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15 ANS APRÈS LA CATASTROPHE A-t-on retenu les leçons du séisme de Boumerdès ?

Il était 19 heures 44 minutes, ce mercredi 21 mai de l'an 2003. Brusquement, des entrailles de la terre parvenaient de terribles grondements, le sol ondulait, les maisons chancelaient, le rivage de la Méditerranée se vidait de son eau turquoise, la pénombre tombait sur les cités et les villages. Le temps s'est figé. Un long silence drapait l'atmosphère Puis, des nuages de poussière, des cris de douleur fusèrent sous les décombres. La Faucheuse se livrait à une course macabre pour prélever sa dîme. A Dellys, des hommes, des femmes et des enfants chantaient et dansaient pour le bonheur d'un homme et d'une femme qui venaient de s'unir pour la vie, 80 d'entre eux ainsi que les deux mariés ne verront plus jamais le soleil briller sur leur ville millénaire. Cela fait 15 ans que la maman de Zakaria et Louiza s’est séparée dans le déchirement de toute son âme de ses deux enfants qui étaient beaux. Zakaria et Louiza ont été broyés par le béton mal fait par des hommes que l’appât du gain a aveuglés. Ces hommes avides d’argent facile ont empêché Zakaria et Louiza d’avoir 20 ans et de rêver comme on aime rêver à cet âge. Zakaria et Louiza et 2 218 victimes ont été fauchés entre Dellys, à l’est de la wilaya de Boumerdès, et la ville de Rouiba, à l’est de la capitale. Pour la seule wilaya de Boumerdès, le bilan faisait état de 1 391 morts et plus de 10 000 blessés. Quant au bilan matériel, il est évalué, à l’époque, à 5 milliards de dollars.
Les tares de la société mises à nu

Ce tremblement de terre avait non seulement laissé un lourds bilan en pertes humaines et matérielles, il a, en outre, mis à nu les grandes tares dont souffre la société algérienne. On s’en souvient, les théoriciens islamistes et leurs supplétifs, les charlatans de tout bord avaient tout fait pour imputer cette catastrophe à la femme algérienne. «C’est une punition de Dieu à cause de la mauvaise conduite des femmes», criaient-ils matin et soir dans les mosquées qu’ils régentaient aux citoyens déboussolés. Devant le désarroi politique et culturel, ce citoyen était prédisposé à gober les explications les plus farfelues. Le président de la République était parti à Toulouse en France pour recevoir des explications, largement médiatisées, sur le fonctionnement des séismes qui sont un processus géologique naturel. Pourtant, l’Algérie avait affronté à l’ex-El Asnam la même catastrophe, mais il n’y avait pas autant d’élucubrations. L’islamisme et la régression sont passés par là. 2003 a aussi révélé la grande corruption qui règne dans le secteur de l’habitat et la construction.
L’administration, plus dévouée dans le contrôle de ses administrés, a laissé faire des entrepreneurs véreux qui, sans état d’âme, livrent des pièges mortels aux demandeurs de logement. 90% des victimes enregistrées à Boumerdès et Alger, en 2003, habitaient des bâtiments construits après l’indépendance. L’Etat a été distinctement montré du doigt. Il a, en effet, oublié d’anticiper et d’instaurer une réglementation en matière de construction et, surtout, la faire respecter. A ce jour, il laisse prospérer les constructions illicites. Les pouvoirs publics ont essayé d’organiser un procès contre 38 suspects entre entrepreneurs et agents de l’administration pour s’innocenter, mais ce procès a tourné à la mascarade. Ils étaient obligés de relâcher ces accusés.
Solidarité et bravoure
En matière de solidarité, les Algériens ont été à la hauteur. Mais l’Etat, soufrant sûrement du manque de confiance envers les mobilisations massives, n’avait pas mis en place une organisation pour rentabiliser le dévouement des Algériens. Nous avions vu, à Thénia, un officier de la Protection civile pleurer parce qu’il n’avait aucun équipement pour secourir les victimes. Nous avions des soldats de l’ANP accourir pour porter secours aux sinistrés mais ils n’avaient que leurs klashs en bandoulière. Nous avions également vu des policiers et des gendarmes qui ont abandonné leurs commissariats et leurs brigades détruits pour s’occuper des victimes. Nous avions vu les médecins et les infirmiers soigner les blessés dans le noir ou à la lumière d’une allumette. Nous avons vu une jeune fille faire 10 kilomètres à pied et en pleine nuit noir pour rejoindre son poste à l’hôpital de Bordj-Menaïel. Nous avons vu le commandant Slimane, officier de l’ANP à Sidi-Daoud qui, devant la désertion totale des responsables civiles et, sans attendre les ordres d’en haut, avait pris les choses en main. Il avait regroupé les familles, dirigé les secours et mené une riposte, de nuit, contre les terroristes du GSPC qui s’apprêtaient à commettre un attentat à la bombe. Mais c’est aux jeunes que revient la palme de la bravoure. Ce sont eux qui ont accompli des gestes extraordinaires. Voici un exemple. Le vendredi 23 mai, nous avions rencontré à Boumerdès — à hauteur de l’actuel marché hebdomadaire — une jeune fille de 15 ou 16 ans, un homme âgé environ de 70 ans et un jeune d’une vingtaine d’années vêtu d’un seul pyjama chinois et tout le corps couvert d’une poussière blanchâtre. Le trio marchait à vive allure vers le site où la Protection civile commençait à installer un hôpital de campagne. Voici les mots échangés avec eux. «Qu’est-ce qui se passe ?» Le vieux : «Il vient de la retirer sous les décombres.» Il parlait de la jeune fille. «Avec qui ?» «Tout seul.» Question à l’adresse du jeune : «Tu es d’où ?» «Je viens de Bab-el-Oued. Je suis venu à pied pour aider mes frères.» Nous n’avons plus revu ce jeune. Dès vendredi, les Algériens d’autres régions du pays ont envahi la wilaya de Boumerdès. Des centaines de véhicules chargés de secours sillonnaient la région rendant la circulation pénible. Sur tous les véhicules, seul l’emblème national trônait. Les islamistes ont essayé de s’incruster dans ce formidable élan de solidarité, mais ils ont été vite emportés par ce véritable tsunami de compassion. A une blonde, correspondante d’une agence d’information britannique qui avait suivi un convoi de secours d’El-Harrach et qui s’inquiétait du contrôle des secours par les islamistes, un modeste citoyen de Thénia où est arrivé ce convoi lui rétorqua : «Ecoutez madame, ce sont des Algériens (les convoyeurs, ndlr), ils ont le droit et le devoir de porter secours à leurs compatriotes mais en politique, comme on dit chez nous, ‘’chacun sait où il doit enterrer sa mère.’’» C’est probablement en 2003 que les islamistes commençaient à sentir le vent de la défaite politique.
Abachi L.

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