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ZAKARIA DAHLOUK, AVOCAT DU TRÉSOR PUBLIC, AU SOIR D’ALGÉRIE : «Bouchouareb est l’architecte du chaos»

©Sidali Djarboub/NewPress
©Sidali Djarboub/NewPress

Propos recueillis par Abla Chérif
Ses interventions sont très attendues durant les procès des anciens dirigeants et hommes d’affaires incarcérés pour corruption. Zakaria Dahlouk est cet avocat qui révèle à l’opinion le montant de sommes détournées, le nombre de sociétés, de comptes en banque, c’est par lui que sont passés tous les dossiers jugés et que passeront toutes les affaires à venir.

Le Soir d’Algérie : Vous êtes avocat du Trésor public et êtes donc présent à tous les grands procès dans lesquels sont inculpés pour corruption les anciens hauts responsables et hommes d’affaires très connus. Quelle impression vous font toutes ces audiences ?
Zakaria Dahlouk :
Dans ces moments, je sens bien que je me trouve face à une lourde responsabilité, il s’agit de dossiers complexes contenant une quantité de détails et qui requièrent donc une somme de connaissances et aussi d’expériences. Mais c’est aussi un honneur de défendre l’intérêt du pays.

Lors de ces procès, vous êtes cette voix qui s’élève dans les salles pour énumérer les sommes colossales dilapidées. Vous est-il arrivé d’être impressionné ?
Oui, il m’est arrivé d’être impressionné, voire choqué car à la place où je me trouve, on réalise l’impact des préjudices sur la société. Autour de moi, je vois des gens qui peinent à vivre décemment, à manger parfois, alors qu’ailleurs, on gaspillait des milliards et des milliards. C’est une catastrophe à tout point de vue. Le mal est énorme, difficile à réparer, il se calcule en milliards de dollars et se répercute sur tous les citoyens, pas seulement le Trésor public, c’est notre argent. Au cours des procès précédents, on a pris connaissance des dégâts occasionnés par la corruption. C’est déjà beaucoup, mais le pire est à venir.

Que voulez-vous dire ?
Les procès qui sont passés ont révélé une partie de l’iceberg. Oui, le pire est à venir dans des dossiers où l’on apprend que des sommes d’argent énormes ont été détournées. Ce sont des dossiers qui révèlent davantage combien le mal est profond et cette volonté délibérée de nuire au pays.

Vous faites allusion aux dossiers Haddad, Eulmi ?
Pas seulement. Nous savons que l’affaire de Mahieddine Tahkout arrive également. La Cour suprême a transmis le dossier au tribunal de Sidi-M’hamed qui devrait normalement programmer le procès après la finalisation de l’arrêté de renvoi.
Peut-on avoir un aperçu des montants qui concernent cette affaire ?
Je n’ai pas encore le document, ce que je sais, c’est que ce sont des sommes importantes en dinars, euros et dollars.

A combien s’élève le préjudicie causé dans les affaires traitées jusque-là (l’affaire de l’automobile et du financement occulte de la campagne pour le cinquième mandat et celle de la famille Hamel) ?
L’instruction et les expertises ont démontré que le préjudice s’élève à 10 000 milliards de DA.

C’est énorme…
Je vous le redis, le pire est à venir. Lorsqu’on observe ce qui s’est passé, on est envahi par un sentiment de révolte. Comment ? Qu’est-ce qui a fait qu’une poignée de personnes aient pu gérer tout cet argent ? C’est la dimension d’un budget d’un continent, autour de nous les pays ne dépensent pas autant.

Il y a aussi les biens immobiliers…
Oui, bien sûr. Sur ce sujet, je peux vous dire que sur les quarante-huit wilayas, une vingtaine sont touchées par ce mal. Prenez l’affaire Hamel. Les biens fonciers et immobiliers sont au nombre de quarante-neuf entre Alger et Oran uniquement (24 à Alger et 25 à Oran).

Lorsque vous dites «ce mal», vous voulez dire les biens acquis de manière irrégulière ?
Les anciens ministres inculpés ont laissé faire, ils ont agi par complaisance, octroyé d’indus avantages, ils ont permis des investissements et ont bénéficié à leur tour d’avantages, des pots-de-vins : foncier, biens immobiliers… Ils ont fait dans le favoritisme, le délit de favoritisme a été bien établi et ils ont été jugés sur cette base. Mais je le répète, le plus révoltant est qu’ils ont agi dans l’intention délibérée de nuire. Il y avait une volonté réelle. Dans quel
but ? Nul ne le sait.
Y a-t-il un nom qui sort du lot ?
Sans conteste Abdeslam Bouchouareb. C’est l’une des personnes qui a causé le plus de tort à l’Algérie. Sa mauvaise gestion était volontaire et elle a entraîné une saignée de l’argent public. Il a fait des lois qu’il a outrepassées. C’est du jamais vu dans les annales de la justice. L’affaire des 26 milliards des années 80 n’est rien comparée à ce à quoi nous assistons.

Pourquoi l’affaire Tahkout n’a pas été associée au dossier automobile ?
C’est comme dans le dossier Haddad, il y a jonction avec plusieurs secteurs, c’est multisectoriel. L’automobile n’est qu’une partie de leurs activités. Ils ont touché à tout, l’import-export, la cimenterie, l’industrie, l’hydraulique, le domaine pharmaceutique, le sport et même la poudre de lait pour bébé…

La justice a ordonné la confiscation de leurs biens immobiliers et de l’argent détourné. De quelle manière cela s’effectuera-t-il ?
Ce que je peux vous dire est que les procédures ont été enclenchées et qu’elles vont bon train. Les biens qu’ils détiennent à l’étranger sont également concernés puisque l’Algérie a ratifié la convention internationale portant sur la corruption.

En quoi consistent ces procédures ?
Je ne peux pas les dévoiler, mais elles ne sont pas simples. Leurs sociétés également sont à l’arrêt.

A-t-on une idée du nombre de sociétés concernées ?
Deux cents. La moyenne est de dix sociétés par homme d’affaires et pas forcément dans l’automobile. Je vous l’ai dit, ils ont touché à tous les secteurs.

Les comptes des anciens ministres et hommes d’affaires sont gelés…
Oui, tous les comptes sont gelés, il n’y a aucune liquidité.

Durant le procès Hamel, le juge a demandé à ce dernier le montant de son salaire passé. Il a répondu qu’il ne se souvenait que de celui qui lui est versé actuellement, 48 millions. De quoi s’agit-il ?
Il ne peut pas être payé étant à la retraite, il parle donc de sa retraite, il y a droit, elle est versée mais tous ses comptes sont, cependant, gelés.

Pouvez-vous nous dire enfin quel est le secteur qui a été le plus affecté par la corruption ?
L’industrie. Ils ont ciblé le poumon de l’économie nationale, le secteur stratégique, névralgique, générateur d’emplois. Et l’architecte de ce chaos est Abdeslam Bouchouareb.
A. C.

 

 

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