Société : SANTÉ MENTALE
Stress et harcèlement au travail : des risques professionnels émergents


L’établissement hospitalier spécialisé en psychiatrie d’Oued Aïssi a abrité, jeudi dernier, le onzième Congrès international de psychiatrie consacré au thème de la psychopathologie du travail.
Cette rencontre dédiée à la formation continue «s’inscrit dans la stratégie de promotion de la santé mentale et l’amélioration de l’environnement professionnel », dira le Pr Ziri, directeur général du CHU Nédir Mohamed de Tizi-Ouzou, intervenant en ouverture de cette rencontre, qui a regroupé des psychiatres issus de certains établissements hospitaliers spécialisés du pays et de France et qui ont abordé, sous des approches différentes, les notions de stress et de harcèlement moral et sexuel en milieu professionnel.
Quand le travail se conjugue au mal-être et à la souffrance
Soumise au diktat de l’efficacité et du rendement, l’entreprise devient un milieu chargé de risques pour la santé physique et mentale de l’individu. Le lieu de travail peut devenir ainsi source de souffrance et de mal-être pour le salarié, surtout quand celui-ci est immergé dans un contexte professionnel qui ne fait pas de la gestion de la ressource humaine et des relations interpersonnelles un impératif managérial. Les différentes sortes de violence dont le harcèlement moral, et sa variante sexuelle, la pénibilité qui engendre le stress sont ainsi identifiés par les spécialistes comme des dangers professionnels potentiels émergeants en plus d’autres menaces biologiques. Des contraintes qui exposent le sujet à toutes sortes de vulnérabilité sur le plan psychosocial. «La notion de risques psychosociaux prend en compte toutes les situations de mal-être et de souffrance au travail, dont le stress n’est pas la seule forme possible (épuisement professionnel, violence physique et verbale, harcèlement moral et sa variante sexuelle, conduite addictive et risque suicidaire)», dira le directeur général du CHU de Tizi-Ouzou. Le stress professionnel défini dans la littérature (médicale) comme un déséquilibre entre la perception qu’a l’individu des contraintes imposées par son environnement et la réalité de ses propres ressources pour y faire face «doit devenir une préoccupation pour l’entreprise, dès lors que les plaintes de mal-être au travail se multiplient et que les facteurs qui en sont à l’origine sont liés au travail», ajouterat- il, tout en suggérant que le management d’une entreprise prenne en compte la dimension de prévention contre tous les risques sur la santé physique et mentale du salarié, liés au climat psychosocial de l’entreprise et dont la détérioration peut conduire à des dérives dangereuses pour le salarié et compromettantes pour sa santé et pour son avenir professionnel.
Harcèlement moral, le silence de la loi*
Abordant le harcèlement sous l’aspect médicolégal, le Dr K. Chenaoui de l’EHS Drid Hocine d’Alger rapporte, se fondant sur des chiffres publiés par un quotidien national, que les inspections du travail ont enregistré 3,5 millions de cas de harcèlement moral dans le milieu professionnel en 2008, en Algérie. Le centre d’écoute et d’aide (CEA) a enregistré, en 2004, 384 cas de harcèlement sexuel ; la tranche d’âge des victimes se situe entre 21 ans et 55 ans, témoignera encore le même conférencier qui insistera, dans son exposé, sur les implications aux plans psychique, professionnel et social de ce genre de contrainte sur un salarié. «Le harcèlement peut provoquer dans un premier temps, des symptômes de stress. Quand cette situation perdure sans aucun soutien, ces symptômes peuvent se transformer, au bout de quelques mois, en troubles psychiques manifestes», dira le Dr Chenaoui. Les répercussions peuvent être dévastatrices, selon lui, pour la vie professionnelle, sociale et familiale des victimes, lesquelles ne peuvent prétendre à aucun recours judiciaire contre les abus liés aux relations dans le cadre professionnel. «L’article 341 bis du code pénal ne s’applique que pour les victimes de harcèlement sexuel», fera observer l’orateur. «La législation algérienne reste muette et ne prévoit rien sur la notion de harcèlement moral», se désolera-t-il.
S. A. M.

*Article 341 bis du code pénal relatif au harcèlement sexuel : «Est réputée avoir commis l’infraction de harcèlement sexuel et sera punie d’un emprisonnement de deux mois à un an et d’une amende de 100 000 DA (cent mille dinars) toute personne qui abuse de l’autorité que lui confère sa fonction ou sa profession, en donnant des ordres, en proférant des menaces, en imposant des contraintes ou en exerçant des pressions dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle. En cas de récidive, la peine est portée au double.»

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