Actualit�s : La m�moire revisit�e

Neuf ans, est-ce assez pour panser des blessures ? Est-ce le temps qu’il faut pour oublier ou est-ce si lointain pour justifier l’amn�sie ? Trop subjective, la r�ponse d�pend du v�cu de chacun. Trop lourd, le traumatisme est g�r� en fonction du v�cu des uns et des autres.
Seule certitude : la bombe qui a ravag� les locaux du Soir d’Alg�rie, arrach� � la vie trois de ses journalistes, fait partie de l’histoire du quotidien de ceux qui le faisaient � l’�poque mais aussi de ceux qui sont arriv�s par la suite. Difficile d’y �chapper. Impossible de ne pas y penser. Ces lieux, aujourd’hui retap�s, mieux �quip�s, portent l’ind�l�bile empreinte de ce qui s’�tait produit ce 11 f�vrier 1996. Et ce n’est pas uniquement gr�ce aux portraits des martyrs accroch�s dans le couloir du Soir. Certes, c’est la premi�re chose qui attire le regard en p�n�trant dans la r�daction. Il se d�gage de ces cadres soigneusement accroch�s par ammi Bachir une impressionnante s�r�nit� : celle des gens partis confiants que leur combat n’a pas �t� vain. Le temps leur donnera-t-il raison ? Il appartient � tous de cultiver le souvenir de lutter contre une ambiante tendance � oublier, � ne plus se souvenir. Allaoua A�t Mebarek, r�dacteur en chef, Mohamed Dorbane, chroniqueur, Djamel Derraza, journaliste : des noms familiers pour les lecteurs. Des signatures qui, � cause de la b�tise humaine, ont cess� d’�tre. Derri�re chacun d’entre eux, une vie, une histoire. Ceux qui les ont connus en parlent avec beaucoup de tendresse, d’�motion. Les autres, tr�s nombreux, qui ne les ont pas connus ont fini par les apprivoiser. Lorsque Nabil, Na�ma ou Kamel parlent d’eux aux “bleus”, ils �coutent, replong�s dans cette atmosph�re d’horreur. Le bruit assourdissant de l’explosion, le sang, les larmes…. Sans l’avoir v�cu, ils ressentent cette douleur, compatissent… Des personnes disparues, les “anciens” ne retiennent n�anmoins pas que ce douloureux �pisode. Ils parlent avec nostalgie de cette �poque, de l’ambiance qui r�gnait, des interminables discussions… de cette p�riode o� il n’y avait pas de disputes pour les micros pour la simple raison qu’ils n’avaient pas encore fait intrusion dans la r�daction. Un coin de table, une pile de papier bifteck faisaient leur bonheur. Les n�ojournalistes seraient-ils plus exigeants ? Condescendants, les “vieux” comprennent cette g�n�ration sans se d�partir des souvenirs du bon temps pass�. Des souvenirs souvent provoqu�s par la curiosit� des nouveaux venus. Comment avez-vous v�cu cette journ�e ? Qu’avez-vous ressenti ? Vous en remettez-vous ? Rien � voir avec le voyeurisme, mais lorsqu’on n’a pas v�cu ce triste jour et qu’on arrive dans la r�daction du Soir, impossible de ne pas poser ces questions. Envie de savoir, de s’impr�gner ou peut-�tre de s’int�grer aussi. L’histoire ce n’est pas un luxe, mais une n�cessit�. Avoir conscience que dans ces locaux, des journalistes ont pay� de leur vie, c’est imp�ratif. Certes, on n’y pense pas forc�ment tous les jours mais au fond de chacun de ceux qui, tous les jours franchissent le pas de la porte, ce souvenir est l�, inalt�rable. Et la r�alit� prend une tout autre dimension. En tant que lecteurs, on peut �tre r�volt�, chagrin� � la vue des macabres Unes qui annon�aient � l’�poque le drame. Une fois partie prenante de la confection du journal, la r�volte c�de la place � la d�termination. Pour ceux qui sont partis, ceux qui sont l� et qui l’ont v�cu dans leur chair mais aussi pour ceux qui viendront � l’avenir, la culture du souvenir doit plus que jamais �tre entretenue… Et ce n’est pas seulement la mission des anciens…
Nawal Im�s

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