Culture : EXPOSITION COLLECTIVE À LA GALERIE ART 4 YOU
Du talent et beaucoup d’oxygène


Ils sont trois jeunes artistes plasticiens à exposer à galerie Art 4 you (Sacré-Cœur, Alger) depuis le 23 avril. Une exposition collective dont le thème «Attention, peinture fraîche !» se veut un clin d’œil à l’énergie printanière qui caractérise les œuvres et leurs auteurs.
«L’intitulé, fait observer Djamel Agagnia, est justement motivé par la fraîcheur de notre production. Nous sommes jeunes, indépendants et notre peinture respire liberté et créativité.» Né le 20 mai 1977 à Guelma, l’artiste enseigne à l’Ecole nationale des beaux-arts de Tipasa et prépare un magistère. Djamel Agagnia est diplômé de l’ENBA d’Alger (promotion 2006, option peinture) et expose régulièrement depuis 2003. Les quatorze toiles inédites qu’il présente aujourd’hui, il les a réalisées ces derniers mois. Du figuratif métissé d’art contemporain, lequel style est déterminé par la thématique. Djamel Agagnia a aussi privilégié l’acrylique sur toile (sur bois pour un seul des tableaux) et emploie une technique mixte qui allie dessin et aquarelle. Les œuvres exposées sont peuplées de personnages ombrageux, au regard vide, étrangement coincés dans un espace rétréci et stressant. Les couleurs généralement sombres et froides accentuent l’effet angoissant reflété par la galerie de personnages. Dans cet univers kafkaïen, où dominent tristesse et mélancolie, les figures sont marquées par l’abattement, la souffrance intérieure (ce cri qui ne veut pas sortir) et le mal-être. Une sorte de théâtre d’ombres où les silhouettes sont étirées à l’extrême. Djamel Agagnia met en scène des personnages longilignes, aux courbes prononcées et aux formes caricaturales. Visages grimaçants et anonymes, tristesse des femmes enceintes et porteuses de vies avortées, enfants orphelins de leurs rêves et de leur innocence… constituent l’univers urbain ainsi mis en relief par Djamel Agagnia. Un monde fait de barrières, de difficultés existentielles, d’absence de liberté et de communication, de violence et de fatalisme. Mais le drame de tous ces «possédés» n’est pas du tout un thème récurrent chez cet artiste. Il aime varier les sujets et diversifier sa palette de couleurs, changer de style aussi. «En fait, nous dit-il, je peins selon mon état d’esprit et les thèmes qui m’interpellent. Je peux aller de l’abstrait au figuratif, car l’art n’est pas quelque chose de figé et je maîtrise ma technique.» Et de nous donner rendez-vous en décembre 2011, pour sa prochaine expo individuelle. Walid Waleed, quant à lui, expose sept toiles qui se distinguent par leur grand format et une vibration chromatique très tendance. Il y a beaucoup de fraîcheur dans ces compositions où il marie graphisme, design et architecture moderne. C’est là le résultat d’un travail de recherche sur la peinture urbaine entamé ces dernières années. Ici, l’artiste joue pleinement sur les formes et les tracés architecturaux, l e s esquisses du designer et les procédés de construction graphique. Le style abstrait favorise ce genre d’épures toujours comme laissées en plan, jamais achevées. Un «brouillon» d’architecte sur lequel le peintre crée son œuvre, s’ingéniant à construire et déconstruire au gré de sa fantaisie. «L’architecture m’inspire beaucoup, nous explique Walid Waleed. C’est pourquoi j’aime déstructurer pour mieux restructurer. C’est le sens même de l’inachevé, de l’œuvre éclatée et de l’art urbain toujours en devenir.» Walid Aidoud (de son vrai nom) est né le 3 février 1979 à Alger. Il est diplômé de l’Ecole supérieure des beaux-arts (ESBA) d’Alger, promotion 2008, et c’est sa formation de designer aménagiste qui explique son orientation et  sa conception de l’art pictural. Sa recherche d’une structure en perpétuel mouvement, son souci de l’inachevé se retrouvent même dans ses portraits (il expose ici deux têtes que le visiteur peut construire et déconstruire à sa guise). La palette des couleurs, avec un dégradé de couleurs claires et sombres, trahit la griffe de cet «architecte » de la toile. Sauf dans le tableau intitulé «Strates» (1,50 m x 1,50 m) où dominent le rouge et le noir, en plus d’un texte rendu illisible à dessein pour donner un aspect graphique à l’œuvre. Naturellement, Walid Waleed privilégie l’acrylique et le crayon dans sa prospection des cités urbaines. Sa prochaine expo sera consacrée au mobilier contemporain, pour mieux laisser éclater son talent de designer. Le troisième diplômé des Beaux-Arts à exposer à la galerie Art 4 You est Yacine Aïdoud (le cousin de Walid). Il s’agit d’une nouvelle collection de quatorze tableaux cette fois encore dédiés à l’Afrique. Mais, à la différence de ses précédentes expos, l’artiste tend un peu plus vers l’abstrait et introduit plus de couleurs (avec une dominante de rouges). Tout en s’éloignant du figuratif, Yacine Aïdoud représente des personnages évoluant dans une ambiance de fête et de danse. L’art brut africain ainsi modernisé est parfois en rapport avec l’actualité brûlante de ces derniers mois. On relève surtout que Yacine Aïdoud, tout en restant fidèle au collage et au graphisme notamment, a simplifié sa technique de composition, y compris dans les formes. «Maintenant, je m’oriente un peu plus vers la création esthétique», relève- t-il à propos de sa démarche. Sa prochaine expo ? «Ce sera exclusivement des sculptures et des installations, toujours dans le cadre de mes recherches africaines», promet-il. Cette exposition collective de trois représentants de la nouvelle génération d’artistes plasticiens dure jusqu’au 15 mai 2011.
Hocine T.

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