Chronique du jour : KIOSQUE ARABE Attrait et phobie du vert
Par Ahmed Halli
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Les campagnes �lectorales, pr�sidentielle en France, et l�gislatives en
Alg�rie, montrent aussi le large foss� qui s�pare les deux pays dans la
perception des couleurs. De ce c�t�-ci, nous avons l'Alliance verte,
cens�e �tre la couleur de l'Islam depuis l'ass�chement du croissant
fertile. Pourquoi le vert, alors que le drapeau noir de la piraterie
politico-religieuse est de plus en plus pr�sent dans le paysage
politique alg�rien. Explication facile : le vert est une couleur qui
rassure, et qui incarne la fertilit�, l'abondance et la prosp�rit�,
toutes choses qui nous ont abandonn�s. Le vert, c'est aussi la couleur
suppos�e d'un paradis o� il vous sera permis d'avoir tout ce dont vous
�tes priv�s ici-bas. Je ne ferai pas un dessin aux libidos entrav�es,
puisque tout le monde sait combien il leur est promis pour prix des
refoulements et des abstinences, forc�es ou volontaires. Pour les
autres, comme mes anciens commensaux reconvertis, il y a des
pr�dispositions naturelles qui fondent les vocations de piliers. Ce qui
permet de passer, apr�s une l�g�re transition et un voyage � La Mecque,
de passer du bar � la mosqu�e, sans autres �tats d'�me. Pour les autres,
les habits verts dissimulant de sombres pens�es continueront de leur
donner des id�es noires. Nous avons, donc, une alliance verte qui promet
de r�aliser les miracles que le FLN n'a plus la force ni le d�sir
d'entreprendre, comme l'interdiction de l'alcool et des femmes sans
voile. Le vert, n'est-il pas l'antichambre de la vertu, vers laquelle
tendent toutes les bonnes volont�s de cette communaut� ? Vaste et
g�n�reux programme qui susciterait, selon nos analystes, une large
adh�sion populaire. D'aucuns annoncent m�me une victoire confortable de
la banni�re noire wahhabite maquill�e en vert, comme les palissades
derri�re lesquelles seront parqu�es les �lectrices imprudentes. Pour le
reste, rien ne changera, et le fait de se mettre au vert ne changera
rien aux habitudes d'�lus, convertis � la seule religion qui tient ses
promesses. La religion qui proclame qu'il n'y a rien � attendre du ciel,
et qu'il importe seulement que le Tr�sor public n'�gare pas votre R.I.B,
lors des �ch�ances mensuelles. Pour rester dans la palette des couleurs,
daltoniens s'abstenir, c'est, en effet, le seul accroc qui peut faire
devenir vert de rage. Quant au rouge de la confusion et de la honte, il
est � peine visible, tant les traits sont devenus imperturbables, �
force d'entra�nements, quand ils ne disparaissent pas sous une barbe
foisonnante. Chez les Alg�riens offusqu�s, il y a une expression idoine
pour d�signer cette humanit� pr�te aux transferts massifs d'all�geances
et d'adh�sions : on dit qu'ils se lavent le visage avec de l'urine, avec
mes excuses pour l'odorat des lecteurs. Prenons le vert qui est la
couleur des d�fenseurs de l'environnement au pays de Fran�ois Hollande.
Les candidats qui se pr�sentent sous cette �tiquette veulent lutter pour
des industries moins polluantes et contre l'�nergie nucl�aire, jug�e
dangereuse. L'�cologie politique comme l'appellent les sp�cialistes, ou
les contradicteurs, n'a pas seulement vocation � sauver la France, mais
la plan�te enti�re de la pollution. La France, qui est un immense pr�
vert o� paissent des vaches aux mamelles opulentes et g�n�reuses,
devrait donc �tre fondamentalement �cologiste. Or, ils sont loin du
compte nos chers amis, et anciens ennemis, fran�ais, puisqu'ils
n'accordent que tr�s peu de suffrages � la candidate verte, Eva Joly. Il
est vrai que tous les autres candidats, hors du camp �cologiste,
affichent leur ambition de sauver l'environnement. Il est visible et
audible surtout que la dame en question est susceptible de provoquer des
troubles graves dans la phon�tique fran�aise, comme certains le lui
reprochent d�j�. Toutefois, l'accent �chleuh� et forc�ment rocailleux de
Mme Joly peut servir d'explication s'il est associ� � cet aveuglement
devant le vert, ou deut�ranopie, que les Arabes r�sument par
islamophobie. Une formule inspir�e qui exon�re les musulmans de tout
effort d'int�gration et qui nourrit la vocation de communaut�
stigmatis�e assign�e aux musulmans de France par les �savants� de
l'Islam politique. Pourtant l� aussi, l'Islam de France le plus visible
et le plus m�diatis� est celui des �tendards noirs, que la deut�ranopie
fran�aise a rendu visibles par c�cit�. Durant toute une d�cennie, on a
chant� cet �Islam de France�, incarn� par les agents de l'Internationale
islamiste agressive et par une mosqu�e alg�rienne timor�e et otage des
alliances politiciennes sur la rive sud de la M�diterran�e. C'est ainsi
qu'on a laiss� le soin � la communaut� juive, unie, organis�e et
omnipr�sente, de stopper la campagne contre l'abattage rituel. Ceci,
sachant que des membres �minents de cette communaut� tirent des
avantages commerciaux de l'exploitation de ce filon du �halal�. Au lieu
d'agir, la communaut� musulmane de France se contente de r�agir et se
refuse � faire son bilan critique, se contentant de r�citer le m�me
�verset� de la stigmatisation et � l'islamophobie. C'est ce que vient de
rappeler opportun�ment l'�crivain qatari, Ahmed Al- Ansari, dans un
article � l'intitul� volontairement alarmiste �l'avenir de l'Islam en
Occident�. Dans cette contribution parue dans le journal kowe�tien Al-Djarida,
l'auteur rappelle que depuis le d�but du si�cle, les musulmans ont
toujours �t� bien accueillis en Europe. Puis, rappelle-til, il y a eu la
�M�re de toutes les trag�dies qu'a constitu�es l'attentat du 11
septembre 2001. Cet attentat, note-t-il, a �t� planifi� et ex�cut� par
une cellule d'�tudiants arabes, � Hambourg, des hommes pr�nant la haine
de l'Occident tout en fr�quentant ses universit�s. Al-Ansari cite dans
la foul�e plusieurs autres attentats commis par des personnes qui ont
d'abord b�n�fici� de l'hospitalit� de l'Europe. L'�crivain incrimine
aussi, et surtout, le comportement quotidien des musulmans en Europe, et
il interpelle les th�ologiens musulmans afin qu'ils contribuent �
am�liorer l'image de leurs coreligionnaires dans les pays europ�ens. Un
appel qui n'a gu�re de chances d'�tre entendu par des imams, plus
soucieux de participer � la cueillette et au partage des fruits du
printemps arabe. Pour notre confr�re d' Elaph, Adnane Abou-Ze�d, la
question de la conqu�te du pouvoir dans les pays arabes est d'ores et
d�j� �lud�e par la perspective de la prochaine bataille entre sunnisme
et chiisme. Une id�e qui semble devoir prendre corps avant le retour des
manifestations chiites � Bahre�n, qui sentent � plein nez le soufre
iranien. Mais, en d�finitive, comme le constate l'�crivain kowe�tien
Fakher Soltane, sunnites et chiites ne sont en d�saccord que des points
de d�tail. Parlant de l'islamisation des lois dites la�ques par le
parlement du Kowe�t, il note que les d�put�s chiites ne se sont jamais
oppos�s au principe de l'islamisation. �Ce qu'ils ont voulu simplement,
ajoute Fakher Soltane, c'est �tre associ�s � l'entreprise et n�gocier
des points de d�tails qui leur soient favorables. En tout �tat de cause,
souligne l'�crivain, toute cette entreprise repose non pas sur une
conception ouverte et lib�rale de l'Islam, mais sur un fondamentalisme
r�trograde commun aux deux rites�.
A. H.
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