Contribution : Maroc : vers une monarchie constitutionnelle ?

�Je me con�ois comme le premier serviteur du peuple marocain�
(Mohammed VI, Time, 26/06/2000)

Par Ammar Koroghli*
Le roi du Maroc, Mohammed VI, annonce une �r�forme constitutionnelle globale�, pr�cisant que �le projet de la nouvelle Constitution� sera �soumis au r�f�rendum populaire�.
Le souverain promet en effet �la cons�cration du statut de Premier ministre en tant que chef d'un pouvoir ex�cutif effectif et pleinement responsable du gouvernement �. Il pr�voit �galement �un gouvernement �lu, �manant de la volont� populaire exprim�e � travers les urnes et jouissant de la confiance de la majorit� � la Chambre des repr�sentants�. De m�me, il a annonc� des mesures afin de renforcer le pluralisme, les droits de l'homme et les libert�s individuelles, l'ind�pendance de la justice, et le r�le des partis politiques. Impression de discours de Chadli Bendjedid suite aux �meutes d�Octobre 1988 ? Sans doute qu�un retour vers l�histoire politique du Maroc post-ind�pendance est n�cessaire pour appr�cier cette (r)�volution qui s�annonce. D�s 1956, le souverain Mohammed V, alors Mohammed Ben Youssef, disait : �Notre volont� est d�instaurer au Maroc un r�gime d�mocratique dans le cadre d�une monarchie constitutionnelle bas�e sur la s�paration des pouvoirs.� Ce, � un moment o� la situation �conomique �tait des plus �pouvantables pour le peuple marocain tant les caisses de l�Etat �taient d�sesp�r�ment vides. Apr�s son retour d�exil, le futur roi du Maroc est intronis�, la France ayant reconnu l�ind�pendance du Maroc. Pour le nouveau pouvoir marocain, la priorit� �tait alors d�avoir une v�ritable arm�e (naissance des FAR) et une police efficace. D�j�, les instruments de r�pression et inhibiteurs de la d�mocratie se mettaient en place, le s�curitaire prenant le pas sur l��conomique et le social. Le tout sur fond de liquidations physiques de ceux parmi les Marocains soup�onn�s de �collaboration� avec la France et de distribution de terres agricoles autrefois d�tenues par les colons et c�d�es en partie aux militaires. Certains d�nonc�rent la situation s�curitaire due au �r�gime policier� plus abominable que celui du colonialisme� (M. H. Ouazzani). Cette appr�ciation �tait sans doute excessive, mais il est vrai que s�vissaient alors des r�glements de comptes entre partis alors m�me que la monarchie se renfor�ait au d�triment d�un jeu politique d�mocratique. Quelques personnalit�s tentaient de sauver la mise : Allal El Fassi, nationaliste intransigeant, qui avait, dit-on, le don d�agacer le palais de Mohammed V ; Mehdi Ben Barka, progressiste et militant de la cause du tiers-monde, qui inqui�tait s�rieusement la monarchie (il disait : �Au Maroc, on peut devenir riche en un clin d��il. Tu baises la main, tu baisses les yeux et tu deviens riche�). Il y avait �galement Abderrahim Bouabid qui avait conscience qu��il existe une hi�rarchie sociale qui ne doit rien au m�rite, mais tout � la naissance et � la fortune� Allons-nous demeurer �ternellement en r�gime de pouvoir personnel ?�. Il y a �galement Abdallah Ibrahim pour qui il fallait �nous occuper en priorit� des domaines social et �conomique, en nous abstenant de bercer les foules de slogans d�magogiques��. D�s lors, il est �tonnant qu�avec ce potentiel, le Maroc n�ait pu parvenir � jeter durablement les bases d�un d�veloppement politique. L�Alg�rie n�est pas loin de ce cas.
Le roi Hassan II entre coups d�Etat, r�gression sociale et corruption
Le roi Mohammed V mourut � la suite d�une op�ration banale, dit-on ; ce qui ouvrit la voie au pouvoir absolu de Hassan II. Dans Le D�fi(1976), celui-ci disait de son p�re que pour lui �l�ind�pendance n��tait pas une fin, mais un moyen ; le moyen de jeter les bases de la nation moderne marocaine�. Toujours est-il que d�aucuns s�accordent sur le fait que feu Hassan II r�gnait et gouvernait par la �terreur institutionnalis�e�. A en croire Gilles Perrault (1), �le roi donne l�exemple. Premier propri�taire foncier du pays, premier exportateur d�agrumes, premier entrepreneur, il rach�te les possessions de la Banque de Paris et des Pays-Bas, il investit dans les produits laitiers, la betterave � sucre, les fleurs coup�es. Ses placements � l��tranger sont innombrables� La corruption est partie int�grante de son mode de gouvernement (...). Ifrane, Tanger, Agadir, Marrakech, Rabat, F�s, Mekn�s, Casablanca : chaque grande ville du royaume devait avoir son palais. A F�s, toute la robinetterie �tait en or� La somptuosit� des bouffes fait l��merveillement g�n�ral. Montagnes de homards et de langoustes, piles de saumons, caviar � la louche, fruits, g�teaux et sorbets. Des moutons tournent par dizaines sur la broche des m�chouis� �. Le r�gne (et gouvernement) de Hassan II est terni par l�affaire Ben Barka, les coups d�Etat, les �ann�es de plomb�, les �meutes populaires. En mars 1965, l�insurrection de Casablanca dura trois jours, occasionnant des centaines de morts ; la r�pression �tant men�e par un certain Oufkir, plus tard auteur d�une tentative de putsch. L��tat d�exception fut d�ailleurs proclam� en juin de la m�me ann�e. La r�cup�ration des positions des colons par la bourgeoisie marocaine �conomique, alli�e du r�gime, pr�figura la pr�dation qui s�ensuivit. En effet, les ann�es 1965 � 1971 se caract�risent par la corruption �rig�e en mode de gouvernement et par la r�pression des partis de gauche et de l�Union nationale des �tudiants marocains, ainsi que par des condamnations pour �atteinte � la s�ret� de l�Etat�. C�est dans ce contexte qu�intervint le coup d�Etat de 1971 � Skhirat o� le roi f�tait alors son anniversaire, conduit par le g�n�ral Medbouh et le lieutenant colonel Ababaou. L��chec de ce coup d�Etat est suivi par la r�pression men�e par le m�me Oufkir � l�endroit des insurg�s dont certains moisirent au bagne de Tazmamart, �goulag de la monarchie� d�alors. Oufkir, devenu g�n�ral, con�ut un pronunciamiento en 1972 ; ce fut la fameuse attaque de l�avion royale par des avions de chasse de l�arm�e marocaine. La r�pression s�abattit de nouveau sur les mutins ; Oufkir y trouva la mort. Tirant la le�on de ces p�rip�ties, la monarchie a �t� amen�e � �renforcer la base �conomique des capitalistes, propri�taires terriens, militaires et hauts cadres administratifs pour les rendre solidaires de la destin�e du r�gime� (Vermeren). Il semblerait alors que le roi Hassan II �tait alors pr�t � �faire p�rir le tiers de la population pour pr�server les deux tiers de la population saine�, second� en cela par le g�n�ral Dlimi devenu d�s 1970 directeur g�n�ral de la S�ret� nationale et, dit-on, corrompu et impliqu� dans une troisi�me tentative de putsch. Au plan social, les �tudiants s�agitaient � un moment o� le r�gime favorisait la bourgeoisie urbaine et les notables ruraux (en 1978 ; on comptait, semble-t-il, quelque �trois cents multimilliardaires�, alors que les pauvres devenaient plus pauvres, que le Maroc �conomique s�endettait pour ses investissements, que les exportations se r�duisaient sur fond de crise agricole et de s�cheresse, que l�exode vers les bidonvilles des grandes villes (telle Casablanca) devenait une donn�e de plus en plus visible. De nouveau, il y eut des �meutes � Casablanca en 1981 d�s l�annonce de l�augmentation des prix de la farine, du sucre et du beurre. Cette ville devint ainsi une v�ritable �poudri�re� (70% des jeunes de 15 � 20 ans �taient alors non scolaris�s et sans travail stable) ; derechef, la r�pression co�ta quelques centaines de morts au Maroc� Echaud� par les coups de l�arm�e port�s contre la monarchie, le roi remit au go�t du jour le minist�re de l�Int�rieur et ses services. Driss Basri entra en sc�ne et ne la quitta qu�avec l�av�nement de Mohammed VI. La vie politique avait l�apparence du �multipartisme�, le Parlement �tant instrumentalis� par la Palais pour jouer la partition du pluralisme de fa�ade. La presse �tait aux ordres. La question du Sahara occidental fut sacr�e depuis cause nationale et Hassan II s�affichait alors avec P�r�s en 1986 et avec Rabin en 1993. De 1971 � 1999, le Maroc initia un dialogue avec l�opposition de gauche pour ce qu�il a �t� convenu d�appeler �l�alternance�, le roi r�gnant et gouvernant toujours ; les militants de l�islam politique devenaient de plus en plus visibles. Le tout sur fond de plan d�ajustement structurel, d�aust�rit�, de troubles universitaires et de �crise berb�riste � ; ce, sans omettre la fermeture des fronti�res avec l�Alg�rie privant le Maroc oriental de ressources certaines. Durant cette p�riode, le pays passa de 3,4 millions � 5,3 millions de pauvres. Face � cette situation, le roi Hassan II conc�da une r�forme constitutionnelle et des �lections anticip�es avec en apparence deux grands blocs qui se concurren�aient : la Koutla qui r�unit les partis de gauche et le Wifak qui est une coalition d�anciens partis administratifs dont l�Union constitutionnelle ; ce, en vue d�une �alternance� contr�l�e pour assurer ainsi la p�rennit� de la monarchie. La monarchie alors ? Une vingtaine de palais de Tanger � Agadir, de Marrakech � Ifrane et Casablanca ; �des palais grandioses� des palais royaux propri�t� de l�Etat, des palais priv�s ou des villas cossues aux allures de palais� Le roi poss�dait aussi des pied-�-terre luxueux � l��tranger dont au moins deux en France : Armainvilliers, en r�gion parisienne, �aux allures de petit Versailles avec ses deux cents pi�ces��. A cela s�ajoutaient �une propri�t� agricole non loin de Princeton, dans le New Jersey, un ranch en Californie, plusieurs milliers d�hectares de for�t au Br�sil, des immeubles � New York, Monaco, Londres�� (Tuquoi). Ce, sans compter les deux cents voitures de luxe et de collection� Par ailleurs, il semblerait que le souverain avait des compte dans les grandes banques occidentales : la Bank of New York, la BNP, l�UBS, la Citibank, la Chase Bank Manhattan� En somme, une fortune colossale. Il y avait �galement le poids �conomique de la monarchie ; ainsi sa participation � l�Omnium nord-africain (ONA) qui est pr�sent dans moult activit�s : agroalimentaire, banque, assurance, distribution� qui en fait le premier groupe industriel priv� d�Afrique. C�est ainsi que pour neutraliser certains des plus dangereux de ses vassaux, Hassan II usait toujours de la corruption comme l�un des modes de gouvernance ; �les grands patrons de l�arm�e et de la gendarmerie, les responsables de services de s�curit�, les ministres au portefeuille strat�gique, les gestionnaires de la fortune du souverain : tous sans exception ont amass� des fortunes cons�quentes qui fructifient � l��tranger, investies dans la pierre ou en Bourse� (Tuquoi). En contrepartie, ces forces assuraient un quadrillage policier de la population et un client�lisme dans l�appareil de l�Etat.
Le roi Mohammed VI, �roi des pauvres� et aggiornamento
Hassan II mourut � l��ge de 70 ans, le r�gne de Mohammed VI commen�a alors avec une �transition d�mocratique�. Intronis�, il suscita l�euphorie et entama l�aggiornamento pour solder les �ann�es de plomb� (Cf. Marzouki : Tazmamart. Cellule 10), r�voquer Driss Basri le tout-puissant ministre de l�Int�rieur de Hassan II sur fond de libert� d�expression et retour des exil�s dont A. Serfaty. Dans ce contexte, le Cheikh Yassine demanda au jeune roi de liquider le patrimoine de son p�re. De m�me, le Manifeste berb�re est publi� par M. Chafik ; des militants des droits des femmes d�fil�rent dans les rues de Rabat en 2000. Cependant, les r�alit�s sociales et �conomiques refont surface, ainsi que les scandales financiers. Avec la suspension des journaux Le Journal et Demain, la fin de la r�cr�ation sonna le glas, d�montrant ainsi que l�exercice du pouvoir ne saurait s�op�rer sans le contr�le du roi qui r�affirma de ce fait sa pr��minence et celle du Makhzen. Apr�s les attentats de Casablanca de 2003 et l�apparition de kamikazes, la transition d�mocratique appara�t compromise, les �s�curitaires� refont surface. La r�forme devient une urgence face � la corruption, la hogra, l�illettrisme (voire l�analphab�tisme)... Dans cette perspective, un parti s�inspirant de l�islam politique (le PJD) est autoris�, la mudawwana est modifi�e en 2004 de fa�on substantielle. Le roi impulse la lutte contre la pauvret� et l�analphab�tisme, voire l�enseignement du tamazight dans les �coles primaires. De m�me, le nouveau roi, Mohammed VI, baptis� �roi des pauvres�, rompt avec le faste de son p�re. Un journal marocain a m�me tent� de poser la question de savoir combien co�te l�Etat (il est vrai qu�il s�est fait tancer en se faisant rappeler � l�ordre). Toujours est-il que du num�ro Tel Quel (repris par Le Monde du 28 d�cembre 2004) traitant de cette question, il r�sulte que la monarchie marocaine co�terait quelque 210 millions d�euros par an, le salaire mensuel du roi �tant de 36 000 euros. Quelque 110 personnes travailleraient ainsi pour les palais royaux dont l�entretien, les salaires et les voyages et c�r�monies co�teraient quelque 163 millions d�euros. Et le cabinet royal compte, nous apprend-on, 300 permanents dont les conseillers du roi (dont les salaires sont align�s sur ceux des membres du gouvernement). Le budget annuel des consommations des palais royaux comprendrait 6 millions d�euros de carburant, autant pour l�eau, 4 millions d�euros pour l��lectricit� et deux millions pour les d�penses vestimentaires� Il semblerait ainsi que �les d�penses li�es � la monarchie repr�sentent bon an mal an pour le budget de l�Etat autant que les minist�res de l�Habitat, de l�Am�nagement du territoire et de l�Urbanisme, de l�Emploi, de la Jeunesse et des Sports, des Affaires culturelles et des Droits de l�homme r�unis� (Tuquoi). Cela �tant, il est vrai que le Maroc s�est voulu depuis l�ind�pendance un chantre de la lib�ralisation, pr�n�e depuis par le FMI et la Banque mondiale. Comme en Alg�rie, les autorit�s se piquent de macro�conomie, sans faire face � la n�cessaire transformation structurelle et la d�pendance de la croissance �conomique de l�agriculture dont il semblerait qu�elle soit �faiblement m�canis�e�. Selon le Pnud (Programme des Nations-unies pour le d�veloppement)( 2), le Maroc est class� au 124e rang mondial derri�re l�Alg�rie, la Tunisie et l��gypte. Les campagnes marocaines continuent de vivre dans un d�nuement qui les rapproche singuli�rement de la mis�re, sachant que 40% de la population marocaine vit de l�agriculture. Tout comme l�Alg�rie, et dans une moindre mesure la Tunisie, le Maroc doit d�abord faire face � la pauvret�. Plus d�un tiers de la population vivrait avec deux dollars par jour. Face � une minorit� de riches, la mis�re du monde rural et des bidonvilles survivant � la p�riph�rie des grandes villes est flagrante. Ensuite, le taux d�analphab�tisme demeure encore �lev� �en moyenne pour les adultes de plus de quinze ans de 51%� ; ce, conjugu� � un fort taux de ch�mage (�10% seulement des jeunes qui arrivent chaque ann�e sur le march� du travail trouvent un emploi r�el�). Enfin, il appara�trait que trois millions de RME (r�sidents marocains � l��tranger) engrangent quelque deux milliards et demi de dollars par an. Par ailleurs, la corruption d�une partie de l��lite n�est pas le moindre mal, le Maroc �tant class� 77e sur 145 pays par Transparency International ; ce, sans compter que le secteur de l�enseignement serait comme en Alg�rie sinistr� d�s lors qu�il semblerait que seuls 55% des enfants d�passent le cap de l��ducation primaire (�le royaume serait au m�me niveau que le Malawi et loin derri�re des pays comme le Bangladesh�). De m�me, selon un rapport interne au Palais, �les disparit�s entre le monde rural et les villes sont criantes (acc�s � l�eau, � l��lectricit�, � la sant� et au savoir� ; ainsi �les besoins en financement pour cr�er les infrastructures n�cessaires sont exorbitants�(3). Selon un rapport d�un s�nateur fran�ais, Michel Charasse, il appara�t que : �Globalement, le pays est plus proche d�un pays moins avanc� d�Afrique subsaharienne que d�un pays � revenu interm�diaire m�diterran�en �. Pour le cabinet am�ricain McKinsey, �avec le baril � 55 dollars, la s�cheresse qui persiste et la mondialisation qui s�acc�l�re� la monarchie n�a plus aucun avantage comparatif dans le moindre secteur industriel�. De m�me, il semblerait que les r�sultats des deux principales soci�t�s charg�es de l�agriculture marocaine soient en crise eu �gard, notamment, � l�accumulation des dettes et � la rentabilit� d�croissante, mais �galement les d�tournements de fonds et l�absence effective de contr�le( 4). A cela s�ajoutent la fuite des cerveaux marocains et l�absence de v�ritables capitaines d�industrie, tout comme en Alg�rie et en Tunisie. Sans oublier la situation de la r�gion du nord du Maroc, la plus pauvre et la plus rebelle du royaume, dont il appara�trait qu�elle vive en partie de la culture du cannabis (27% de la surface agricole utile, dix milliards d�euros par an, dit-on). S�agissant du tourisme, aspect important du syst�me �conomique marocain, il semblerait que �dans ce secteur, le gouvernement de Hassan II a brad� les int�r�ts marocains�. Ainsi, le r�gime a c�d� au groupe fran�ais Accor �quelques bijoux de famille pour des sommes que tout le monde estime aujourd�hui d�risoires�(5). Et ce, dans plusieurs villes : Rabat, Casablanca, F�s, Marrakech, Tanger, Mekn�s, Agadir, Essaouira� Un autre aspect d�cri� par certains auteurs et journalistes, celui des voyages fastueux ; des fortunes seraient d�pens�es. Ainsi, �la d�l�gation officielle compte toujours au moins deux cent cinquante personnes qui prennent place dans un Boeing royal 747 Jumbo, deux Boeing 737-400 et trois Hercule C-130 pour l�ameublement, l��quipement et les bagages. Le Boeing royal re�oit un kit sp�cial avec chambre � coucher, bureau, salle de r�union, gymnase et �quipements sophistiqu�s (�) un Hercule C-130 est r�serv� pour le seul transport des jet-skis et du mat�riel de sports nautiques et de musculation� (Beau)(6). Ce, sans compter les dizaines de voitures de luxe, �limousines et Mercedes blind�es � raison de 800 000 euros chacune�. Face � cette situation critique, des intellectuels, journalistes et auteurs marocains n�ont pas h�sit� � s�exprimer. Ainsi, dans sa lettre ouverte au roi Mohammed VI, Aboubakr Jama�, journaliste marocain, dit : �Vous nous avez donn� des raisons d'esp�rer, vous nous avez aussi parfois d��us. Nous n'avons pas compris certaines d�cisions. Nous n'avons pas compris beaucoup de choses. Mais, sachez-le, nous persisterons � vous le dire quand nous ne comprendrons pas le sens de vos actions, car c'est notre droit l�gitime. Nous persisterons aussi � vous le dire parce que nous pensons que votre position privil�gi�e vous place id�alement pour accompagner ce pays vers des lendemains meilleurs.� Plus radical et plus impertinent, Ali Lmrabet n�y va pas de main morte : �Le pays n�appartient pas au chef des services secrets, ni au ministre de l�Int�rieur ni au ministre de la Justice, ni pas m�me au roi. Ce pays appartient � tous.� (site Ya biladi citant le journal Libert�). Il est vrai aussi que l�une des malheureuses victimes de Tazmamart a pu dire : �Aucune de nos institutions traditionnelles, y compris la monarchie, ne s�est v�ritablement attaqu�e � la mise en �uvre des nouvelles structures politiques que notre peuple m�rite.� (A. Marzouki in Le Monde. 27/06/2001). La question se pose donc toujours avec acuit� : le Maroc peut-il op�rer un bond qualitatif du point de vue des r�formes politiques substantielles, en passant des �ann�es de plomb� vers une transition d�mocratique au terme de laquelle la monarchie constitutionnelle serait la pierre d�angle ? Ce faisant, la soci�t� civile reprendra le droit de se gouverner par le libre choix de ses gouvernants � partir des urnes. La tentation du mod�le espagnol, en somme. Outre le fait que, comme pour l�Alg�rie, pour esp�rer sortir des orni�res du sous-d�veloppement �conomique et social et s�inscrire dans un projet de d�veloppement durable, il faudrait une croissance � la chinoise � deux chiffres durant une ou deux d�cennies enti�res. Pour que nous n�ayons plus � voir dans l�espace maghr�bin nos enfants vendre des sacs en plastique ou les utiliser pour sniffer. Ou pour r�ver � une harga mortelle� La r�forme annonc�e par le roi Mohammed VI va-telle effacer ce que Ali Lmrabet, journaliste marocain, appelle �la dictature couronn�e� et ce que Ali Amar, autre journaliste marocain, appelle �le grand malentendu� ? Il reste � esp�rer que cette r�forme soit celle de la modernisation du r�gime monarchique o� le roi r�gne et le peuple se gouverne par ses �lites �lues, issues des rangs de la soci�t� civile : Premier ministre, gouvernement, d�put�s, maires (un jour prochain sans doute pr�sidents de r�gions et walis). Cette option pourrait aider le Maghreb (�largi � la nouvelle �gypte qui s�annonce ?) � asseoir durablement ses institutions politiques et � r�soudre l��quation du Sahara, sur fond de justice sociale.
A. K.

* Avocat-auteur alg�rien
Notes :

1- G. Perrault : Notre ami le Roi;
2- Rapport mondial sur le d�veloppement humain 2005 ;
3- N. Beau et C. Graciet Quand le Maroc sera islamiste ;
4- la Sodea (Soci�t� de d�veloppement agricole) et la Sogeta (Soci�t� de gestion des terres agricoles). (Cit� par. I. Dalle in Les Trois rois).
5- op. cit�.
6- Un seul voyage, un seul, se chiffre � plus de trois millions de dollars.

Ouvrages :
P. Vemeren : Histoire du Maroc depuis l�ind�pendance
A. Marzouki : Tazmamart. Cellule 10
A. Amar : Mohammed VI, le grand malentendu
JP Tuquoi : Le dernier Roi. Cr�puscule d�une dynastie
I. Dalle : Les trois Rois.

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