Actualités : Retrait du Maroc de Guerguerat
«De la poudre aux yeux»
L’interminable conflit entre le Maroc et le Sahara
occidental se met à peser très lourd parmi les dossiers en charge de la
communauté internationale. L’affaire Guerguerat est venue raviver un feu
que tous tentent de contenir.
Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Les responsables de la RASD
(République arabe sahraouie démocratique) crient leur colère. Hier,
c’était au tour du ministre sahraoui des Affaires étrangères
d’intervenir, lors d’une conférence de presse, pour faire une mise au
point aux propos des Marocains. «L’annonce du retrait marocain de
Guerguerat est une fausse information, une manœuvre pour tromper
l’opinion publique internationale», assène Ould Salek devant une presse
avide de détails sur une affaire qui défraye la chronique depuis de
longues semaines. Guerguerat : ce no man’s land de quelques kilomètres
se situe à la frontière entre le Sahara occidental et la Mauritanie.
Vers la fin du mois d’août dernier, l’armée marocaine crée la surprise
en entamant la construction d’une route goudronnée à quelques kilomètres
de son mur de défense.
Le Front Polisario alerte les Nations-Unies, la communauté
internationale et dénonce une «grave violation du cessez-le feu» par la
partie adverse.
Le roi du Maroc se défend en faisant tout d’abord croire à une opération
de poursuite entamée contre des contrebandiers et des éléments
terroristes qui ont pris la fuite hors du territoire où ils étaient
pourchassés. Très vite, il s’avère que les troupes marocaines ont été en
fait déployées pour assurer la sécurité de convoyeurs marocains chargés
d’écouler de la marchandise en Mauritanie.
L’affaire se déroule en période de crise intense entre Mohamed VI et
l’ex-secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon accusé de parti pris pour
avoir entrepris des démarches en faveur d’une accélération du processus
devant mener à l’autodétermination du peuple sahraoui. Engagé dans une
politique de fait accompli, le roi se distingue également en sommant les
forces onusiennes de maintien de la paix au Sahara occidental de
retourner à leur QG. Les faits prennent alors une tournure dangereuse.
Décidés à ne pas se laisser faire, les Sahraouis envoient de leur côté
des troupes chargées de mener des incursions dans ce no man’s land
considéré comme faisant partie des territoires libérés. Le nouveau
président de la RASD, Brahim Ghali, se déplace en personne sur les lieux
et diffuse des photos où on le voit entouré de militaires aguerris à la
guerre des sables. Des images effarantes dévoilent également un
dispositif militaire de défense aérienne déployé par le Front Polisario.
Des quotidiens espagnols en font quotidiennement leur Une. A New York,
des voix s’élèvent pour attirer l’attention sur les dangers pouvant
découler d’une telle situation.
Dans les couloirs des Nations-Unies, des pourparlers s’entament
discrètement avec les deux parties. Six mois plus tard, le 27 février
dernier, le Maroc crée une autre surprise en annonçant son retrait de la
zone de Guerguerat. Comme l’ont fait précédemment Brahim Ghali et
d’autres responsables de la RASD, le ministre sahraoui des Affaires
étrangères affirmait hier que les forces marocaines ne se sont pas
retirées comme elles le prétendent. «Elles se sont retirées de quelques
mètres uniquement, c’est de la poudre aux yeux.» La phrase de Joachim
Chissano, envoyé spécial de l’Union Africaine pour le Sahara occidental,
résonne plus que jamais dans les esprits : l’étincelle risque de raviver
le feu…
A. C.
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