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Al-Maghar et sa folle rumeur


Par Ahmed HALLI halliahmed@hotmail.com
Rafik Hariri �tait l’ami de tout le monde, il jouissait de l’estime des faibles et des puissants. Il a investi une partie de sa fortune dans des projets de d�veloppement au Liban et dans d’autres pays de la r�gion. Le monde entier voyait en lui l’artisan du redressement libanais.

Ses efforts financiers et son action � la t�te du gouvernement du Liban ont fait de lui un personnage incontournable. Sans en avoir l’air, il s’affirmait comme le leader d’une opposition de plus en plus r�solue � l’occupation syrienne. Hariri n’avait pas le style rugueux et vindicatif d’un Walid Djoumblatt, plus rompu aux renversements d’alliances. C’est d’ailleurs l’ancien alli� de Damas, le druze Djoumblatt qui semblait vou� � l’�limination. Son plus proche collaborateur, Marwan Hamade, avait �chapp� de justesse � un attentat � la voiture explosive le 1e octobre dernier. Le nouveau chef des services de renseignement militaires syriens, Assaf Chawkat, aurait d’ailleurs t�l�phon� � Walid. Il lui aurait dit simplement ceci : "Regarde par la fen�tre, tu pourras voir la tombe de ton p�re"(1). C'est d'ailleurs Assaf Chawkat, accessoirement beau-fr�re de Bechar Al-Assad, qui est d�sign� nomm�ment comme chef du complot par le journal kowe�tien Al-Siassa. Selon le quotidien, trois hommes auraient planifi� et ex�cut� l'attentat contre Hariri. Outre Chawkat, le journal cite Bahdjat Suleiman, responsable de la s�curit� d'Etat, et Djamil Al-Sayed, directeur g�n�ral de la s�ret� libanaise. Ce dernier, pr�cise Al-Siassa, est connu pour sa suj�tion absolue � Damas. Autre d�tail, Assaf Chawkat a �t� promu au grade de g�n�ral et � son nouveau poste une demi-heure apr�s l'annonce du d�c�s de Hariri. On sait, d'autre part, que Bechar Al-Assad, aurait promis � Hariri de lui "briser le cou". Quant au ministre libanais de la Justice, il s'est empress� de lancer une enqu�te internationale sur une douzaine de Libanais qui ont quitt� Beyrouth apr�s l'attentat contre Hariri. Six d'entre les suspects barbus et "gandouris�s" comme il se doit (2), ont pris l'avion, eux, pour Sidney. C'est l� que le quotidien de Londres Echarq-Al-Awsat les a retrouv�s et interrog�s. Bien s�r, ils protestent de leur innocence et se disent pr�ts � se soumettre � toute enqu�te sur le sujet. Prudent, le journal saoudien ne d�signe pas la Syrie mais il fait en sorte de supprimer les autres pistes qui ne m�nent pas � Damas. Alors que l'opposition libanaise se d�cha�ne contre la Syrie, les m�dias libanais semblent �trangement timor�s. Al- Nahar se contente de cette titraille implicite : "Bush r�clame une enqu�te internationale et demande � la Syrie de retirer ses troupes – Djoumblatt interpelle Damas: "Pourquoi avez-vous inculqu� au peuple libanais la haine de la Syrie?" La palme revient incontestablement au quotidien londonien Al-Arab. Dans le sondage que propose sa version �lectronique, la question est la suivante : "Les accusations se multiplient au sujet de l'assassinat de Rafik Hariri. A votre avis qui est derri�re ce crime?". Le journal propose quatre "coupables" possibles : Isra�l, la Syrie ou des parties libanaises, des services secrets occidentaux, Al- Qa�da. Les r�sultats du sondage donnent pour le vendredi 18 f�vrier : Isra�l : 48,8%, la Syrie : 26,8%, des services occidentaux : 19,7%, Al-Qa�da : 4,7%. Le lendemain, samedi, renversement de tendances : la Syrie tient la corde avec 42,7% suivie d'Isra�l 34, 3 %. Mais dans le tableau que publie Al-Arab, c'est toujours Isra�l qui figure en t�te. Ce qui est de bonne guerre, pourrait-on dire, Isra�l a la conscience tellement charg�e qu'il peut bien rendre ce service aux dirigeants arabes d'endosser leurs crimes et leurs assassinats. C'est tout de m�me gr�ce � l'Etat sioniste que nombre de r�gimes se reproduisent et s'�ternisent. "Il est curieux que l'on cherche � absoudre la Syrie et � incriminer Isra�l dans l'assassinat d'un homme qui �tait pr�sent� il y a peu comme l'homme des Etats-Unis et de la France, voire celui d'Isra�l", observe le penseur tunisien Lakhdar Afif dans le magazine Elaph. C'est paradoxalement en Palestine qu'on cherche le moins � impliquer les occupants dans les querelles et les haines qui d�chirent les Palestiniens. En t�moignent ces faits rapport�s par l'hebdomadaire palestinien Kol-Al-Arab et qui t�moignent de la pr�carit� des minorit�s confessionnelles au Proche-Orient. Cette histoire qui pourrait s'intituler "la rumeur de Almaghar" illustre aussi les d�g�ts que peut causer la rumeur dans certains milieux. L'hebdomadaire a cherch� � savoir comment cette paisible localit� de Cisjordanie s'est transform�e en th��tre d'�meutes et des destructions le vendredi 11 f�vrier dernier. Des biens appartenant � des chr�tiens ont �t� incendi�s. 40 voitures, 20 maisons et 25 locaux commerciaux ont �t� r�duits en cendres par des hyper-excit�s. A cause d'une folle rumeur propag�e par un mineur druze de 16 ans, identifi� par la suite, 200 habitants chr�tiens du village ont fui vers d'autres localit�s. Cette rumeur disait qu'un photographe chr�tien se proposait de mettre sur Internet des photos montages de jeunes filles druzes les montrant nues. Comme s'ils n'attendaient que ce pr�texte, les Druzes se sont d�cha�n�s contre les biens immobiliers sans attenter toutefois � leurs vies. Le propagateur de la rumeur a avou� par la suite qu'il avait invent� cette histoire pour se venger d'un email insultant que lui avait envoy� un chr�tien. Comble de stupidit�, il s'est trouv� au moins quatre t�moins pour dire qu'ils avaient vu les photos litigieuses de leurs propres yeux. Un po�te local, cit� par l'hebdomadaire, affirme que cette histoire n'est que l'�tincelle qui a mis le feu aux poudres. Il existe, dit-il, un ressentiment profond entre les deux communaut�s, chacune accusant l'autre de ses propres malheurs. Kol-Al-Arab fait remonter � 1982 des incidents similaires mais de moindre gravit� entre chr�tiens et Druzes. Il estime que ces destructions et cette nouvelle pouss�e de violence ont cr�� entre Druzes et chr�tiens une plaie b�ante qui mettra du temps � se r�sorber. Le journal se garde bien de mettre en cause l'occupation isra�lienne m�me s'il n'h�site pas � d�noncer la passivit� de la police. Celle-ci, vite d�bord�e, a pr�f�r� quitter les lieux, selon un t�moin qui affirme que les assaillants �taient arm�s et tr�s nombreux. Ce sont des rumeurs semblables qui ravivent r�guli�rement la violence entre musulmans et coptes d'Egypte. Sauf que le traitement par les journaux n'est pas le m�me quand ce ne sont pas les m�dias qui propagent la rumeur ou attisent l'incendie. Nesrine Barwari ne peut pas impliquer la rumeur dans la campagne que m�nent contre elle les associations f�minines du Kurdistan. Elle est bel et bien coupable d'avoir mis ses id�es sous le boisseau en acceptant la polygamie qu'elle combattait il y a � peine un an. Nesrine Barwari, membre dirigeant du Parti d�mocratique kurde, a adh�r� � la polygamie en payant de sa personne. Elle est devenue la seconde �pouse du pr�sident actuel de l'Irak, Ghazi Al-Yawer. Qu'elle pr�ne le partage du pouvoir entre Kurdes, sunnites et chiites, d'accord. Mais les maris? D�cid�ment, tout peut arriver en Irak. Nesrine en est la preuve.
A. H.

(1) Kamel Djoumblatt, le p�re de Walid, a �t� assassin� le 16 mars 1977 par les services secrets syriens.
(2) tous ceux qui ont subi de pr�s ou de loin le terrorisme islamiste savent que lorsqu'il s'agit d'un attentat cibl�, les "fr�res" ne se pr�sentent pas barbus et en kamis. Ils s'habillent plut�t � l'europ�enne pour ne pas �veiller les soup�ons.

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