LE SOIR NUMÉRIQUE & SAT : LA DERNIERE
L'ŒIL EN COIN
Important, le bon client…


Par Mourad Nini
Généralistes ou d’information, les télés du monde entier n’ont pas manqué de commenter, de décortiquer, d’analyser les soubresauts sociopolitiques qui ont émaillé, depuis maintenant plus de trois mois, l’actualité interne des républiques de pieds nickelés ou des monarchies à roitelets que l’on connaît… Outre les JT, ce sont les plateaux à débat qui brassaient large afin d’avoir le meilleur expert, le meilleur analyste, le meilleur journaliste, bref, le meilleur client susceptible d’éclairer le plus. Occidentales ou orientales, les chaînes ont généralement le même carnet d’adresses et s’il est un nom qui revenait souvent — et qui a disparu, depuis quelques semaines – c’est bien l’Antoine Sfeir des «Cahiers de l’Orient».
Invité à réagir au soulèvement de la population tunisienne, fin décembre, il s’était contenté (chez Yves Calvy. Fr5) de minimiser l’ampleur des événements, lui le «spécialiste du monde arabo-musulman». Quelques semaines plus tard et juste après que Ben Ali eut fui la Tunisie, le même Sfeir change de fusil d’épaule et fustige, là où il passe, la corruption et le racket du régime Ben Ali. Faut préciser que le sieur Antoine Sfeir est l’auteur d’un bouquin, juin 2006, intitulé Tunisie, terre de paradoxes où la lèche est le fil conducteur. «Ben Ali a fait émerger un pays nouveau, bâti sur cette vieille tradition d’ouverture et de progrès (…) peu dotée par la nature de ressources minières, la Tunisie avance quand même, parce que son président a parié sur les capacités et la volonté des Tunisiens et non sur une hausse des cours du pétrole» peut-on lire dans ce fagotage de première classe. Sur sa lancée, le spécialiste du monde arabo-musulman et directeur des «Cahiers de l’Orient» consacrera un numéro spécial à «l’exception tunisienne», fin 2010. Même cirage de pompes et celui qui incarne «la réunion des compétences en un seul homme» (Ben Ali, pardi !) passe commande de quelques milliers d’exemplaires de ce numéro exceptionnel… Attentionné, le Ben Ali qui se fait désinguer par le même Sfeir (tiens, on devrait écrire Sfer, sifr ou zéro !) dès qu’il atterrit en Arabie saoudite. Toute honte bue, le spécialiste du monde arabo-musulman interviendra par la suite pour nous parler de l’Egypte, de Moubarak, des Frères musulmans, etc. etc. Mais sa crédibilité avait pris un bon coup dans l’aile et les chaînes ont dû le remarquer car c’est vraiment rare qu’on puisse le voir comme à l’accoutumée. «Bon débarras», aurait dit Kadhafi, le colonel ou plutôt le caporal épinglé... Sur un autre registre, sur une autre paire de manches, le «bon débarras » ne saurait convenir à un autre bon client des plateaux-télé : Jean Ferrat. Il disparaissait pour de vrai l’an dernier et la vague d’émotions suscitée court toujours… Chanteur discret mais revendiquant ses convictions, il était en dehors des modes. D’ailleurs, ce n’est pas Jean Ferrat qui frappait à la porte des studios et Michel Drucker («Vivement dimanche») aura eu le nez fin en rediffusant le numéro enregistré en 2003 !… Véritable cours de rattrapage, ce numéro qui nous fit partager le plaisir de vie, le plaisir de dire qu’avait Ferrat. Ayant renoncé à ses études, il n’est qu’aide-chimiste, quand en 1954, il rejoint un groupe de jazz où il compose sa première chanson Les yeux d’Elsa sur un poème de Louis Aragon. Par la suite et en pleine vague yé-yé (Antoine, Johnny, Sylvie Vartan, etc.) sa chanson Nuit et brouillard (sur la déportation des Juifs à Auschwitz) devient la référence de la chanson française. Communiste de cour, il part en 1967 faire une tournée en Amérique du Sud et est reçu par le nec plus ultra des «Rouges», Fidel Castro. Il en revient avec… une moustache, et un disque engagé. Paradoxalement, il est persona non grata à la télé. Une télé qu’il gratifie d’un très pertinent «le LSD des bourgeois ». Cela ne l’empêche pas de triompher avec son album Ferrat chante Aragon et de rassembler en octobre 1972, 100 000 spectateurs pour ses adieux au Palais des Sports. Un record qu'il savourera durant près de trois ans de silence, reclus dans son Ardèche adorée et entouré de sa fidèle épouse et de ses précieux amis. En 1975, rebelote avec l’album La femme est l’avenir de l’homme qui en fait l’invité spécial de Jacques Chancel et «le Grand échiquier». Toujours discret, il quitte alors la scène, la télé et les disquaires. Pourtant quand chez Michel Drucker (tiens, tiens…), il vient présenter Ferrat 80, c’est encore le succès extraordinaire et les 14 millions de téléspectateurs enregistrés par la médiamétrie de l’époque se passent de commentaires. Plus le chanteur se fait rare, plus il est adulé, n’en déplaise à une télé qui l’agace et qu’il fustige à l’occasion… Lors d’un passage chez Bernard Pivot (qui était allé le voir dans sa maison ardéchoise), il n’est pas tendre pour «Le jeu de la vérité» de Patrick Sébastien sur TF1. «Quelle vulgarité, quelle médiocrité », disait-il. Cela ne l’empêchera pas de franchir les portes de TF1 pour «Stars 90» de … Michel Drucker, le seul à qui il concédera d’autres rares rendez-vous. Et le rendez-vous de «Vivement dimanche» version 2003, remis au goût du jour pour un hommage mérité pour celui qui est parti un 13 mars 2010 à 79 ans des suites d’un ignoble cancer, n’a pas été vain. Il résonne encore avec ses Que serai-je sans toi ?, C’est beau la vie, Aimer à perdre la raison, L’amour est cerise, Le chef de gare est amoureux, Je ne suis qu’un cri, Complainte de Pablo Neruda, etc. etc. A toutes ses poésies chantées, à toutes ses sonorités orchestrées, on ne peut dire bon débarras… Bien au contraire et rien qu’en regardant une photo, une image de ce Jean Ferrat disparu, on a envie de crier «reviens, l’artiste !» Mais bon, la vie est ainsi faite, de bons et de mauvais clients…
M. N.

SÉLECTION TV HEBDOMADAIRE
Paris
Un film dur, souvent drôle, mais mordant
>France 2
– Dimanche 20 mars, 20h35 Comédie dramatique de Cédric Klapisch
Avec : Juliette Binoche (Elise), Romain Duris (Pierre), Fabrice Luchini (Roland Verneuil), Albert Dupontel (Jean), François Cluzet (Philippe Verneuil), Karin Viard (la boulangère), Gilles Lellouche (Franky), Mélanie Laurent (Laetitia).
Un Parisien atteint d'une grave maladie médite sur sa fin et s'émerveille des destins contrastés des gens qu'il croise au quotidien, parfois sans les voir. Pierre, un jeune Parisien, est malade et se demande s'il est condamné. Tandis qu'il sombre dans la mélancolie, malgré le soutien de sa sœur Elise, son état lui donne un regard neuf et différent sur les personnes qu'il croise au quotidien. Peu à peu, le fait d'envisager sa propre fin met en valeur sa vie, la vie des autres et celle de la ville de Paris tout entière. Des maraîchers, une boulangère revêche, une assistante sociale, un danseur, un architecte, un SDF, un prof de fac amoureux, un mannequin et un clandestin camerounais croisent leur destin et le mêlent à celui de Pierre... Inégal, sans doute, mais quelques beaux moments de ce cinéma populaire que Klapisch sait faire. Après le très grand succès de l'Auberge espagnole et des Poupées russes, on attendait du Paris, de Cédric Klapisch, une ode joyeuse à la gloire d'une capitale trop souvent chantée par les cinéastes confiseurs. On découvrit un film dur, souvent drôle, mais mordant, et n'évitant jamais de cerner les malaises. Canal+ consacre à Klapisch une programmation décalée, où ne figurent pas les œuvres qui ont fait sa réputation, mais des films plus secrets comme Ni pour ni contre (bien au contraire), Peut-être», etc., dans lesquels on perçoit une vision désenchantée, mais néanmoins tendre, une ouverture aux problèmes contemporains qui font du réalisateur un véritable auteur de films, parmi les plus pointus de notre époque. Le problème de Klapisch, c'est évidemment que son charme empêche de voir sa profondeur. Il fallut Truffaut pour révéler la force intérieure des films de Hitchcock. Or, Klapisch vient de trouver son Truffaut en la personne de Stéphane Charbit, dont le documentaire les Paris de Klapisch, présenté lui aussi sur Canal+, fouille l'âme d'un réalisateur qui avait toujours fui, jusque-là, les confessions intimes. Revenant sur une œuvre faussement aimable, Charbit établit les vrais thèmes de Klapisch, sa manière de soigner les blessures, de recoller, autant que faire se peut, les bleus de la vie en commun. Ou, pire, de la commune rupture que constituent les divorces. Vu à cette aune, Paris, comme la ville, est un écrin trompeur.

L'Effaceur
> France 3, ce soir, 20h35 Film d'action de Chuck Russell
Avec : Arnold Schwarzenegger (John «l'Effaceur» Kruger), James Caan (Robert Deguerin), Vanessa Williams (Lee Cullen), James Coburn (Beller), Robert Pastorelli (Johnny C).
Un policier téméraire, spécialisé dans la protection rapprochée des témoins importants, déclare la guerre à un important réseau de trafiquants d'armes. John Kruger, alias «l'Effaceur», du service de protection des témoins, ne s'en laisse pas aisément conter. Il surprend une bande de voyous au moment où elle s'apprêtait à mettre la dernière main à une agression en coupant la langue de l'une de ses victimes. Les malfrats passent de vie à trépas sans avoir le temps d'y penser. «L'Effaceur» remplace les témoins, dorénavant menacés, par des cadavres préparés à l'avance. Kruger met ensuite ses talents au service de Lee Cullen, une jeune femme, cadre dans une importante société d'armement, qui vient de découvrir que son entreprise était compromise dans un trafic d'armes avec la mafia russe. Lee parvient à copier les preuves de ce trafic sur deux disquettes. Le soir même, elle est attaquée à son domicile par un commando surarmé. Fort heureusement, «l'Effaceur» est là... Schwarzie en super justicier, sauveur, effaceur des méchants? Ben oui, c'est comme d'habitude. Et en plutôt moins bien, alors...

Le jaguar, chasseur solitaire
> Arte
jeudi, 17 mars 2011 à 19h55 Prises de vue rares d'un grand félin particulièrement sauvage et solitaire.
Le Pantanal, un gigantesque marais réparti entre le Brésil, la Bolivie et le Paraguay, est le biotope idéal pour le jaguar. Plusieurs années sur place ont permis au réalisateur de nous offrir des images inédites sur les habitudes de ce chasseur nocturne capable de s'attaquer, par exemple, à un caïman au moins aussi féroce que lui.

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