Monde : LE PARLEMENT EUROPÉEN ORDONNE AU MAROC DE NE PLUS
MANIPULER LA GÉOGRAPHIE DU SAHARA OCCIDENTAL
À BRUXELLES
La carte et le territoire
De notre bureau de Bruxelles, Aziouz Mokhtari
Espace Yehudi Menuhim, Parlement européen (PE), Bruxelles, les
huissiers, en nombre, arrivent à peine à contenir la colère des
eurodéputés contre la manipulation géographique de Giles Pargneaux et
Victor Pastinaru, lobbyistes, opportunistes et repus à la solde de
Rabat.
Ce qui devait être une simple présentation d’une expérience marocaine en
énergie renouvelable, s’est transformé en véritable incident
politico-diplomatique.
Les eurodéputés, Mohamed Sidati, plusieurs représentants d’ONG, alertés,
rapidement débarquent. Ceux qui ont des badges d’accès attendent, de
pied ferme, la réponse du président de la Chambre basse de l’UE. Dehors,
les associations s’impatientent.
La réponse du Parlement européen tombe sous forme d’un communiqué
cinglant. «Le Parlement européen n’assume aucune responsabilité quant au
contenu et informations figurant dans cette exposition.» Les eurodéputés
emmenés par une jeune et fougueuse Espagnole exigent davantage et
obtiennent, rapidement, gain de cause. La partie Sahara occidental est
«masquée» par un auto-collant — de marque prestigieuse — et, de ce fait,
la carte géographique proposée par les Marocains devient indigeste,
ridicule. Finalement, c’est le drapeau marocain qui couvre l’ensemble de
l’œuvre géographique et plus, dès lors, de trace des territoires
sahraouis sur la carte. Première et grande victoire de Mohamed Sidati,
ministre représentant de la RASD et du Polisario en Europe. Les
europarlementaires obtiennent, encore, que Martin Shulz, président de la
prestigieuse Chambre du Vieux Continent, déclare recevable la pétition
que l’intergroupes «Paix pour le peuple sahraoui» a décidé de lui
transmettre.
L’intergroupes est une instance européenne composée d’eurodéputés de la
majorité des coalitions (conservateurs, gauches de gouvernement et
gauches plus radicales, Verts, libéraux, communistes et apparentés).
Tous indiquent, en substance, que Fédérica Mogherini, commissaire
européenne chargée des relations extérieures, avait, en août dernier,
affirmé, sans ambages, que l’Union européenne ne reconnaissait aucune
paternité marocaine sur le Sahara occidental. F. Mogherini, précisant
que l’UE se rangeait totalement sur le consensus onusien concernant le
dossier (autodétermination des populations sahraouies, référendum,
parties au conflit identifiées, Polisario et Maroc...).
Pour rappel, l’ONU considère le Sahara occidental comme des territoires
non-identifiés, relevant de la doctrine des Nations-Unies en matière de
décolonisation... La salle Yehudi Menuhim retrouve son calme, les
europarlementaires partent et le Sahara occidental est déconnecté du
Maroc dans l’exposition.
Pourtant, l’après-midi, le communiqué complet du Parlement européen
rajoute une autre
précision : «L’usage de cet espace (Yehudi Menuhim, Ndlr) a été alloué
sans frais à l’un de ses députés, en accord avec les règles en
usage.» Ce qui signifie que le président Martin Shulz isole Giles
Pargneaux, partie demanderesse de la salle, et n’endosse pas son
dépassement.
Pendant toute l’après-midi de ce jeudi 20 octobre, les huissiers et la
garde parlementaire avaient l’œil sur l’expo. Aucun risque de nouveaux
dérapages. Pargneaux rentre à la maison et Mohamed Sidati peut,
désormais, quitter l’enceinte parlementaire. Le Maroc ne régnera pas sur
le territoire sahraoui au Parlement européen, à Bruxelles.
A. M.
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