir si le march� �prouve le besoin de mesures suppl�mentaires�. Du c�t� des producteurs hors Opep, le tableau est celui de performances qui n'ont cess� de d�cevoir jusqu'� pr�sent cette ann�e. Enfin, les op�rateurs ont not� avec inqui�tude les difficult�s des compagnies p�troli�res internationales, qui ont toutes affich� au premier trimestre des productions p�troli�res en berne.
La sp�culation en cause
Un autre grand facteur est le vif int�r�t des fonds d'investissement pour le p�trole, attir�s par la rapide appr�ciation des prix du p�trole cette ann�e. Ce qui explique probablement les mouvements de prix ces derniers jours, malgr� des nouvelles baissi�res, incluant un dollar plus fort, des nouvelles pour une fois positives en provenance de l'offre au Nigeria, et des craintes sur la consommation d'essence aux Etats-Unis. Accus�s par l'Opep d'�tre les grands responsables de la flamb�e p�troli�re, les investisseurs s'en d�fendent et font remarquer que les prix ont poursuivi leur ascension cette semaine malgr� le rebond du dollar face � l'euro. Or, les sp�culateurs avaient eu tendance � acheter du p�trole pour se couvrir contre l'inflation en p�riode de baisse du dollar. Avec le calendrier, un dernier �l�ment pourrait encore faire grimper les prix : la "driving season" � saison des grands d�placements automobiles aux Etats- Unis � approche, r�clamant de plus grands volumes d'essence.
C. B. /Agences

Nombre de lectures :

Format imprimable  Format imprimable

  Options

Format imprimable  Format imprimable