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Forum des chefs d’entreprises (FCE) Sami Agli, un président aux dents de porcelaine

La quarantaine bien mise, un look homme d’affaires attaché-case respirant la réussite et la prospérité, c’est Sami Agli, élu lundi dernier président du Forum algérien des hommes d’affaires.
C’est que ce jeune entrepreneur ne manque pas d’ambition et ce poste de président du FCE il le voulait, quitte à bousculer l’establishment, voire l’ordre du cercle fermé des grands patrons. Mais qui est Sami Agli ? Né en 1978, à Biskra (450 km au sud d’Alger) et âgé de 38 ans, il est le P-dg du groupe familial Agli - créé en 1967 - qui active dans l'industrie agroalimentaire, la promotion immobilière, la construction, la distribution automobile, la logistique et le tourisme. Rien que ça ! Il fait ses études supérieures en France (Paris) et acquiert le master en gestion des chaînes d’approvisionnement et d’un master en business administration et management stratégique de la Weller International Business School. Au FCE, il fera partie des jeunes chefs d’entreprises Jil FCE. Optimiste, il reprend à son compte cet adage qui dit : « Un entrepreneur ne doit jamais s’arrêter après un échec, c’est la première étape vers la réussite.» C’est donc tout naturellement qu’il fait son baptême du feu dans l’entreprise familiale où, dit-on, régnait une forte émulation entrepreneuriale. Il intègre ainsi le groupe Agli et promeut l’exportation de la datte, produit agricole phare de la région. Ce n’est pas tout, puisqu’il s’implique dans les autres branches d’activité de la famille ce qui le mène à prendre la tête du groupe Agli. Sa maîtrise des enjeux économiques à ce niveau d’activité balise le terrain quant à se projeter dans une sphère beaucoup plus large et qu’il estime correspondre à ses capacités et à sa volonté d’apporter sa part dans l’Algérie de demain, déclarait-il. Le FCE est une maison qu’il connaît bien et son ambition le pousse à briguer un mandat à la tête du Forum. Mais, s’il y a unanimité à l’échelon familial, il en va tout autrement dans le cercle d’entrepreneurs aux acquis bien assis. Visiblement, ce n’est pas pour le décourager. Dans l’ordre établi, comment se frayer une place mais surtout attirer à lui les voix indispensables qui le mèneront au bout de ses rêves de grandeur ? Bien d’autres adhérents du FCE ont tenté leur chance pour prendre la tête de ce grand syndicat patronal. En vain. C’est le cas du patron d’Alliance Assurances qui, à deux reprises, a dû abandonner le challenge, la première fois au profit de l’inattendu Ali Hadda de l’ETRHB, aujourd’hui à l’ombre de la prison d’El-Harrach. Hacen Khelifati, face à la candidature de Sami Agli, lancera cette phrase péremptoire : « Suite à la démission du président par intérim et aux magouilles constatées autour du scrutin par les tenants du statu quo, je considère que ma place n’est plus dans cette élection. Je vais retirer ma candidature demain, et je quitte le FCE.» C’est qu’avant lui, Moncef Othmani, président par intérim après la démission d’Ali Haddad, avait claqué la porte et avait dénoncé le climat délétère ambiant entourant le scrutin. Moncef Othmani affirme avoir fait l’objet d’une « campagne diffamatoire d’une rare violence par certains vice-présidents aux objectifs inavoués visant à maintenir leur mainmise sur le FCE comme par le passé ». « L’un d’entre eux, dit-il, a porté atteinte à ma dignité en proférant des insultes à mon endroit et en me menaçant physiquement. Tout ceci en présence de témoins membres du Forum », déplore le président démissionnaire. Le premier couac aura lieu avec Sami Agli justement qui l’accusera d’être partial dans l’enregistrement des candidatures au poste de président du FCE. Dans cette guerre qui ne dit pas son nom, le fils de Biskra aura le dernier mot ce lundi 24 juin. Il sera ainsi, selon ses propres vœux, intronisé pour quatre ans, durée du mandat. Il faut dire que le contexte dans lequel se débat le Forum des chefs d’entreprises est très largement impacté par les bouleversements en cours dans tout le pays induit par le gigantesque mouvement populaire de contestation du système. Ali Haddad sera parmi les premiers à abandonner le navire qui prend eau de toutes parts. Il sera suivi par les vice-présidents.
Alors que du temps de Rédha Hamiani, le FCE, créé en 2000, tentait autant que faire se peu d’assurer, ce qui lui vaudra d’ailleurs son éviction, le natif d’Azzefoun le livrera pieds et mains liés à la fratrie Bouteflika. Pis, les différentes réunions de la tripartite UGTA-gouvernement-FCE ne feront que confirmer l’alignement sans réserve du Forum. Les accointances d’Ali Haddad avec le frère du Président feront le reste. Ainsi, le FCE deviendra un appendice de la présidence et tous les patrons adhérents s’aligneront sur ses quatre volontés. L’accès à la rente pétrolière remplacera toute recherche, certes ardue, d’autres sources de financement de leurs projets. Et bien sûr, il faudra montrer patte blanche quant au financement des différentes campagnes électorales du candidat-Président Abdelaziz Bouteflika. Hors de cette « moubaya3a » point de salut ! Ali Haddad aura laissé un FCE complètement perverti où règnent corruption et clientélisme. Charpente essentielle de l’économie du pays, le privé perd sa raison d’être originelle qui est l’effort continu dans la création de richesses. Aujourd’hui, force est de constater le désastre des entreprises défaillantes ou en faillite avec son lot de familles entières livrées à l’incertitude des lendemains qui déchantent. Sami Agli intervient donc dans ce contexte des plus négatifs pour les activités industrielles tous secteurs confondus. Certes, il a pour lui la force de la jeunesse, mais un immense pays comme l’Algérie n’est pas une supérette. Il faut, pour utiliser une métaphore, des bras et des forces herculéens. Quelle est la riposte la plus appropriée à opposer à la crise économique, parlant de la contribution des patrons d’entreprises ? Sami Agli aura-t-il les épaules assez larges pour espérer réussir là où d’autres avant lui voyaient fuir devant eux les belles opportunités de tirer l’économie du pays vers le haut ? Programme ou feuille de route, c’est déjà dans les plans du nouveau boss du FCE. Aucun bilan des précédentes présidences n’a été présenté. Quelles sont les « erreurs de fond » commises relevées par Sami Agli ? Il affirme que son premier engagement est de rendre le Forum apolitique, estimant que «l’exercice de la politique devrait se faire en dehors de l’organisation et sans l’utilisation des moyens de cette dernière».
Dans son programme, il s’engage pour «la valorisation des grandes entreprises, la décentralisation et l’amélioration de la collaboration avec les délégations locales du Forum, ainsi que l’accompagnement des PME/TPE et la dynamisation de Jil FCE, considéré comme l’un des plus importants acquis de l’organisation». Le Forum des chefs d’entreprises (FCE), association à caractère économique, compte 400 membres, 7000 entreprises et 40 000 travailleurs. Créée par des chefs d’entreprises, son but est de contribuer à l’instauration de l’esprit d’entreprise au sein de l’économie nationale et de promouvoir les intérêts de l’entreprise algérienne.
A l’heure de la descente aux enfers quant à la raréfaction des revenus et la raréfaction des fonds devises, l’heure n’est plus aux bonnes paroles et autres promesses don on nous a abreuvés depuis des décennies. Les entrepreneurs, tous les entrepreneurs, grands et petits, reçoivent de plein fouet les revendications du Hirak. Sauront-ils les capitaliser ? Sami Agli saura-t-il transcender les contradictions d’un autre temps, qui font tanguer le Forum ? Les défections ne sont pas négligeables et les oppositions non plus. Que fera-t-il, lui qui a l’ambition de soustraire le FCE aux contingences et aux aléas de la politique sans oublier qu’il y a gros à faire dans l’assainissement du climat des affaires des plus détestables dans notre pays ? Saura-t-il, enfin, faire du Forum des chefs d’entreprises cette vitrine pleine d’attractivité aussi et surtout pour les investisseurs étrangers ?
Brahim Taouchichet
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