Panorama : PARLONS-EN
Pauvres malgr� nous
Par Malika BOUSSOUF malikaboussouf@yahoo.fr


Les r�serves en hydrocarbures, actuellement seule garantie de survie pour les Alg�riens, seront exploit�es par des entreprises �trang�res et donc hypoth�qu�es. De l� � percer le myst�re du pourquoi de leur nationalisation il y a plus de 30 ans et du retour aujourd’hui sur cet acte hautement symbolique de l’ind�pendance et de la souverainet� alg�riennes, il y a un empan que beaucoup n’oseront pas franchir.
On ne pourra pourtant pas, en cas de catastrophe, nier la mise en garde d’experts alg�riens sur le danger qui menace le pays, lequel, d�lest� de la seule assurance qu’il avait jusque-l� de pr�server sa solvabilit� et sa dignit�, ne pourra plus rien pour ses enfants. Le chef de l’�tat regrette que les r�formes soient impos�es par les puissances �trang�res et que nous n’ayons pas d’autre choix que de nous soumettre � leurs injonctions si nous ne voulons pas subir le m�me sort que l’Irak. Pourquoi pr�tendre alors que l’Alg�rie est un pays libre de d�cider de son devenir et depuis quand un pays qui refuse d’ali�ner ses richesses s’expose-t-il aux foudres du premier gendarme du monde ? Les �tats-Unis d’Am�rique n’ont-ils pas justifi� l’occupation de l’Irak par l’urgence d’y instaurer la d�mocratie ? L’argument vaut ce qu’il vaut, il reste celui avanc� officiellement par “notre ami” Georges Bush. La situation dans ce pays n’�tant, en outre, en rien comparable � celle qui pr�vaut en Alg�rie, on voit mal comment refuser de brader nos ressources nous exposerait � pareille boucherie. On pourrait, par contre, s’aventurer � �mettre quelques hypoth�ses relatives au comportement de nos dirigeants face aux pressions ext�rieures. C�der aux ordres des puissants de ce monde, se soumettre au plan �conomique, pourrait dispenser d’avoir � rendre des comptes sur les pratiques tr�s discutables de la d�mocratie et des droits de l’homme, sur les abus de pouvoir, le musellement de l’opposition et l’�touffement des libert�s. Pendant ce temps et malgr� d’�parses oppositions, les augmentations des charges vont bon train. Doucement mais s�rement, elles sont inject�es � petites doses : 2 % pour l’�lectricit� par-ci, 5% pour le gaz par-l�, tout est �tudi� pour �viter qu’il n’y ait trop de foyers de tension. Mais de tensions il n’y en aura point ou si peu �tant donn� l’unanimisme qui r�gne au sein de la classe politique dont de nombreux acteurs semblent avoir opt� pour le silence comme mode d’opposition et choisi ainsi de se taire pour marquer leurs distances vis-�-vis du pouvoir. Que pourront donc faire avec toute la bonne volont� du monde les Ghozali, Benbitour, Malti, le Parti des travailleurs, et les quelques autres qui leur ont embo�t� le pas face � une centrale syndicale au garde-�-vous et une soci�t� civile incapable de brasser large pour faire barrage au bradage en r�gle des richesses du pays, au renoncement � la souverainet� nationale et � l’appauvrissement des populations. Les puits sont en territoire alg�rien. Le p�trole qu’ils renferment n’appartiendra bient�t plus aux autochtones mais aux �trangers qui l’exploiteront et Chakib Khelil ne parle plus que d’investissements futurs ! L’effondrement du pouvoir d’achat n’int�resse pas notre ministre de l’Energie, sa protection ne rel�verait pas d’une mission purement technique mais de celle de partenaires sociaux. Satisfait d’avoir enfin remport� la partie en ralliant le chef de l’�tat � sa cause, l’homme du pr�sident s’est �galement mis dans la poche la toute puissante UGTA, l’Ex�cutif au complet et les deux chambres du Parlement ; la mode �tant au suivisme et � l’ob�issance. Sidi Sa�d semble rass�r�n�. Il aurait, manifestement, bonne conscience puisque les concepteurs de la loi sur les hydrocarbures l’ont assur� des retomb�es positives de cette derni�re qui n’entamerait en rien le pouvoir d’achat des Alg�riens ni ne menacerait la s�curit� de l’emploi. Cela aurait m�me suffi � le convaincre du bien fond� de celle-ci. Pourquoi n’explique-t-on pas plut�t aux Alg�riens combien les richesses du sous-sol rapportent aujourd’hui au pays et ce qu’elles vont g�n�rer comme “profits’’ demain lorsqu’elles seront confi�es � des firmes �trang�res ? Un silence �loquent �touffe la r�ponse. Sidi Sa�d n’aurait-il pas �t� plus avis� d’exiger qu’une partie des r�serves de change — autour de 50 milliards de dollars — serve � renflouer les entreprises publiques en difficult�, permettre leur mise � niveau et leur �pargne d’�tre vendues aux ench�res ou c�d�es au dinar symbolique au lieu de s’engager sur un terrain dont il ne parait ma�triser aucun des contours ? Pourtant, quand des sp�cialistes de la question nous affirment que l’Alg�rie sera bient�t d�pouill�e de 80% de ses rentes actuelles, on ne doute pas que la catastrophe soit assur�e. Inutile d’attendre des travailleurs qu’ils se mobilisent. Ils ne le feront pas puisqu’ils n’existent pas en dehors d’une centrale omnipotente qui donne son avis et son aval en leur nom sans avoir au pr�alable jug� utile de leur expliquer en quoi cette nouvelle loi “contribuera � l’am�lioration des performances de l’�conomie nationale et du bien-�tre du citoyen”. Sidi Sa�d et la f�d�ration des p�troliers ne nous expliqueront pas non plus pourquoi ils avaient menac� de paralyser le pays il y a deux ans de cela pour les m�mes propositions, ni pourquoi ils se sont entre-temps ravis�s donnant leur b�n�diction � une d�nationalisation qui, � en croire les experts, mettra � genoux le monde du travail et donc le pays tout entier. La vocation d’un syndicat n’�tant pas de soutenir un pouvoir mais de n�gocier avec lui au coude-�-coude, voire m�me de le contrarier en s’opposant � lui, on comprend mieux pourquoi l’UGTA est plus per�ue comme un appendice du pouvoir que comme un adversaire ayant pour seule philosophie la d�fense et seulement la d�fense des int�r�ts des salari�s. Le chef de l’�tat, lors de son intervention le 23 f�vrier dernier � la Maison du peuple, s’�tait engag�, lui aussi, � ne rien faire sans l’assentiment des travailleurs. Il n’a pas respect� sa promesse. Il s’est content� de l’approbation du secr�taire g�n�ral du seul syndicat reconnu publiquement et officiellement par lui. Et dire que pour un pays riche en la mati�re, des communes � peine situ�es � la p�riph�rie d’Alger ne sont pas desservies en gaz naturel ! Ne parlons pas de ces villes du Sud implant�es autour de puits qui ne jouissent m�me pas des bienfaits de cette ressource ! Le complot, si complot il y a, n’est pas venu d’ailleurs mais de l’int�rieur m�me des institutions. Ce sont elles et non l’ext�rieur qui soutiennent que la r�forme vise l’am�lioration des performances de nos entreprises et ne constitue aucun danger pour elles. Et puisque tout se fait dans l’indiff�rence quasi g�n�rale, � quelques exceptions pr�s, les impuissants que nous sommes attendront de voir comment les pouvoirs publics se tireront d’affaire quand l’ali�nation fera ressentir ses premiers effets tels que celui de ne pas g�n�rer de revenus suppl�mentaires � l’�tat et de ne pas cr�er de nouveaux postes d’emploi.
M. B.

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