Actualit�s : COMM�MORATION DU 48e ANNIVERSAIRE DU MASSACRE DU 17 OCTOBRE 1961
�Paris se souviendra, la Seine t�moignera�


Une violente r�pression men�e par l�administration coloniale dans un lieu symbolique comme Paris, capitale des droits de l�homme, contre un une population immigr�e totalement pacifique et vuln�rable est mieux rentable au plan politique qu�une op�ration militaire bien r�ussie dans les djebels de l�Alg�rie martyris�e.
Le r�sultat aura �galement plus d�impact m�diatique. C�est s�rement ce que se sont dits les responsables du FLN r�volutionnaire, eux qui ont d�cid� de d�placer la bataille politicomilitaire de la guerre de Lib�ration dans l�antre de l�ogre colonisateur. Pour les moudjahidine de la F�d�ration de France du FLN, il est question de la bataille de Paris et nullement de la bataille d�Alger version Papon. L�Histoire r�v�lera un jour, peut-�tre, que les manifestations du 17 Octobre 1961 dans la capitale fran�aise, venues apr�s celles du 11 D�cembre 1960, ont �t� un tournant d�cisif dans le processus des n�gociations avec le gouvernement de Gaulle pour l�aboutissement de la principale revendication de Novembre 1954 : l�autod�termination aux Alg�riens. �C�est la premi�re fois dans l�Histoire des peuples en lutte pour leur ind�pendance que le colonis� porte la guerre sur le sol du colonisateur. La bataille des Alg�riens � Paris est une bataille de Dien Bien Phu politique.� Ghafir Mohamed n�a pas manqu� de citer le commentaire du fameux g�n�ral Giap sur les �v�nements d�octobre � Paris pour mettre en exergue l�ampleur du front ouvert par les patriotes de la F�d�ration de France. Ce 48e anniversaire du 17 octobre 1961 est une halte n�cessaire pour les Alg�riens. D�aucuns pensent qu�il est inutile d�accomplir un rituel comme l�affectionne le r�gime en place, mais de faire parler plut�t les t�moins pour dire aux jeunes que l�ind�pendance de l�Alg�rie a �t� ch�rement pay�e par les patriotes, les vrais. Dans le m�me ordre d�id�es, il faut contourner le cloisonnement mis en place sur la R�volution de Novembre pour mettre � la lumi�re du jour tous les faits, bons ou mauvais �les Alg�riens ont de quoi s�enorgueillir l�gitimement et sans fanfaronnade � notamment la contribution et les sacrifices consentis par la communaut� nationale �tablie en France. Cette contribution et les sacrifices qui en d�coul�rent ont �t� d�une importance essentielle pour la victoire finale. Ce fait est occult� par ceux qui n�ont ni de bilan � faire encore moins un fait d�arme � accoler � leur m�daille imm�rit�e qui leur sert d�argument politique pour l�gitimer leur pouvoir r�pressif et rentier. Ceux-l� m�mes qui ont vainement tent� d�effacer de la m�moire nationale l�apport des militants de la F�d�ration de France � la R�volution de Novembre. Pour ce faire, Ghafir Mohamed dit Moh Clichy est un t�moin de cette �pop�e qui est synonyme de courage pour le recouvrement de la dignit� pi�tin�e du peuple alg�rien. L�ancien chef de la superzone (Rive gauche de Paris) (voir article le concernant) est un t�moin durant les pr�paratifs et le d�roulement des manifestations de cette journ�e m�morable. Il nous a list� un certain nombre de faits marquants de cette p�riode tragique. Il reste marqu� particuli�rement par les atrocit�s auxquelles se sont livr�s, en toute libert�, les policiers parisiens. Il a �galement fait allusion aux retomb�es politiques de cette action.
Le contexte

A la lecture du r�cit de M. Ghafir, l�observateur ne manquera pas de noter quelques indices sur la situation politique d�avant la date du 17 octobre 1961. Ce qui permet de situer l�importance des �v�nements d�cid�s et contr�l�s par la direction du FLN et concr�tis�s par la F�d�ration de France du Front. Au d�but de l�ann�e 1961, dans les deux camps adverses, la situation �tait difficile. Le g�n�ral de Gaulle a �t� appel� en urgence pour contrecarrer le complot d�Alger et sauver la IVe R�publique vacillante. Dans le camp adverse, le bin�me FLN/ALN subit des pressions terribles, notamment � l�int�rieur o� les wilayas combattantes manquaient d�armement. Le FLN se positionne en seul interlocuteur du gouvernement fran�ais que pr�side le g�n�ral de Gaulle. Ce dernier fait face aux partisans de l�Alg�rie fran�aise. D�s lors le FLN augmente les pressions pour ramener le G�n�ral � la table des n�gociations. �Le Comit� de coordination et d�ex�cution (CCE) d�cide � partir du Caire de transporter la guerre dans le territoire fran�ais pour la lib�ration de l�Alg�rie�, dira Ghafir. Il pr�cise en outre qu��en juillet 1958, la F�d�ration de France du FLN cr�a l�Organisation sp�ciale (OS), en gardant le sch�ma de celle initi�e par le PPA. Elle est constitu�e de Fidaines volontaires, de commandos form�s en Allemagne et au Maroc pour des op�rations paramilitaires sur tout le territoire fran�ais, ciblant uniquement des objectifs militaires, policiers et �conomiques. Le 25 ao�t 1958 � z�ro heure le deuxi�me front arm� est engag� sur l�ensemble du territoire fran�ais�. La 7e Wilaya est n�e. Cette organisation a, en outre, � son actif plusieurs op�rations, notamment l�attaque de la raffinerie de p�trole de Mouripiane, attaque qualifi�e par le journal Le Proven�al de catastrophe nationale. La m�me organisation (l�OS) a men� en plein centre de Paris une action contre Soustelle, alors ministre de l�Information. Le livre de Ali Haroun �num�re ces actions. Il reste cependant � ce jour censur� paradoxalement par le pouvoir alg�rien. R�agissent � ce harc�lement des Fidaines de la F�d�ration de France, l�Etat fran�ais, par le biais de Papon, pr�fet de Paris, d�cr�te un couvre-feu qualifi� de raciste, contre les musulmans alg�riens et tous les hommes et femmes ayant le teint basan�. Le FLN en situation d�offensive en France est somm� de riposter, surtout au plan politique.
La manifestation
�La F�d�ration d�cide d�organiser un boycott du couvre-feu en changeant de strat�gie afin de renverser l�opinion publique fran�aise. Alors que les actions arm�es s�inscrivaient dans une logique de clandestinit� et de guerre, le boycott du couvre-feu doit prendre la forme d�une manifestation pacifique de masse au grand jour�, explique l�ancien chef de l�AMALA (superzone) de la FDF. Selon lui le Comit� f�d�ral a donn� des consignes pour que la manifestation se d�roule en trois phases. Le premier jour � le samedi 14 octobre, au plus tard le mardi 17 octobre � les responsables du FLN ont demand� � tous les Alg�riens et Alg�riennes de Paris et de sa banlieue de tout �ge de sortir. Par mesure de s�curit� les cadres recherch�s ont �t� dispens�s de pr�sence aux c�t�s des manifestants. Les organisateurs ont pr�vu des arrestations. Des consignes ont �t� donn�es aux femmes de sortir dans la rue pour scander les slogans �A bas le couvre-feu raciste !�, �Lib�ration de nos �poux et de nos enfants !�, �N�gociez avec le GPRA !�, �Ind�pendance totale de l�Alg�rie !� L�extension des manifestations � tout le territoire fran�ais et une gr�ve g�n�rale sont les deux autres �tapes. Pour notre narrateur, les 12 000 arrestations sont une indication de la mar�e humaine qui a adh�r� aux consignes du FLN. Incontestablement la F�d�ration de France du FLN a remport� une victoire politique majeure dans le d�roulement de la bataille de Paris.
Crime d�Etat

Malheureusement le succ�s de la manifestation eut un co�t tr�s �lev� pour l�immigration En effet, dans son rapport dat� du mois de juillet et adress� � ses responsables, dont une partie a �t� reprise par l��crivain Jean-Luc Einaudi dans son livre Un massacre � Paris, Ghafir Mohamed constatait que �la r�pression a �t� intense sur l�ensemble de la Zone ces derni�res semaines. Les XVe et Ve arrondissements, en particulier, ont �t� les plus touch�s par les fouilles et les perquisitions multipli�es jour et nuit. Cette r�pression est dirig�e souvent par des tra�tres, des harkis, particuli�rement dans les quartiers des deux r�gions cit�es.� �Mais pour nous le d�placement des harkis n�a chang� en rien leurs activit�s qui a �t� au contraire intensifi�e et �tendue sur l�ensemble de Paris et de sa banlieue�� �Mais ces plaintes, comme des centaines d�autres d�j� faites, n�ont aucune suite car voil� plus d�un d�j� que les harkis s�questrent, torturent et assassinent en toute tranquillit� dans les caves parisiennes sous les yeux de M. Patin et de la Commission de sauvegarde.� �Une r�action unanime est constat�e chez les militants, c�est celle de reprendre les actions contre la police et principalement les harkis, du moins pour se d�fendre l�gitimement.� �Nous savons que l�ordre donn� par notre gouvernement d�arr�ter les op�rations offensives en France a une signification politique vis-�-vis de l�opinion fran�aises et internationale. � Dans son autre livre intitul� La bataille de Paris, J. L. Einaudi cite,en annexe, la lettre rendue publique le 31 octobre 1961 par des policiers r�publicains. Ils d�non�aient les atrocit�s commises par leurs coll�gues et les miliciens de Papon. �Dans le 18e, des membres de Brigades sp�ciales du 3e district se sont livr�s � d�horribles tortures. Des Alg�riens ont �t� asperg�s d�essence et br�l�s �par morceaux �. Pendant qu�une partie du corps se consumait, les vandales en arrosaient une autre et l�incendiaient. Ces quelques faits indiscutables ne sont qu�une partie de ce qui s�est pass� ces derniers jours, de ce qui se passe encore.� M. Ghafi estime le nombre d�arrestations � 12 000 personnes. �Des centaines de cadavres de manifestants abattus par balles jonchent les grands boulevards. Des centaines de personnes ont �t� jet�es dans la Seine�, �crit-il dans son t�moignage. �On a d�nombr� 327 noy�s, d�apr�s les chiffres d�clar� par Mourad Oussedik, membre du collectif des avocats du FLN. Ces assertions se basent sur les rapports m�dicol�gaux. Ils ont �t�, en outre, confirm�s par les recherches de l�historien J.L Einaudi.� Pour cet acteur des �v�nements, il ne fait aucun doute qu�un crime d�Etat a �t� commis le 17 octobre 1961 contre une population d�sarm�e. Ce forfait a �t� perp�tr� par la police et les miliciens avec l�assentiment du gouvernement fran�ais
Les r�actions

En plus du succ�s politique incontestable engrang� par le FLN et le GPRA (Gouvernement provisoire de la R�publique alg�rienne) naissant, la bataille men�e par la 7e wilaya a �t� sans doute un moment crucial pour mettre les humanistes, les r�volutionnaires, les d�mocrates et certains hommes de la gauche fran�aise pour se d�marquer de la n�gation humaine inflig�e aux Alg�riens � les indig�nes que nous �tions, �taient d�pourvus de la citoyennet� fran�aises. Devant la f�rocit� de la r�pression qui a �branl� la conscience occidentale, la r�action a �t� � la mesure des atrocit�s commises par la police fran�aise. Et c�est dans cette r�action que r�side justement la victoire du FLN. Moh Clichy �num�re quelques unes de l��poque. Il rappelle que : �le 24 octobre Youcef Benkhedda, pr�sident du GPRA d�clarait : aux yeux du monde entier ces tragiques �v�nements de Paris montrent une fois de plus le g�nocide perp�tr� par le colonialisme fran�ais contre le peuple alg�rien. Le couvre-feu raciste a �t� bris� par nos militantes et militants pour la seconde fois � Paris. Cette ville rev�t aujourd�hui l�aspect d�une ville en �tat de guerre.� Il rappelle par ailleurs la position courageuse de policiers qui ont d�nonc� ces exactions. �Ce qui s�est pass� le 17 octobre 1961 et les jours suivants contre les manifestants pacifiques, sur lesquels aucune arme n�a �t� trouv�e, nous fait un devoir d�apporter notre t�moignage et d�alerter l�opinion publique. Nous ne pouvons taire plus longtemps notre r�probation devant les actes odieux qui risquent de devenir monnaie courante et rejaillir sur l�honneur du corps de la police tout entier�, �crivaient un groupe de policiers r�publicains. La lettre en question a �t� reprise par Einaudi dans son second livre La Bataille de Paris. �Dix jours apr�s le 17 octobre, les 28 et 29 octobre 1961, contacts secrets � BALE (Suisse) entre les repr�sentants du GPRA et le Gouvernement fran�ais, repr�sent�s respectivement par Messieurs : R�dha Malek et Mohamed Seddik Ben Yahia, Claude Chaillet et Bruno Deleusse�, rappelle Moh Clichy. Faisant une observation sur les sentiments li�s � ce qu�il a v�cu, il �crit : �De tout temps, les Alg�riens ont connu une succession de mises en �tat de r�sistance. Des rendez-vous que l�Histoire nous a fix�s. Par d�fi et par continuit�, nous avions su � chaque fois y r�pondre par une abn�gation r�solue et avions toujours essay� de nous hisser � la hauteur de notre destin.� Que reste dans notre pays martyris� de cet esprit et de l�h�ritage l�gu� par le FLN de 1954 ?
Abachi L.

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