Actualit�s : Le sommeil du juste
Par Ma�mar Farah


�Le nombre de jours qu’il me reste � vivre, seul Dieu le sait. Mais quel que soit le point de la course o� le terme m’atteindra, je partirai avec la certitude chevill�e que quels que soient les obstacles que l’histoire lui apportera, c’est dans le sens de la lib�ration que mon peuple — et avec lui, les autres — ira.
�L’ignorance, les pr�jug�s, l’inculture peuvent un instant entraver ce libre mouvement, mais il est s�r que le jour in�vitablement viendra o� l’on distinguera la v�rit� de ses faux semblants. Tout le reste est litt�rature.� (Mouloud Mammeri)
En ce jour historique, les fr�res ennemis qui continuent de se livrer une bataille injustifi�e sur le sol de cette Kabylie d�sireuse d’unit� et de paix pourraient �tre aveugl�s par la haine et manquer de voir la r�alit� en face. Pourtant, leur querelle de clocher ne p�se pas lourd devant les int�r�ts vitaux de cette r�gion et il serait vraiment dommage de rater encore une fois la chance historique qui s’offre � eux de r�aliser enfin les r�ves de Mouloud Mammeri et de Massinissa Guermah. Massinissa justement, ce h�ros tax� de voyou par certains, oubli� par d’autres, et qui vient de se r�veiller d’un long sommeil. Celui du juste sur cette colline qui ne sera plus jamais oubli�e ; pour dire � ceux qui se perdent dans les labyrinthes de la politique politicienne, s’il vous pla�t, arr�tez ! Arr�tez pour bien vous impr�gner de la solennit� et de la port�e capitale de ce moment d’histoire. Ouyahia, l’homme des paradoxes et des contradictions, n’est pas venu ici en fils de la r�gion, ni en chef d’un parti qui ne sait plus o� se trouvent les points cardinaux � force de tourner comme une girouette. Il est l� au nom de cet Etat qui a �t� si injuste avec vous ! Il est l� au nom de ces institutions qui vous ont longtemps ignor�s, qui vous ont r�prim�s et brim�s, qui ont m�me tu� ! Il est l� pour dire �Pardon� dans un geste d’une symbolique qui n’�chappera pas aux sages des �Djema� et � tous les patriotes kabyles. A ceux qui refusent ce geste et qui ont certainement des arguments � faire valoir pour justifier leur refus du dialogue et rejeter tous les gestes de l’Etat, il est inutile de faire des proc�s gratuits. A leur d�charge, il faut reconna�tre que l’Etat alg�rien s’est trop jou� d’eux, a souvent dit une chose et son contraire, n’a pas toujours tenu ses promesses. Mais, pour une fois, les regards obliques de ces fi�res montagnes charg�es d’histoire et de bravoure, pourraient s’habiller d’un tout petit peu de cet espoir qui les fuit toujours. Pour une fois, les m�res �plor�es pourraient s�cher leurs larmes. Pour une fois, les jeunes qui raconteront � leurs enfants qu’ils ont march� h�ro�quement sur Alger un certain 14 juin pourraient enlever les bandeaux noirs et jeter les pierres avec lesquelles ils ont vaillamment lutt� contre les mitraillettes. R�veillez-vous � la vraie r�conciliation des fr�res et chassez les germes politiciens qui gangr�nent vos cœurs. Dans l’absolu, rien ne devrait diviser Bela�d Abrika, l’homme qui a men� sa tribu vers la lumi�re sans renier ses valeurs et Gherbi Ali, ce militant sinc�re qui d�fend les m�mes valeurs, mais avec sa propre vision des choses. La Kabylie aura raison de se m�fier des tours de passe-passe des magiciens qui nous gouvernent. Mais, elle ne saurait ignorer la haute symbolique du geste de M. Ouyahia et, � travers lui, de l’Etat alg�rien. Une page nouvelle s’ouvre devant les fils de cette r�gion. Mais rien ne dit qu’elle sera plus belle et plus prometteuse que la pr�c�dente si les luttes intestines et les d�m�l�s continuent de miner le mouvement citoyen kabyle. Enfin, pour nous, signataires d’une p�tition � El Moudjahid pour d�noncer la mani�re dont notre journal avait rapport� les faits en avril 1980 et apporter notre modeste soutien au Printemps berb�re naissant, pour ces dix-huit journalistes qui ont os� un jour, ce 18 avril 2005 est certainement l’un des plus beaux de notre vie. Il prouve que nous avions raison de d�chirer le silence et la peur il y a 25 ann�es d�j�. Les Benchicou, Ourabah, Hamouni, Belhouchet, Amazit, Dzanouni et d’autres dont j’oublie les noms ont de quoi �tre fiers aujourd’hui. Surtout Benchicou.
M. F.



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http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2005/04/19/article.php?sid=21980&cid=2