Culture : DANS L’OMBRE D’AL MANSOUR, MAÎTRE DE L’ANDALOUSIE, DE JOSIANE LAHLOU
L’histoire des Ommeyades de Cordoue revisitée


Après avoir publié plusieurs ouvrages sur l’histoire de l’Afrique du Nord antique, Josiane Lahlou s’intéresse cette fois-ci à l’Espagne musulmane. Son dernier livre, Dans l’ombre d’Al Mansour, maître de l’Andalousie, est lui aussi un roman historique.
Ce texte allie, en effet, les qualités littéraires du roman et la fidélité aux faits véridiques de l’ouvrage d’histoire. L’auteure revisite alors, et de fort belle manière, grâce à son talent de conteuse, une page particulière de l’histoire de l’Andalousie, celle précisément du califat de Cordoue avant sa chute. C’est l’histoire romancée de Mohamed Ibn Abi Amir qui, devenu vizir, allait gouverner de 978 à 1002 à la place du calife Hisham II. Josiane Lahlou retrace le parcours de ce personnage dévoré d’ambition, froid et sans scrupules, et qui allait régner en maître absolu sur l’Espagne musulmane de l’époque. L’ascension fulgurante du dictateur est jalonnée d’intrigues, de tueries, de trahisons… jusqu’à ce que se casse le fil des «marionnettes que le ciel fait jouer…» (Omar Khayyam, p. 77). «Dans la nuit du 10 au 11 août 1002 (27 Ramadan 392), celui qui avait tenu entre ses mains le destin de l’Andalousie pendant si longtemps cessa de souffrir» (p.73). Celui que les chrétiens ont surnommé Al Mansour (le victorieux) est mort et, après lui, s’ensuit la période de la fitna(la discorde). «Des hommes arrivent, d’autres s’en vont» (Omar Khayyam, titre du chapitre 22), puis «La plaine devint comme une mer de sang» (Firdûsi, titre du chapitre 23)… Tout au long du récit, Josiane Lahlou entraîne le lecteur au cœur d’une action qui ira crescendo jusqu’à l’acte final : la ville de Cordoue en flammes. Fin de la tragédie (et du puzzle dont l’auteure a réussi à mettre bout à bout les pièces) et, naturellement, «le jour vient après la nuit» (p. 107). L’histoire d’Al Mansour nous fait remonter le temps et voyager au cœur d’une époque pleine d’ombre et de lumière, de beauté, de splendeur, de tolérance, de somptueux palais, mais aussi de déchirements, de sang, de haine, d’aveuglement, d’intrigues de palais, de guerres… Le récit, qui fourmille de détails, de précisions historiques, de digressions et d’anecdotes révèle au lecteur tout un pan d’une histoire souvent méconnue. Pour mêler les faits historiques à la fiction, Josiane Lahlou a inventé plusieurs personnages représentant la voix du peuple, celle de la bourgeoisie arabe ou des guerriers berbères, ou encore la voix de «la plus belle des roses de Cordoue» (p. 81). Le tout est englobé dans 24 chapitres, très courts, pour mieux aérer le récit et rendre la lecture fort agréable, un peu comme si l’on savourait les 24 noubas de la musique andalouse. Josiane Lahlou est une écrivaine française née en 1936. Docteur en littérature française et comparée, elle est la veuve de Mohamed Lahlou, un Marocain, assassiné en 1992 (elle avait confié qu’elle avait écrit ce dernier livre en hommage à son défunt époux, un descendant des Andalous chassés d’Espagne). Pour rappel, la période 1009-1031 (celle de la fitna) a entraîné la suppression du califat de Cordoue. Cette ville au cœur de l’Andalousie était la capitale des Ommeyades. Dépossédés du califat en Asie (Damas), ils allèrent régner à Cordoue dont ils occupèrent le trône de 756 à 1031.
Hosine T.
Dans l’ombre d’Al Mansour, maître de l’Andalouie, de Josiane Lahlou, éditiions Dalimen, 2010, 112 p.

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