Actualités : SORTIE INATTENDUE DU P-DG D’AIR ALGÉRIE
Bouabdallah critique le gouvernement


Le président-directeur général d’Air Algérie a déclaré, hier, que la compagnie aérienne n’a pu affréter d’avions pour assurer son programme estival. Abdelwahid Bouabdallah, qui était l’invité de l’émission matinale de la Radio Chaîne III, a mis cette situation sur le compte des dispositions de la loi de finances complémentaire de 2009. Il accuse des cadres de son entreprise d’avoir créé un climat de «suspicion» en adressant des lettres anonymes aux plus «hautes» autorités de l’Etat.
Tarek Hafid - Alger (Le Soir) - Dépit et colère. Ce sont les deux impressions qui ressortent de l’entretien qu’a accordé, hier, Abdelwahid Bouabdallah à Souhila El Hachemi, la journaliste de la Chaîne III. Un entretien qui a débuté par une question d’actualité, à savoir les perturbations au niveau des aéroports provoquées par la grève des aiguilleurs du ciel français. «La grève est un moyen de rétorsion et de chantage. On prend les passagers en otages, et là en France ça commence vraiment à bien faire. Des fois c’est les pilotes, puis les aiguilleurs, après les fonctionnaires au sol et cette fois-ci c’est les fonctionnaires du contrôle aérien. Les syndicats ont décidé d’enclencher une grève le 19 juillet jusqu’au jeudi matin. Sur les onze rotations prévues sur cette journée (hier) en direction de la plate-forme parisienne, six ont été annulées. Vraiment ça perturbe et je suis désolé pour nos passagers. Ils doivent savoir que nous ne les laisserons pas tomber. Nous connaissons la sensibilité de ces voyageurs qui payent très cher pour venir voir leurs familles. On s’adapte. Il y a une cellule de crise qui suit la situation de très près. Nous avons décidé de mettre deux équipages sur chaque avion afin d’être près à tout moment», indique-t-il. Mais pour expliquer le phénomène des retards, Abdelwahid Bouabdallah apporte d’autres éléments qui n’ont aucun lien avec les débrayages des personnels de l’autre côté de la Méditerranée. «Cette saison a été très pénible pour nos passagers et cela nous affecte considérablement. Je crois que cette année, nous avons dépassé les records en matière de retards, mais cela n’est pas dû à la volonté d’Air Algérie. La capacité additionnelle attendue à partir du 1er juin, cela concerne tout ce qui est affrètement, nous ne l’avons pas eue pour des raisons administratives qui échappent au contrôle d’Air Algérie. Les délais de réparation de pannes sont considérablement plus longs pour des raisons d’approvisionnement en pièces de rechange qui ont été rendues très compliquées à cause de la nouvelle procédure de la loi de finances complémentaire 2009». Le premier responsable de la compagnie nationale finit par lâcher : «C’est très compliqué de gérer une entreprise publique en ce moment car il y a de la suspicion partout.» Bouabdallah explique finalement que le programme d’affrètement d’avions pour les besoins de la saison estivale n’a pas été mené à terme. «L’affrètement, c’est comme la Bourse, dès que l’on a besoin d’un avion, nous allons sur le marché international. Mais si on n’arrive pas à avoir l’avion qu’il faut au moment qu’il faut… ça complique tout. Nous avons tout prévu quand il le fallait, malheureusement la procédure d’affrètement est très compliquée. Il faut une autorisation de l’aviation civile, ensuite l’affrètement a été remis en cause par des experts d’Air Algérie qui ont écrit très haut, je ne sais pas où. Les candidats affréteurs ne sont pas légion. Et nous avec cette histoire de règlement des changes, on ne peut pas faire de dépôt de garantie et on ne peut pas donner d’avances. Il faut un dossier technique, c’est une procédure très longue et dès qu’il y a suspicion, tout est tombé. On savait qu’on allait vers cette situation. Moi tout ce qui était en mon pouvoir je l’ai fait (…) Air Algérie affrète depuis sa création, et comme par hasard cette année, cette procédure a été remise en cause par des gens qui voulaient du mal à Air Algérie. Voilà où est le problème.» Donc, les raisons qui ont empêché l’affrètement sont doubles: les mesures en matière de réglementation des changes en plus des «experts d’Air Algérie» qui ont, selon toute vraisemblance, saisi les pouvoirs publics pour dénoncer les marchés en cours. Le P-dg d’Air Algérie tiendra des propos acerbes à l’adresse de ces cadres. «Il y a les écrivains spécialistes en lettres anonymes qui font tout pour détruire cette compagnie. Mais je ne les laisserai pas faire.» L’achat de pièces détachées est un autre problème rencontré par la compagnie aérienne. Sur ce point, les difficultés sont à mettre sur la procédure de crédit documentaire imposée par les pouvoirs publics depuis la promulgation de la loi de finances complémentaire 2009. Bouabdallah le dit ouvertement et, au passage, ne manque pas d’égratigner le gouvernement en parlant de «catastrophe». «Avant, on allait sur place et en une heure on achetait la pièce. Cette fois ci, il faut le crédit documentaire et un avis d’appel d’offres. C’est la catastrophe pour une compagnie aérienne (…) Il y a des protocoles en matière de maintenance : telle panne demande tant d’heures. Il suffit qu’il y ait un aléa sur la disponibilité d’une pièce détachée et le délai se voit dépassé. Donc l’information n’est pas toujours maîtrisée. Nous avons introduit des demandes au niveau du gouvernement pour essayer de parer à ces histoires de pièces détachées. » Selon Abdelawhid Bouabdallah, ces difficultés ont eu des répercussions négatives sur le plan financier. Le déficit est «énorme». «Je ne donnerai pas de détails, mais je peux dire que c’est énorme ! De toute façon, je ne pourrai pas vous donner les chiffres exacts car nous n’avons pas encore fait l’évaluation définitive. Sur le réseau France, certaines semaines, on a perdu beaucoup plus que l’on a gagné.»
T. H.

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