Actualit�s : Farouk Ksentini, Benchicou et les rapports presse/pouvoir

Les propos de Farouk Ksentini sur l’incarc�ration de Mohamed Benchicou et de fa�on g�n�rale sur la libert� de la presse et la situation des droits de l’homme annoncent-elles un revirement du pouvoir politique sur ces questions ? Une chose est s�re, les d�clarations du pr�sident de la Commission consultative, institution officielle, ont certainement re�u le feu vert des plus hautes autorit�s. M. Ksentini n’est pas du genre � faire cavalier seul sur des sujets aussi sensibles.
En effet, il a dit deux choses qui ont retenu l’attention. D’une part : “les choses vont dans le bon sens. Je suis confiant qu’une solution soit trouv�e � ce probl�me de la presse ainsi qu’� celui de la crise de Kabylie dans les plus brefs d�lais (...) il faut trouver une solution qui garantisse aussi bien le droit du journaliste que celui des personnes” et, d’autre part, qu’il ne “comprend pas comment M.Benchicou, qui a scrupuleusement respect� les conditions de sa mise sous contr�le judiciaire, a �t� mis brutalement sous mandat de d�p�t”. Ajoutant que “l’Alg�rie a fait l’objet de beaucoup de critiques � l’ext�rieur sur cette affaire”. Avant de l�cher qu’ “aucune d�mocratie n’est possible sans la libert� d’expression”. Le harc�lement et l’emprisonnement de journalistes sont en effet tr�s mal per�us � l’�tranger. Dans le classement mondial de la libert� de la presse, l’Alg�rie est class�e � la 128e place sur 167, derri�re le Maroc (126e), et surtout des pays africains comme l’Afrique du Sud (26e), le B�nin ( 27e) ou le Mali et le Ghana (56e et 57e place). Ce classement peu reluisant de l’Alg�rie dans le carr� des 50 pays les plus mal class�s n’est pas de nature � redorer l’image du pouvoir politique � l’�tranger. Il confirme cependant le rapport �tabli par le PNUD 2003 sur l’�tat alarmant de la presse et des libert�s en Alg�rie et dans les pays arabes. D’autant qu’� l’�tranger, ils sont unanimes � dire que Mohamed Benchicou a �t� condamn� � cause de ses �crits ! Nul doute que le pr�sident de la Commission consultative des droits de l’homme, nomm� par le chef de l’Etat, qui n’a pas pour habitude de s’engager dans un domaine aussi sensible, a pris connaissance de ce qui se dit et s’�crit sur l’Alg�rie � l’�tranger. Et qu’un jour ou l’autre, la question du respect de la libert� d’expression et des droits de l’Homme finira par rattraper l’Alg�rie comme cela s’est pass� pour d’autres pays. Aussi, il est permis de penser que le pr�sident de la Commission consultative s’efforce de tirer la sonnette d’alarme afin que cette question soit r�gl�e par les Alg�riens et non sous la pression de l’�tranger. Apr�s ces d�clarations, la question est de savoir si elles sont l’annonce d’un r�examen des rapports presse/pouvoir dans le bon sens. Car un simple examen de la situation montre � l’�vidence un net recul des libert�s en Alg�rie. Depuis le durcissement du code p�nal en mati�re de diffamation, suivi par une s�rie de harc�lements � l’endroit des journalistes et d’une s�rie de proc�s � l’endroit de Mohamed Benchicou et des responsables de journaux ind�pendants, l’Alg�rie n’a rien � envier � ces r�gimes arabes �pingl�s par les ONG des droits de l’Homme et qui pr�textent du non-r�glement de la question palestinienne pour refuser toute r�forme politique tel que pr�conis� par l’initiative am�ricaine du Grand Moyen-Orient arabe. Certes, les USA n’ont pas de le�ons � donner en ce domaine aux pays arabes. Mais, dans le cas de l’Alg�rie, force est de constater que si le pouvoir veut �tre cr�dible et entendu sur la sc�ne internationale, il ne suffit pas d’affirmer qu’il a entrepris des r�formes politiques et que la libert� d’expression est respect�e. Pour que ce soit le cas, � l’heure o� le minist�re de la Communication planche sur un nouveau code de l’information, il faudrait qu’il commence par donner un signal fort en direction de la profession, � savoir la mise en libert� de Mohamed Benchicou comme l’a souhait� M.Farouk Ksentini et, partant, mettre fin aux harc�lements judiciaires � l’endroit de la presse. Un tel geste aura pour l’Alg�rie des r�percussions positives sur la sc�ne internationale parce que tant que le directeur du Matinrestera en prison, tant que des responsables de journaux et des journalistes sont tra�n�s devant la justice pour des faits qui ne m�ritent au plus qu’un simple d�menti, tant que les libert�s ne sont pas respect�es et, tant qu’il n’y aura pas d�p�nalisation des d�lits de presse, l’Alg�rie figurera dans le triste peloton des pays ne respectant pas la d�mocratie et les droits de l’Homme. Etre fier de son pays � l’�tranger, c’est �tre fier de son pass� fait de r�sistance mais aussi et surtout de pouvoir dire que l’Alg�rie n’est pas un Etat policier. Hassane Zerrouky Journaliste-�ditorialiste au Matin, ancien r�dacteur en chef du Matin, membre du Comit� pour la libert� de la presse en Alg�rie

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