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Ali Benflis tire à boulets rouges sur le pouvoir : «C’est l’État des clientèles»

Photo : Samir Sid
Photo : Samir Sid

Le parti de l’ancien chef de gouvernement, Ali Benflis, Talaie El Hourriyet, revient à la charge. En moins d’une semaine, il rend public un autre communiqué, encore plus virulent à l’égard du pouvoir que celui du 12 août dernier où il dénonçait l’interdiction de la manifestation du mouvement Mouwatana à Alger. C’est simple : le parti de Benflis estime que «la crise que vit notre pays est globale».
Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Le communiqué en question sanctionnait une réunion du bureau politique du parti que présidait, hier, Ali Benflis. «La crise que vit notre pays est globale. Elle est multidimensionnelle et recouvre, tout à la fois, des dimensions politique, morale, économique, sociale et culturelle intimement liées, mais elle est avant tout politique et requiert une solution politique. Continuer à l’ignorer, c’est persister dans le déni des réalités et la fuite en avant et exposer notre pays à un risque de déstabilisation.»
Comme à son habitude, le parti et son leader font un bilan sans concession du «pouvoir en place», c'est-à-dire de Abdelaziz Bouteflika et du cercle présidentiel. Commentant, par exemple, les dernières initiatives politiques «pour une sortie de crise», en allusion à l’initiative du parti islamiste, le MSP, le parti dit regretter que «face à une opposition responsable, soucieuse de contribuer à une sortie de crise pour épargner à notre pays des dérapages aux conséquences imprévisibles, le pouvoir politique en place persiste dans le déni de la réalité et la fuite en avant, en niant l’existence même de l’impasse politique, repoussant toutes les initiatives des partis d’opposition, pour imposer son agenda, articulé, essentiellement, autour du maintien du statu quo.» Bien sûr, il est ici fait allusion, en des termes très clairs, à la campagne en cours, pour un cinquième mandat pour Abdelaziz Bouteflika.
On lit, juste après dans le même communiqué, que «face aux partis d’opposition qui s’efforcent d’enclencher un dialogue pour une sortie de crise qui est la priorité des priorités, le pouvoir politique en place tente de faire diversion en s’adonnant, à travers ses clientèles politiques, à une certaine agitation sur la scène politique pour donner une impression de normalité de la vie politique de notre pays et faire oublier le vide politique au sommet.»
A noter, au passage, que Benflis et son parti ont toujours insisté sur ce « vide politique au sommet», en allusion à la maladie de Bouteflika. «Dans leur attitude arrogante, poursuit le communiqué, les soutiens du pouvoir ne s’embarrassent même plus des formes, affirmant qu’ils sont déjà en campagne électorale, et ne donnent aucune place dans leurs projections à la volonté populaire.»
Ali Benflis, qui a déjà eu à rivaliser avec Bouteflika, comme sérieux concurrent aux présidentielles de 2004 et de 2014, n’a jamais épargné le cercle présidentiel. C’est le cas, également, dans sa sortie d’hier. Il écrit, à travers le même communiqué, en effet, que «l’Etat n’est plus l’Etat de tous les Algériens mais seulement l’Etat des clientèles politiques, économiques et sociales qui gravitent autour des centres de décision et lui donnent l’illusion qu’il est efficacement relayé dans toute la société».

«L’acte économique doit être dépolitisé»
Le parti de l’ancien chef de gouvernement ne manquera pas, non plus, de dresser un tableau tout aussi sombre, s’agissant de la situation économique du pays. «Le bureau politique (du parti, Ndlr) s’inquiète de la détérioration des indicateurs économiques et s’étonne de l’entêtement du gouvernement, enfermé dans ses certitudes que le recours à la planche à billets et la revalorisation relative et sans doute conjoncturelle des cours du pétrole constituent une parade à la crise économique.»
Pour le parti, le gouvernement Ouyahia continue à ignorer les mises en garde, nationales et internationales, et à «renvoyer à plus tard les réformes structurelles indispensables pour une solution durable à la crise économique, pour des raisons politiciennes mais également de crainte de heurter des intérêts économiques de puissants lobbies dont les fortunes colossales se sont constituées à l’abri de l’économie de rente et qui, aujourd’hui, sont partie prenante de la décision économique.» Le cas du projet du groupe Cevital à Béjaïa est cité comme étant «illustratif du degré de politisation de l’acte économique et la gestion antiéconomique de l’acte d’investir».
Talaie El Hourriyet considérera qu’il est absolument indispensable que «l’acte économique doit être dépolitisé».
Evoquant, par ailleurs, les dernières manifestations ayant eu lieu dans certaines wilayas du Sud, le parti de Benflis estime qu’elles sont légitimes. «Les manifestations récurrentes de nos concitoyens du Sud posent, inéluctablement, la problématique de l’équilibre régional en termes de développement économique et social.» Il ajoutera, dans sa lancée : «Ce ne sont pas les revendications pacifiques légitimes de nos concitoyens des wilayas du Sud qui peuvent déstabiliser le pays.
Ce qui peut déstabiliser le pays, c’est la corruption qui ronge l’appareil politico-administratif et la sphère économique. C’est la drogue qui étend ses tentacules aux différents niveaux d’institutions de l’Etat. C’est la mainmise des forces de l’argent douteux sur la décision économique. Ce sont les inégalités qui se creusent. C’est l’érosion du pouvoir d’achat du citoyen (…).»
Un véritable réquisitoire, en somme, contre la gouvernance globale et à tous les niveaux du pays.
K. A.

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