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BENJAMIN STORA AU SOIR D’ALGÉRIE : «Les héritiers des ultras de l’Algérie française n’ont jamais accepté l’indépendance»

Entretien réalisé par
Naoufel Brahimi El Mili
Le professeur d’histoire Benjamin Stora est officiellement chargé par le président de la République française, Emmanuel Macron, par une lettre de mission datée du 24 juillet dernier, de faire l’état des lieux sur la question mémorielle qui est au centre des relations franco-algériennes. Il faut rappeler que le Pr Stora conduit ce travail bénévolement et qui est au centre de l’essentiel de ces travaux. Une quarantaine d’ouvrages historiques qui couvrent tous les sujets liés à la colonisation, au mouvement nationaliste et à la guerre d’indépendance, sont à son actif. Il prend le temps de répondre à nos questions.

Le Soir d’Algérie : Depuis votre nomination pour conduire la mission de faire un état des lieux sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie, une incroyable polémique s’est déclenchée chez un courant idéologique en France. Comment allez-vous appréhender votre travail pour aboutir à un apaisement plus que nécessaire ?
Benjamin Stora :
Cette réaction de refus de regarder en face le passé colonial de la France n’est pas nouvelle. Malgré de nombreux travaux académiques anciens d’historiens français comme ceux, par exemple, de Charles-André Julien, Charles-Robert Ageron, Gilbert Meynier, ou René Gallissot ; malgré les combats citoyens livrés par des associations sur les disparus algériens de la guerre, contre les atteintes aux droits de l’Homme sur les immigrés
maghrébins ; les batailles contre le racisme de type colonial et sa persistance, cette position de valorisation du temps colonial ne disparaît pas. C’est toujours le même courant idéologique qui le porte, les héritiers des ultras de l’Algérie française qui n’ont jamais accepté l’indépendance.
Le simple fait de travailler pendant de longues années sur la partie algérienne de cette histoire (j’ai soutenu mon mémoire de maîtrise sur le nationalisme algérien sous la direction de René Rémond en… 1974 !) m’a valu les accusations de partialité, et aussi quand j’ai travaillé avec les grands historiens algériens comme Mahfoud Kaddache et Mohammed Harbi, pour établir mon Dictionnaire biographique de militants nationalistes algériens (600 biographies, livre publié en 1985).
L’accusation de partialité est tendancieuse car j’ai également travaillé sur le côté français, par exemple avec les biographies de Charles de Gaulle ou de François Mitterrand ; sur l’histoire des appelés, et sur les juifs d’Algérie, « indigènes » devenus français par le décret Crémieux de 1870.
La bataille pour la décolonisation des imaginaires est une entreprise de longue durée.

Le fort engagement du Président Emmanuel Macron vis-à-vis de cette question mémorielle, va-t-il aboutir à la formulation des excuses comme attendu par l’opinion publique algérienne ?
D’autres présidents français ont déjà condamné les massacres pendant la colonisation. Et de très nombreux travaux de chercheurs en France ont bien documenté cette séquence d’histoire, avec une grande publication d’ouvrages. Je ne sais pas si un nouveau discours d’excuses officielles suffira à apaiser les mémoires blessées, de combler le fossé mémoriel qui existe entre les deux pays. À mes yeux, il importe surtout de poursuivre la connaissance de ce que fut le système colonial, sa réalité quotidienne et ses visées idéologiques, les résistances algériennes et françaises à ce système de domination. C’est un travail de longue haleine que nous devons mener ensemble des deux côtés de la Méditerranée. Par les images et par les écrits, par des conférences et des échanges universitaires, pour transmettre aux jeunes générations, qui ne l’ont pas connu, la réalité de cette période. Pour éviter la répétition du passé.

Du côté algérien, le Président Abdelmadjid Tebboune a désigné le Dr Abdelmadjid Chikhi pour mener une mission similaire. Comment voyez-vous le déroulement de ce travail, éventuellement, en binôme ?
Dans la mission confiée par le Président français, Emmanuel Macron, je dois remettre un rapport faisant un état des lieux sur l’histoire des rapports entre la France et l’Algérie. Dans cette lettre de mission, il n’est pas question d’écrire une histoire commune de l’Algérie, mais d’envisager des actions culturelles sur des sujets précis, à déterminer, comme par exemple les archives ou la question des disparus. J’espère pouvoir m’entretenir avec le Dr Abdelmadjd Chikhi, pour évoquer ces questions, essentielles pour l’avenir des deux pays.
N. B.E-M.
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