Actualités : MARCHE AUJOURD’HUI À ALGER
La détermination face à la matraque


De bleu Alger s’est parée hier. Un bleu de tunique, en prévision de la marche nationale pacifique aujourd’hui à laquelle a appelé la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD). Les forces anti-émeutes ont été déployées en différents endroits de la capitale, notamment aux alentours de la place du 1er-Mai d’où la marche doit s’ébranler.
Il semble que le nombre de policiers mobilisés pour empêcher la marche de la CNCD est plus important que lors de la marche du RCD le 22 janvier dernier. On parle de 20 000 policiers mobilisés. C’est dire que le pouvoir reste foncièrement engagé sur sa logique répressive. Une logique dont il ne veut pas se départir. Cette attitude il se l’est forgée au fil de ces 20 dernières années, à l’ombre de l’état d’urgence. Un Etat d’urgence qu’il a maintenu même si les évolutions sécuritaires le rendaient anachronique. Mieux encore, son maintien n’était plus justifié à partir du moment où le discours officiel évoquait avec insistance une paix recouvrée grâce à la politique de réconciliation nationale. La levée de l’état d’urgence étant devenue une revendication partagée par une majorité de partis et d’acteurs politiques, le pouvoir dut, sans faire preuve d’audace exagérée, annoncer sa levée prochaine. La Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD), qui réclame, entre autres, la levée de l’état d’urgence et a décidé d’organiser, pour ce faire, une marche nationale pacifique à Alger, voit en l’annonce du Conseil des ministres du jeudi 3 février une manœuvre visant à absorber le vent de la contestation qui sourd de partout. Aussi at- elle résolu d’aller au bout de son engagement, c’est-à-dire à maintenir sa marche, faisant, du coup, fi de l’interdiction que lui a opposée la Wilaya d’Alger. La Coordination a fait savoir mardi dernier que rien ne saurait la détourner de son engagement et entamer sa détermination à se réapproprier la rue comme espace d’expression politique et citoyenne. C’est forts de cette détermination que les membres de la Coordination ont rejeté la proposition de la Wilaya d’Alger qui, extrêmement généreuse, s’est déclarée prête à ouvrir la Coupole Mohamed-Boudiaf pour un méga-rassemblement, pour peu que la Coordination accepte l’alternative. Raté pour le pouvoir qui a pensé ainsi s’éviter le spectacle d’une ville ouverte à la contestation populaire. S’il reconnaît la légitimité des revendications exprimées, le pouvoir reste allergique à leur expression dans une marche. Notamment à Alger où les marches sont interdites depuis le 18 juin 2001. Pas toutes, puisque celles ayant pour objet de soutenir la politique gouvernementale sont tolérées. D’aucuns se rappellent les foules sorties «spontanément» dans les rues d’Alger pour accueillir le chef de l’Etat à son retour au pays après une hospitalisation à l’hôpital de Val-de- Grâce à Paris. Ce jour-là, les autorités n’ont pas réagi pour interdire l’investissement de la rue par la foule. Idem lorsque les Fennecs étaient revenus triomphants de leur équipée soudanaise. Les autorités, si promptes à exhiber le risque sécuritaire, étaient convaincues, en ces circonstances-là, du risque zéro. Comme quoi, il n’y a risque de dérapages sécuritaires uniquement quand les gens sortent pour crier leur mal-vie, scander leur soif de liberté.
Sofiane Aït-Iflis

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