Chronique du jour : KIOSQUE ARABE
Obama, musulman dans la d�faite


Par Ahmed Halli
halliahmed@hotmail.com
Il est gonfl� l'�ditorialiste et propri�taire du quotidien londonien Al-Quds : au d�but, il s'est install� � Londres afin de pouvoir informer plus librement sur ce qui se passe au Proche-Orient. Abdelbari Atouane a donc choisi la capitale britannique pour y �diter son journal qui n'aurait pas, autrement, surv�cu plus de six mois en pays arabe.
Moyennant quelques accommodements, on peut mener de front un destin d'opposant et une carri�re de pol�miste confortable. Si, de surcro�t, on a quelques convictions id�ologiques qui ne s'enrhument pas au premier courant d'air, c'est un plus sans �tre un crit�re d'�ligibilit�. On sait ce qu'il est, et on pardonne � Abdelbari Atouane d'�tre arabe jusqu'� la moelle, au point de h�risser nos �pines dorsales. Pol�miste au regard ac�r�, en d�pit de crises de c�cit� cycliques, ce confr�re d'origine palestinienne confond souvent information et propagande, devoir de v�rit� et mensonge pieux. Apr�s le sanglant �pilogue de la prise d'otages de Bagdad, alors que les m�dias arabes s'interrogent sur l'avenir des chr�tiens au Proche-Orient, l'�ditorialiste d' Al-Quds regarde ailleurs. Il nous parle du triste destin des trente millions de musulmans d'Europe, consid�r�s comme des chefs-d'�uvre en p�ril. A le lire, une vague d'islamophobie traverse le monde occidental actuellement et menace de submerger les pauvres musulmans qui ont fui leurs pays d'origine. Enfilant les perles, Abdelbari Atouane d�plore p�lem�le l'interdiction des minarets en Suisse, les propos d'Angela Merkel et la d�faite �lectorale de Barack Obama. Le directeur du quotidien londonien, qui a assist� r�cemment � une conf�rence sur le dialogue interreligieux en Allemagne, est scandalis� par les propos d'un participant arabe qui a approuv� l'interdiction des minarets en Suisse. Celui-ci aurait d�clar� que �les minarets enlaidissaient le paysage architectural et qu'il ne voulait pas que Gen�ve devienne comme Le Caire avec ses minarets�(1). Cette �vocation fait bondir Abdelbari Atouane qui se lance avec lyrisme dans la d�fense des minarets, ces merveilles qui nous valent l'admiration du monde entier. �Comment peut-on oser critiquer les minarets du Caire, que des millions de visiteurs du monde entier viennent contempler ?�(2), s'indigne notre irascible confr�re. Et comme il nous a parl� d'Allemagne, c'est l'occasion pour lui de temp�ter contre les r�cents propos d'Angela Merkel. Le fait que la chanceli�re allemande revienne sur le mod�le communautariste allemand est un acte d'islamophobie, proclame-t-il, le dos tourn� � l'�v�nement. Or, ce que Mme Merkel demande, c'est que les musulmans turcs, vivant en Allemagne, cessent de jouer les chauves-souris et d�cident, une bonne fois pour toutes, s'ils sont allemands ou turcs. On a vu, en effet, lors du dernier match de football Allemagne-Turquie comment un joueur de l'�quipe allemande d'origine turque a �t� malmen� par un public chauvin, d�voy� par le communautarisme. Passant outre ces r�alit�s, Al-Qudsestime que l'islamophobie en Europe a franchi un seuil critique. �La minorit� musulmane pourrait m�me se voir d�sign�e comme le bouc �missaire de la crise, � l'instar du sort r�serv� jadis � la communaut� juive.� La comparaison s'arr�te l� puisque le naturel revient au galop et notre �ditorialiste de rappeler que toute critique contre les Juifs est assimil�e � de l'antis�mitisme alors qu'il n'existe aucune loi punissant les attaques contre l'Islam(3). Islamophobie encore s'agissant du r�cent revers �lectoral du pr�sident am�ricain Obama. Certes, reconna�t Abdelbari Atouane, les �lecteurs ont sanctionn� l'�chec de la politique �conomique de Barack Obama, mais ils ont vot� surtout contre l'Islam. �Les Am�ricains ont inflig� une d�faite �lectorale � Barack Obama, simplement parce que son p�re s'appelait Husse�n�, affirme-t-il sans h�sitation. Et il ajoute que le pr�sident am�ricain a �t� victime de la coalition entre le lobby juif et son alter ego chr�tien �vang�liste. �Ils se sont ligu�s pour l'affaiblir, � d�faut de le faire tomber, dit-il, parce qu'ils pensent qu'il est alli� aux musulmans et qu'il veut �tablir un �tat palestinien ind�pendant.� �All�luia !� devrait crier Obama in petto, �il y a encore des Arabes qui pensent que je suis de leur c�t�(4). C'est vrai que l'�chec �lectoral ouvre le champ � d'autres priorit�s, et que la question palestinienne va �tre mise � nouveau sous le boisseau, mais encenser Obama, pour suspicion d'arabophilie, c'est aller un peu vite en besogne. Or, s'il y a bien une constante dans la politique des pr�sidents am�ricains, c'est le soutien constant � Isra�l, soutien critique ou inconditionnel, mais soutien constant. Les pr�sidents am�ricains ne deviennent les amis des Arabes et subs�quemment de la cause palestinienne qu'une fois qu'ils ont quitt� la Maison Blanche. C'est aussi le cas de leurs proches collaborateurs qui entretiennent des relations d'affaires juteuses avec les riches pays du Proche-Orient. Mais lorsque tout ce beau monde est aux commandes de la navette U.S.A, ils ne regardent que vers Isra�l. M�me en ayant gagn� les �lections de mimandat, Obama aurait continu� � laisser faire les Isra�liens en Palestine, en vertu d'une clause non �crite de la constitution des Etats-Unis. Et l'islamophobie dans tout �a ? Quoiqu�exag�r�ment sur�valu�e, elle est r�elle, mais il faudrait peut-�tre en chercher les causes ailleurs qu'en Occident. Je me suis arr�t� la semaine derni�re sur un autre �ditorial, celui de la directrice d' Al-Fedjr, Hadda Hazem(5). Notre cons�ur s'est arr�t�e sur les confessions publiques d'un certain Bouzid Ighil, converti au christianisme puis revenu � la �vraie religion�. Selon ce reconverti, il aurait �t� �une victime de l'�cole alg�rienne qui ne lui aurait pas appris la vraie foi�. �C'est vrai que nos manuels d'�ducation islamique ont de quoi d�tourner l'�l�ve de cette religion qu'il per�oit comme une religion qui punit et qui impose, note Hadda Hazem. Comment un �l�ve pourrait-il �tre psychologiquement stable s'il apprend des le�ons sur la toilette mortuaire et sur les souffrances du tombeau ?� Toutefois, l'�ditorialiste s'attache � d�monter ce curieux argument en objectant que les Alg�riens n'avaient pas d'�coles o� apprendre l'Islam durant la p�riode coloniale. �Et pourtant, dit-elle, le colonialisme n'a pas r�ussi � extirper cette religion du c�ur des Alg�riens et � lui substituer la foi chr�tienne.� Pour ma part, je constate que l'Alg�rie s'est d�couvert un nouveau motif d'exulter : le retour � l'Islam des convertis au christianisme.
A. H.
(1) Ces minarets n'en ont plus pour longtemps puisque le n�tre arrive, qui ram�nera ceux du Caire, ainsi que celui de Rabat et d'ailleurs au ras du sol, n'en d�plaise aux jaloux.
(2) Argument tr�s sp�cieux, puisque le fait d'admirer les minarets du Caire ne signifie pas n�cessairement que le visiteur occidental a envie d'en construire de semblables dans son pays.
(3) On feint encore ici d'oublier que si les Juifs ont atteint un tel niveau d'influence, c'est par leur travail assidu et intelligent. Ils ne se sont jamais �gar�s dans des fausses querelles ou �rig� la kippa comme pilier de leur religion, comme les musulmans le font pour le voile.
(4) Comme il s'agit toujours de r�actions, cette opinion se fonde essentiellement sur le fait qu'une partie de la presse isra�lienne a salu� la d�faite de Barack Obama, pr�sent� comme un ami des Arabes.
(5) Certains trouveront sans doute que je la cite trop souvent dans mes chroniques, mais qu'il me soit permis d'objecter que son journal est, pour l'instant, l'un des rares qui m'inspire encore quelque espoir en l'avenir.

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