Corruptions : BAROMÈTRE MONDIAL DE LA CORRUPTION 2010
Les citoyens voient la corruption empirer, mais sont prêts à s’engager


A l’occasion du 9 décembre, Journée mondiale des Nations unies contre la corruption (Voir le Soir d'Algérie du 6 décembre 2010), l'ONG Transparency International, publie son Baromètre mondial de la corruption 2010, une enquête d’opinion mondiale menée auprès de plus de 91 000 personnes dans 86 pays. Dans cette édition 2010, six personnes sur dix considèrent que la corruption a augmenté au cours des trois dernières années. Une personne sur quatre déclare par ailleurs avoir payé des pots-de-vin au cours de l’année écoulée. L'Algérie ne figure pas dans la liste de ces pays, le gouvernement ayant toujours refusé ce type d'enquête. Le Baromètre mondial de la corruption se concentre sur la petite corruption, sur la perception de la corruption au sein des institutions publiques ainsi que sur les personnes et organisations qui ont la confiance des citoyens pour combattre la corruption.
Principaux résultats. Au cours des douze derniers mois, une personne sur quatre a payé un pot-de-vin à l’un des neuf services ou institutions répertoriés dans l’enquête, qui vont du domaine de la santé à l’éducation en passant par la justice et l’administration fiscale. La police est la plus fréquemment citée comme bénéficiaire de bakchichs : 29% des personnes interrogées ayant eu des contacts avec la police indiquent avoir dû payer un pot-de-vin. Peu de personnes ont confiance en leurs gouvernements ou leurs politiciens. Huit personnes sur dix considèrent que les partis politiques sont corrompus ou extrêmement corrompus. L’administration publique et le Parlement sont ensuite les institutions considérées comme les plus corrompues. Malgré ces résultats inquiétants, l’enquête montre, dans le même temps, que sept personnes sur dix se disent prêtes à dénoncer un cas de corruption. C’est en Europe et en Amérique du Nord que les opinions relatives aux tendances en matière de corruption sont les plus négatives, où 73% et 67% respectivement de la population pensent que la corruption a augmenté au cours des trois dernières années. Les habitants de l’Afrique subsaharienne sont les plus nombreux à rapporter avoir payé des pots-de-vin : plus d’une personne sur deux aux cours des douze derniers mois, contre 36% des personnes interrogées au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, 32% dans les pays de l’ancien bloc URSS, 23% en Amérique Latine, 19% dans les Balkans occidentaux et en Turquie, 11% en Asie-Pacifique et seulement 5% dans les pays de l’Union européenne et d’Amérique du Nord. Plus de 20 pays rapportent une augmentation significative de la petite corruption par rapport à 2006, lorsque la même question était posée dans le Baromètre. Les plus grands nombres de paiements de bakchichs rapportés en 2010 concernent l’Afghanistan, le Cambodge, le Cameroun, l’Inde, l’Irak, le Liberia, le Nigeria, la Palestine, le Sénégal, le Sierra Leone et l’Ouganda, où plus de 50% des personnes interrogées ont indiqué avoir payé un pot-de-vin au cours des douze derniers mois.
Les bakchichs payés aux services de police ont quasiment doublé ces dernières années

Près de la moitié des répondants ont indiqué avoir payé des pots-de-vin pour éviter d’avoir des problèmes avec les autorités, un quart pour accélérer des procédures en cours. La police est l’institution la plus souvent citée comme recevant des pots-de-vin. Plus inquiétant encore, les bakchichs payés aux services de police ont quasiment doublé depuis 2006, et davantage de personnes rapportent avoir payé des dessous-de-table au secteur judiciaire et aux services de l’état civil et des permis qu’il y a 5 ans. Le Baromètre 2010 montre que les personnes interrogées en Asie-Pacifique et en Amérique latine rapportent avoir payé plus de pots-de-vin lors de contacts avec la justice. Les habitants de l’Afrique subsaharienne rapportent le plus haut niveau de bakchich pour les services de l’état civil et des permis, quasiment à égalité avec la police. Le public des pays de l’UE+ indique que les douanes constituent le service demandant le plus de dessous- de-table, tandis qu’en Amérique du Nord ce sont les services fonciers, bien que dans ces deux régions les taux de petite corruption rapportés restent généralement bas. La démographie de la corruption continue de désavantager les pauvres et les jeunes. De la même manière que dans les études précédentes, les petits revenus rapportent davantage de paiements de pots-de-vin que les revenus plus élevés. Les personnes pauvres sont deux fois plus susceptibles de payer des bakchichs pour des services élémentaires tels que l’éducation, les soins médicaux ou les approvisionnements en eau et en énergie, que les personnes plus aisées. Un tiers des personnes de moins de 30 ans interrogées ont indiqué avoir payé un pot-de-vin au cours des douze derniers mois, contre moins d’un cinquième chez les plus de 51 ans.
Manque de confiance dans les institutions publiques
Malheureusement, peu de personnes ont confiance en leurs gouvernements ou leurs politiciens. Huit personnes sur dix considèrent que les partis politiques sont corrompus ou extrêmement corrompus. Ensuite, c’est l’administration publique et le Parlement qui sont considérés comme les institutions les plus corrompues. La moitié des personnes interrogées déclarent que les actions de leur gouvernement pour lutter contre la corruption sont inefficaces. Ce chiffre a peu fluctué avec le temps. Cependant, on observe une légère dégradation depuis 2007 en Asie-Pacifique, en Amérique latine et en Afrique subsaharienne et une légère amélioration dans les pays de l’ancien bloc URSS et en Amérique du Nord. Par ailleurs, bien qu’une large majorité des personnes interrogées (sept sur dix) déclarent qu’elles dénonceraient un acte de corruption si elles en voyaient un, ce chiffre diminue de moitié pour les victimes de corruption.
Les efforts des gouvernements pour lutter contre la corruption restent inefficaces
Le Baromètre 2010 a demandé aux sondés du public général comment ils évaluaient les efforts de leurs gouvernements pour combattre la corruption dans leur pays. La moitié des personnes interrogées considère que les efforts gouvernementaux de lutte contre la corruption sont inefficaces. L’évaluation globale du public concernant les efforts de leurs gouvernements n’a pas beaucoup changé avec le temps. Pour la première fois, le Baromètre 2010 a demandé au grand public à qui il faisait confiance de mettre fin à la corruption dans leur pays. Les résultats indiquent que, dans la mesure où aucune institution ne remporte totalement leur confiance, l’acteur le plus fiable est constitué par les médias. Presque autant de personnes ont confiance en leur gouvernement pour combattre la corruption. Cependant, un bon quart des personnes interrogées indiquent qu’elles ne font confiance à aucune institution dans ce domaine. Près d’un sondé sur dix aurait respectivement davantage confiance dans le secteur privé, les organisations non gouvernementales (ONG) et les associations, ou dans les institutions internationales.
Les perceptions du public et celles des experts sont concordantes
Le Baromètre 2010 nous permet d’étudier la correspondance entre les opinions du public et des experts en matière de corruption. L’Indice de perception de la corruption (IPC) de Transparency International mesure le degré de corruption, tel qu’il est perçu par les personnes interrogées, du secteur public dans de nombreux pays du monde. Son édition la plus récente, l’IPC 2010, évalue 178 pays à travers le monde sur une échelle allant de 10 (extrêmement intègre) à 0 (extrêmement corrompu). Contrairement au Baromètre mondial de la corruption, qui reflète l’opinion publique, l’IPC reflète les avis d’experts et d’hommes d’affaires. Comme le montrent leurs comparaisons, les perceptions du public traduites dans le Baromètre 2010 et les perceptions des experts dans l’IPC de 2010 sont concordantes. Cela signifie qu’en moyenne, dans les pays où les hommes d’affaires, les analystes et les experts estiment que la corruption est très répandue, le public perçoit la corruption comme l’étant également. «Le message à tirer du Baromètre 2010 est que la corruption est insidieuse. Elle fait perdre toute confiance. La bonne nouvelle, c’est que les gens sont prêts à agir», déclare Huguette Labelle, présidente de Transparency International. «Une meilleure protection des personnes dénonçant des actes de corruption et un plus grand accès à l’information sont essentiels. L’implication du public dans la lutte contre la corruption forcera ceux qui détiennent le pouvoir à agir, et donnera aux personnes plus de courage pour parler et lutter pour un monde plus propre et plus transparent», ajoute-t-elle.
Créer un large soutien public pour lutter contre la corruption
Le Baromètre mondial de la corruption est un outil unique qui fournit une fenêtre utile sur les opinions et expériences des personnes en matière de corruption à travers le monde. En étudiant la corruption auprès du grand public, il crée une meilleure base de connaissances sur la manière dont la corruption imprègne la société et la mesure dans laquelle il existe un soutien au sein de la société pour des efforts renforcés contre la corruption. Le Baromètre fournit un aperçu des secteurs considérés par le public comme étant les plus affectés par la corruption, ainsi qu’une évaluation ascendante de la manière dont les dirigeants du monde se comportent dans le cadre de la lutte contre la corruption. La plupart des personnes interrogées afin de réaliser le Baromètre 2010 ont perçu une augmentation des niveaux de corruption dans leur pays au cours des trois dernières années. Cela envoie un message clair aux dirigeants à travers le monde : le public est convaincu que la corruption continue à empoisonner les sociétés, partout. La quête envers des mécanismes de transparence et d’intégrité doit être intensifiée. Au vu des conclusions du Baromètre 2010, le choix de tous ceux qui veulent mettre fin à la corruption est clair : impliquer les gens, leur donner le pouvoir et opter pour des solutions qui fonctionnent pour les gens partout, en se basant sur les cadres institutionnels qui peuvent et doivent soutenir cette cause vitale. Enfin, la lutte contre la corruption sous toutes ses formes sera renforcée par des solutions qui créent un large soutien public.
Synthèse faite par Djilali Hadjaj

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