Actualités : MOUBARAK SORT SON PLAN B, LE CHANTAGE
Le Caire, le temps des gangsters


De notre bureau de Bruxelles, Aziouz Mokhtari
Des dictateurs classiques – Franco, Ceausescu, Milosevic, Saddam Hussein – étaient des hommes politiques qui ont utilisé des méthodes de bandits. Hosni Moubarak n’est pas dans cette catégorie. C’est un bandit qui utilise la politique. Bruxelles sait qu’il fera beaucoup de mal, encore. La gifle reçue par le vice-président Omar Souleymane n’est que le prélude à un chantage grandiose que s’apprête à exécuter le Raïs.
Lorsque le pauvre Omar Souleymane suggère au Raïs de démissionner, la gifle qu’il reçoit de la main froide et cruelle du pharaon est cinglante, violente. Moubarak est un professionnel de la dictature. Il est d’autant plus dangereux qu’il a amassé une fortune — quatre-vingt milliards de dollars —, véritable trésor de guerre. Le pharaon moderne fera encore du mal, beaucoup de mal à l’Egypte. Moubarak est dangereux. C’est un dictateur, un vrai, un professionnel. Il exerce son métier avec un rare sens du cynisme, un art accompli de la provocation, de la démesure. Le pharaon des temps modernes a fait beaucoup de mal et il en fera, encore, c’est certain. Omar Souleymane, tout-puissant patron du renseignement qu’il est, fraîchement installé comme premier vice-président, a eu à le constater à ses dépens. C’est une gifle cinglante, violente, surgie d’une main ferme et solide qu’il reçoit lorsqu’il murmura le mot démission. Hosni Moubarak, rusé, cynique, demande à Souleymane de continuer son idée, de dévoiler son plan. Dès son récit terminé, le premier vice-président est convié à lire, ne serait-ce que furtivement, un résumé de rapports établis par les hommes de Hosni. C’est la liste des personnalités dans l’armée impliquées dans des affaires géantes de corruption. L’équipe des enquêteurs de Moubarak ne rigole pas à ce niveau. Toutes ces conclusions ont été vérifiées et validées par les différents services de renseignement et de police israéliens. Tel-Aviv, tout le monde le sait maintenant, tient à Moubarak comme à la prunelle de ses yeux. Depuis une semaine, Israël est soutenu dans ses choix par deux alliés de taille. L’Arabie saoudite et la Libye. Le soutien des Saoudiens à Moubarak est réel, déterminé. Riyad et prêt à mettre sur la table et cash l’équivalent de «l’aide» américaine au Caire. Pourvu que la dynastie résiste, se cramponne, ne lâche pas prise. Les Saoudiens craignent l’effet domino parce qu’ils savent, de raison et d’instinct, que si l’Egypte dans sa configuration actuelle tombe, le tour des autres, tous les autres, viendra. C’est donc plus par précaution que par amour de Moubarak que le roi d’Arabie, actuellement au Maroc, milite pour le maintien du dictateur du Nil. Moubarak est dangereux parce qu’il est à la tête d’un véritable trésor de guerre, d’une fortune à la Crésus. Les Moubarak sont riches, immensément riches, anormalement riches. Quatre-vingt milliards de dollars, quatre-vingt milliards de dollars, oui, oui ! Déposés en Suisse, au Luxembourg, à Tel-Aviv, Marrakach et dans d’autres paradis fiscaux. La chancelière allemande, Angela Merkel, a tout de suite compris que recevoir Moubarak plus que de raison nuirait à l’Allemagne, à la réputation de l’Allemagne, au sérieux de l’Allemagne. A Hillary Clinton qui la pressait d’accorder le gîte — le couvert, Moubarak s’en passe, bien avec 80 milliards de dollars ! —, la chef de l’exécutif de Berlin a fermement conclu : «Non, non et non ! Mon peuple ne comprendrait pas que je ne traduise pas en justice un homme qui a détourné une somme pareille !» Et à l’héritière de la grandeur prussienne d’ajouter : «N’importe quel juge de province, une association, une ONG des droits de l’homme obtiendra le procès de Moubarak ou son extradition vers son pays... l’Allemagne ne livrera pas cette bataille.» Hillary Clinton se le tint pour dit. Il ne lui restait à elle, à Benyamine Netanyahu, au roi d’Arabie qu’à gagner du temps. Encore quelques semaines, encore quelques jours, encore quelques heures pour que la relex d’Obama, farouche partisane, par ailleurs, du changement en Egypte, trouve une solution. L’équation pour Mme Clinton est simple : comment déboulonner Moubarak sans irriter Israël et le puissant lobby sioniste newyorkais. Clinton est une élue de New York, tout de même. Le chantage, la gifle reçue par Souleymane et les dossiers de corruption, de ses adversaires, tenus par Moubarak vont, sans doute, précipiter les événements.
A. M.

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