Sports : CONTRIBUTION
Planification de l’entraînement sportif


Par Dr Bounemri Zaki Salhia*
La performance sportive est un phénomène complexe qui comporte plusieurs aspects. La planification de l'entraînement repose sur une modélisation qui tend à réduire les performances à quelques propriétés considérées comme essentielles. L'entraînement peut être défini comme un processus d'action dont le but est d'agir de façon méthodique et adapté sur le développement de la perf sportive. Toute planification repose sur l'analyse des exigences de l’activité, ainsi les différents points à mettre en évidence sont :
Besoins physiologiques :
• Energétique : la détermination des filières énergétiques prépondérante dans une activité physique peut reposer sur une approche scientifique ou empirique :
Scientifique = mesure de VO2 de la lactatémie de fin d'effort, biopsies.
Empirique = observation du temps d'effort et de l'intensité, observation du type d'action.
• Force : l'analyse de l'activité repose sur les outils cinématiques et cinétiques qui vont permettre de déterminer le mode de contraction musculaire et le niveau de recrutement des fibres.
• Souplesse : l'analyse de la souplesse spécifique à l'activité repose sur l'analyse biomécanique qui met en évidence l'amplitude des mouvements ainsi que la souplesse active et passive nécessaire à chaque groupe musculaire.
Besoins techniques :
• Coordination motrice : une partie de cette coordination est innée l'autre est acquise ; on différencie les facultés d'équilibration, de reproduction d'un mouvement, et d'adaptation à un mouvement.
• Développement de l'habileté motrice/ technique propre à l'activité : partir des éléments de base de l'activité pour arriver à l'ensemble cohérent recherché.
Besoins tactiques :
Ces exigences sont subordonnées aux éléments de la coordination motrice.
Besoins psychologiques :
Qui sont souvent une conséquence de la charge et de l'état de forme du sportif et qui devrait pourtant être un objectif de préparation.
Le premier objectif de la planification est de hiérarchiser l'ensemble de ses besoins. Pour élaborer un plan d'entraînement, il faut partir d'une conception théorique de la préparation du sportif. Ce plan théorique devra déterminer les objectifs de la préparation, les périodes de la préparation, le nombre de séances dans chaque cycle et le contenu des séances.
Dans chaque période de préparation, l'entraîneur applique des microcycles à charge déterminée en vue d'agir sur une composante de la forme ou de la performance.
Le microcycle est considéré comme une unité du mésocycle, sa durée varie entre 7 et 12 jours, mais le plus courant demeure celui d’une semaine et les charges de travail s'enchaînent à raison de 1 ou 2 séances par jour.
A l’intérieur de chaque microcycle, l’entraîneur doit trouver l’agencement le plus harmonieux.
Il doit prendre en considération les différents principes (progressivité, spécificité, alternance, récupération…) ainsi que les facteurs suivants :
- La place du microcycle dans le cycle d’entraînement.
- Le nombre de séances dans le microcycle.
- Les réactions individuelles aux charges d’entraînement.
- Le régime de vie de l’athlète, etc.
Dans la construction des microcycles, il existe certains principes :
3 à 4 séances à haute intensité pour un microcycle, représentent le maximum ;
2 séances de suite avec le même objectif représentent un choix risqué ;
1 séance avec un objectif principal peut avoir des conséquences sur d'autres qualités physiques ou techniques.
Souvent les microcycles sont organisés par groupes de quatre.
Au cours des trois premiers, la charge totale augmente progressivement d’un microcycle à l’autre, le quatrième sera un microcycle de récupération.La charge sera donc nettement plus faible que celles des trois précédents. On distingue plusieurs types de microcycles et chaque microcycle possède ses propres caractéristiques :
- Microcycle ordinaire ou de préparation générale :
Favorise l’adaptation de l’organisme aux efforts intenses. Il est utilisé lors de la première étape ; le volume est élevé graduellement par contre l’intensité est faible
- Microcycle de choc ou de préparation spéciale :
La charge de travail est maximale aussi bien pour le volume que pour l’intensité. C’est un microcycle qui favorise l’adaptation aux grandes charges d’entraînement.
- Microcycle précompétitif :
Ce microcycle s’oriente vers la compétition et tient compte de l’état de préparation de l’athlète, sa récupération ainsi que sa motivation.
- Microcycle compétitif :
Ce microcycle calque la compétition et applique son programme, il assure par la même le maintien de la forme sportive et le perfectionnement technico-tactique dans les conditions réelles de jeu.
- Microcycle de récupération :
Ce microcycle fait suite à une série de microcycles ou après une compétition intense ; la charge d’entraînement enregistre une baisse avec une augmentation des jours de repos.
Mésocycles :
Le mésocycle est constitué de plusieurs microcycles. Elément de base sur le plan de l'entraînement, de même qu'une seule séance ne suffit pas à modifier le métabolisme de l'athlète, une seule semaine ou microcycle de travail ne représente pas un stimulus suffisant pour générer une adaptation stable de l'aptitude. Il est indispensable de construire toute programmation sur des cycles de 3 ou 4 semaines ayant un objectif précis et incluant des périodes de récupération.
Exemple :
Pour le développement musculaire comme la force : 3 semaines.
Pour le développement des qualités énergétiques : 4 semaines.
On trouve 7 types différents de mésocycles :
Mésocycle graduel :
Utilisé en début de PPG, dont l'objectif est la acquisition de la forme sportive et donc la remise en activité ; augmentation de la quantité et de l'intensité. Mésocycle durant lequel on inclut un microcycle de choc.
Mésocycle de base :
Est inclus dans la PPG, son objectif est d'accroître les aptitudes et de transformer les habiletés motrices. Composé de microcycles de choc.
Mésocycle de contrôle/préparatoire :
Constitue l'évaluation de l'état de forme du sportif, à partir d'un test lors d'un entraînement ou lors d'une compétition secondaire.
Mésocycle de précompétition :
Vise à modéliser pendant l'entraînement les conditions de compétition.
Mésocycle de compétition :
A pour objectif de conduire le sportif dans les meilleures conditions physiques et psychologiques jusqu'à la compétition.
Mésocycle de récupération/préparatoire :
Vise à tirer profit des compétitions en faisant progresser les fondamentaux de la performance surtout techniques. Permet une récupération physique et permet d'effectuer un travail technique.
Mésocycle de récupération :
Vise à récupérer complètement tout en maintenant le plus possible le niveau des aptitudes acquises pendant les périodes précédentes. En sport collectif, le mésocycle est le niveau à partir duquel on peut commencer à «individualiser» l'entraînement. En théorie, d'après Matveiev et Platonov, lorsqu'on répète plusieurs charges à même objectif et à quelques jours d'intervalle, les capacités de l'individu diminuent de façon plus marquée, récupèrent plus lentement, mais surcompensent plus. Lorsque les séances sont à objectifs variés, les effets sont plus difficiles à prévoir mais la fatigue est réduite, c'est pourquoi dans un même microcycle, la construction la plus courante est axée sur la répétition de 2 ou 3 séances à charge élevée sur une capacité, entrecoupée de séances à plus faible
intensité et à objectifs différents. La récupération peut être améliorée par des techniques multiples, telles que la pratique à faible intensité, le stretching, les massages, la sophrologie...
Plan de carrière ou plan pluriannuel :
Dans tous les cas de figure, la carrière d'un athlète va vers plus d'entraînement, plus de spécialisation et plus de compétition.
De plus, cette planification à long terme induit une augmentation progressive de la quantité de travail et une augmentation du rapport
Préparation spécifique / Préparation générale
Part relative des préparations spécifique et générale, ainsi que le volume de travail annuel.
On trouve dans la programmation à long terme différentes étapes qui correspondent à l'âge des pratiquants :
Formation sportive de base :
Dure 4 à 6 ans, en fonction du sport et des qualités physiques du sujet, la fréquence des entraînements ne dépasse pas 2 à 3 séances par semaine et la durée des séances ne dépasse pas 1h à 1h30 ; la planification est à ce moment-là calquée sur le calendrier scolaire.
Etape composée d'une période initiale ou motrice générale :
Dure 2 à 3 ans, où l'objectif est d'assurer un entraînement plus général et le développement des habiletés motrices (objectif d'ensemble). Le volume annuel est faible entre 80 et 120h, et l'augmentation de ce volume doit passer par l'augmentation du nombre de séances et non par l'augmentation du volume des séances.
Etape composée d'une période de formation spécifique de base :
Dure 2 à 3 ans. Etape qui correspond au stade de spécialisation initiale et qui s'appuie sur les périodes sensibles de développement de l'organisme
Pour Matveiev, «c'est l'intervalle de temps, où l'âge particulier au cours desquelles certaines réponses s'apprennent de manière irréversible avec un max d'efficacité et de facilité.»
Formation spécifique :
Peut durer 8 à 12 ans suivant les activités, période la plus intense de la carrière, période durant laquelle il va y avoir une systématisation du geste sportif.
Etape de préparation spécifique :
La part de l'entraînement spécifique augmente et s'approche des caractéristiques de la compétition (étape de spécialisation) ; étape où le volume d'entraînement et l'intensité augmentent.
Etape des réalisations maximales :
Etape où l'âge est optimal pour la réalisation de performances dans l'activité.
Maintien : quelques que soient les activités, l'âge entraîne le déclin des aptitudes, et à ce moment-là, l'objectif est de maintenir le plus longtemps possible le niveau de performance. Période de rentabilisation de la performance.
Il y a une différence entre plan pluriannuel et plan de carrière :
• Plan pluriannuel : se contente de fixer les objectifs de préparation en vue de la meilleure performance
• Plan de carrière : se soucie du financement, de la préparation des études, de l'environnement familial et de la reconversion du sportif.
Le plan pluriannuel présente l'intérêt majeur de mettre en perspective les objectifs de l'athlète et de donner du temps à l'entraîneur pour mettre en place son intervention.
Plan de saison :
Un plan peut être réduit à sa plus simple expression si on ne prend en compte que les dates importantes sans fixer le contenu de la périodisation.
Le plan permet de fixer les responsabilités des intervenants, mais normalement, il devrait aussi permettre de déterminer l'objectif de chaque saison.
On peut ainsi définir 3 objectifs principaux :
- augmentation du niveau
- stabilisation des performances
- Atteinte des performances maximales : être prêt pour 1 ou 2 échéances très importantes (Championnat d’Afrique, Championnat du monde, Jeux olympiques).
Un plan annuel de préparation doit comprendre :
Une période de préparation générale.
Une période de préparation spécifique.
Une période de pré-compétition.
Une période de compétition.
Une période de transition.
D'après Matveiev : l'existence de ces périodes est liée au fait qu'un sportif ne peut garder une condition optimale pendant une saison complète.
Cette condition physique passe obligatoirement par une phase d'amélioration, une phase de stabilisation et une phase de fatigue.
Il faut dans chaque période de préparation déterminer :
La quantité d'entraînement.
Le nombre d'entraînements hebdomadaires.
L’intensité de la charge.
Le contenu approximatif des séances.
La duré d'une période peut durer de 2 à 15 semaines en fonction du calendrier et des objectifs. Une période contient en moyenne un à trois mésocycles.
Les objectifs :
En période de préparation physique générale (PPG) :
L’objectif est de développer les qualités de base ; des études ont d'ailleurs démontré, que le niveau de capacité atteint à la fin de cette période détermine le niveau de performance de la saison, autrement dit : la quantité maximale d’entrainement doit être atteinte en fin de PPG avant le début de la PPS.
Durant cette période d’augmentation de la quantité et de l'intensité d'entraînement.
En période de préparation physique spéciale (PPS) :
L’objectif est d'entretenir les aptitudes acquises et de transférer ces progrès sur le plan de la performance.
La quantité se stabilise mais l'intensité continue à augmenter.
L’intensité maximum doit être atteinte en fin de PPS, avant le début de la période compétitive. Durant cette période lorsque l’intensité atteint 70 %, il sera alors nécessaire de diminuer le volume. La quantité peut commencer à diminuer juste avant la fin de la PPS pour introduire une phase de récupération, plus l'âge et le niveau de pratique augmentent, plus le rapport PPS/PPG augmente.
En période de précompétition et de compétition :
Le volume et l’intensité fluctueront avec recherche de charge optimale 10 jours avant la compétition.
L’objectif est la performance maximale, l'organisation de ces périodes dépend beaucoup de la discipline sportive, mais on doit de toute façon déterminer des objectifs principaux, car on ne peut avoir que 2 ou 3 périodes où les performances sont maximales dans la saison. C'est pour cela que certaines compétitions secondaires font plus partie de l'entraînement, car elles constituent des stimuli très importants et spécifiques. Durant cette période, le travail doit être très spécifique et le volume faible à modéré, la motivation et l'état de forme du sportif jouent alors un rôle primordial. Durant cette période, ce sont les phases de récupération qui sont les plus importantes à gérer.
En période de transition :
Lors de cette période, l’intensité chute rapidement, le volume progressivement.
Période de récupération active qui permet d'éviter le surentraînement en restaurant les capacités physiques et psychiques et en préservant l'intérêt du sportif pour son activité.
Cette période est formée soit d'une récupération passive, soit de transition douce vers une nouvelle PPG, soit de récupération active en pratiquant d'autres activités.
A la fin de la PPG lorsque l'on a acquis une capacité physique nécessaire à la performance, on tente de la transférer à la période de PPS, et donc à terme à la performance.
Suivi et préparation psychologique du sportif
Essayer de partir d'une mesure de l'état psychologique, donc essayer d'établir une évaluation à partir du questionnaire psychologique de Thill, ou de manière empirique à partir des observations à l'entraînement.
Cette évaluation doit nous permettre de gérer le stress chez le sportif de haut niveau, sa motivation, les échecs ou contre-performances, les relations au sein d'une équipe, les relations entraîneur et entraînés. D'une manière générale, l'entraîneur doit tenter de gérer les conflits, mais il faut pour cela qu'il y ait une communication directe entre entraîneur et entraînés, ainsi qu'une bonne gestion des contenus des séances et des charges de travail.
Aspect extra-sportif de l’entraînement
Organisation de l'entraînement et rythme de vie :
Selon que le sportif est ou non soumis à des contraintes externes, comme l'école où les activités professionnelles, les conditions d'entraînement ne sont pas les mêmes, c'est pourquoi l'entraîneur et les dirigeants doivent s'occuper de problèmes qui n'ont pas directement rapport avec le sport. La construction d'un entraînement devrait passer par la mise en place d'une structure de haut niveau, intégrant entraînement sportif, encadrement scolaire et hébergement. Les interlocuteurs dans la construction d'un tel environnement sont : les directeurs pédagogiques, les fédérations et ministère de la Jeunesse et des Sports.
Rythme de vie : au niveau des rythmes scolaires, ne pas oublier d’inclure des périodes de récupération (diminution de l'entraînement) afin de permettre au jeune sportif de gérer ses examens dans les meilleures conditions. Gérer aussi les problèmes liés à l'alimentation et au sommeil.
Contraintes financières :
L'argent est souvent étroitement lié aux résultats sportifs, car il détermine la qualité de l'entraînement, à travers la présence et la motivation de l'entraîneur et des athlètes, le nombre de participation aux compétitions et des conditions de vie de pratique.
Obligation de moyens et de résultats :
Quand on est entraîneur, on a une obligation de moyens, c'est-à-dire agir sur l'entraînement, puis obligation de résultats. Au terme de cette étude, nous tenons à insister sur le fait ; que la planification annuelle est orientée vers le choix de périodes où les joueurs devront être à leur potentiel maximum. Ce choix se fera en fonction des connaissances des équipes adverses et d’une stratégie mise en place en fonction de l’objectif visé par l’entraîneur. Sachant que l’athlète ne peut rester au sommet de sa forme physique durant de longues périodes, l’organisation de l’entraînement consiste donc à amener le sportif au niveau optimal des ressources à une ou plusieurs compétitions précises et évidemment connues à l’avance.
B. Z. S.
*Maître de conférences en STAPS, enseignante chercheur en sport, laboratoire de méthodologie de l’entraînement sportif, laboratoire des adaptations et de la performance motrice, enseignante de handball à INFS/STS de Dély-Ibrahim (Alger)

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