R�gions Est : BATNA/FORETS
Supplique pour le c�dre


Depuis des ann�es, on n’a pas cess� de r�p�ter que le c�dre est menac� de mort. D’o� vient cette menace sur cet arbre majestueux et par-l� m�me sa s�r�nit� dans son aire naturelle � travers le monde en g�n�ral et en Alg�rie en particulier.
Houadef Mohammed Batna (Le Soir) - Le c�dre (genre cedrus), essence essentiellement montagnarde se rencontre en quatre esp�ces cedrus atlantica Manetti, en Alg�rie et au Maroc, cedrus Libani Barell au Liban, Syrie et Turquie, cedrus Brevifolia Henry en Chypre et Cedrus d�odora London en Inde et Afghanistan. Parmi ces quatre esp�ces, notre int�r�t se portera sur la premi�re commun�ment appel�e c�dre de l’Atlas arz en arabe et bignoun, Idghel en berb�re, �minemment forestier, sp�cifiquement m�diterran�enne et spontan�e en Alg�rie. C’est un arbre mono�que tr�s remarquable, � port droit pyramidal qui prend la forme tabulaire en veillissant, ce qui lui permet d’�tre class� parmi les plus beaux plants d’ornement. Le c�dre de l’Atlas est une essence plastique, occupant plusieurs r�gions avec des �tages bioclimatiques ne poussant qu’� des altitudes allant de 1300 et 1500 m et peut remonter jusqu’� 2000 m. Sa station optimale est entre 1500 et 1850 m�tres. Son aire naturelle s’�tend en Alg�rie au Djurdjura, Aur�s, Hodna, Babor, Atlas blid�en et Ouarsenis (33 000 hectares) et au Maroc au Rif, au Moyen Atlas et Grand Atlas oriental (120 000 hectares). En Alg�rie le c�dre de l’Atlas couvre-t-il r�ellement 33.000 hectares ? Le massif le plus important est celui des Aur�s qui, selon les statistiques, dress�es par les forestiers en 1935, occupait une superficie de 15 000 hectares dont plus de 5000 au massif du Belezma. Le reste est �parpill� � travers les massifs des Babors et Tababors pr�s de la c�te de B�ja�a et Jijel avec une superficie estim�e � 1300 hectares, le Djurdjura 2000 hectares, l’Atlas blid�en (Chr�a) 2700 hectares et le Hodna � peine 100 hectares. Mais ces chiffres ne sont qu’indicatifs, car depuis des ann�es, le c�dre est confront� aux m�faits de la d�sertification, p�turage, pi�tinement, coupes illicites, incendies, maladies, s�cheresse … au point o� l’on se demande ce qu’il en reste de nos jours. Si depuis toujours le c�dre subit un d�p�rissement intense, ces derni�res ann�es, la situation s’est aggrav�e de par, la forte mortalit� et une r�g�n�ration capricieuse surtout avec la mort des porte-graines. Pour comprendre la probl�matique du d�p�rissement du c�dre qui est une esp�ce end�mique au Maghreb, il faut savoir que son association v�g�tale pr�sente un faci�s sec en Alg�rie avec l’�rable de Montpellier, le ch�ne vert, le gen�vrier Thurif�re, le fr�ne dimorphe, l’�pine vinette d’Espagne et l’aub�pine. Quant au c�dre du Belezma, il se trouve dans un microlimat assimilable � celui du Maroc, avec un faci�s humide avec houx, ch�ne vert, if … Dans cette for�t situ�e aux portes du Sahara et formant le dernier bouclier forestier en bordure du d�sert le c�dre est en situation instable, en t�moignent certaines stations en agonie surtout au djebel Boumerzoug, Tuggurt, et Chala�la. Il faut savoir que le d�p�rissement est la r�sultante de l’int�raction de plusieurs facteurs de stress de nature biotique et abiotique agissant de fa�on concomitante jusqu’� l’affaiblissement de l’arbre et parfois m�me sa mort. Ainsi, les causes du d�p�rissement du c�dre sont multiples selon les chercheurs mais pour �tablir un diagnostic pr�cis, des donn�es compl�mentaires telles que l’historique de la for�t, les �v�nements climatiques et le contexte sylvicole s’av�rent n�cessaires. Au sujet de la c�draie du Belezma, des �crits rapport�s par Boudy (1950), et cit�s par K. Abdessemed (1981), indiquent que pendant la p�riode de s�cheresse persistante de 1875 � 1888, des peuplements entiers ont d�p�ri. Les c�dres apr�s avoir d�clin� n’ont pas r�sist� � des invasions de Bostryches. Ces mortalit�s massives se sont renouvel�es par la suite durant toutes les p�riodes x�rothermiques. Au Maroc, le d�p�rissement du m�me c�dre, est connu depuis les ann�es 1940 et s’est aggrav� depuis cinq ans. 5000 hectares malades ? Il est difficile d’estimer la surface concern�e, mais le d�p�rissement du c�dre est bien r�el, selon la lettre de la coop�ration fran�aise au Maroc (N�145 juin 2004). Dans les Aur�s, ce ph�nom�ne est apparu vers les ann�es 1982 et serait d� principalement � un l�pidopt�re d�foliateur (thaumetapoeae Bonjeani). Au d�but, ce d�p�rissement touchait les arbres �g�s, situ�s dans des conditions de mauvaise alimentation en eau comme les pentes abruptes, sols superficiels, arbres d�chauss�s … mais en l’�tat actuel, le d�p�rissement n’est plus l’effet d’un seul agent causal. Les observations et �tudes men�es par les universitaires, chercheurs, organismes sp�cialis�s et experts entomologistes convergent vers une m�me conclusion : disparition progressive du couvert v�g�tal dominant suivi d’attaques de parasites acc�l�rant la mort de l’arbre. Les auteurs de la premi�re �tude de la croissance et de la productivit� du c�dre de l’Atlas dans le massif du Belezma, MM. Abdallah Bentouati et Oudjehih Bachir ont lanc� l’id�e d’une rencontre internationale qu’organiserait le Parc national du Belezma pour non seulement tirer le sonnette d’alarme sur le risque de disparition qui plane sur les c�draies du pays, mais aussi pour b�n�ficier de l’exp�rience d’�minents sp�cialistes pour d�battre de la reg�n�ration naturelle et artificielle de ce conif�re. Mais c’est au Maroc que tout r�cemment (8 avril 2004) le Haut Commissariat des eaux et for�ts et de la lutte contre la d�sertification a organis� un s�minaire pour l’�tude de la probl�matique du d�p�rissement du c�dre. Cette rencontre entre scientifiques, chercheurs, techniciens … a permis de diagnostiquer l’affaiblissement massif de cette esp�ce pour proposer les solutions. Ainsi, diff�rents domaines scientifiques ont �t� mis � contribution pour mieux comprendre le d�p�rissement, dendrochronologie, cartographie zoologie, approche multidimensionnelle, des relations sant�milieu- sylviculture ont permis de faire le point et d’en tirer les conclusions. Il s’av�re que les 5000 hectares de c�dres malades d’Ifr�ne, Mechlifen, Boutrouba … souffrent d’un d�ficit hydrique qui les a affaiblis et soumis � des attaques phytosanitaires secondaires occasionnant des mortalit�s importantes. Et comme le mode de gestion sylvicole est mis en cause, les futurs am�nagements tiendront compte de la gestion de l’espace, l’adaptation � la diversit� des milieux, la gestion des densit�s en fonction des bilans hydriques. Ne sommes-nous pas dans la m�me situation ? Selon Abdallah Bentouati, charg� de cours � l’Institut d’agronomie de Batna, la s�cheresse qui a dur� depuis 20 ans et l’exposition de certains massifs du Belezma aux influences sahariennes dominantes semble a priori un argument valable pour les c�draies les plus touch�es. De m�me M. Michel Vennetier r�pondant � des questions sur l’effet de la s�cheresse sur la v�g�tation m�diterran�enne (bilan de l’ann�e 2003 en France) dira que les c�dres pr�sentent des signes d’ass�chement de cime. Certains ont m�me fleuri � l’automne 2003, ce qui est le signe d’un stress important. Leurs cernes de croissance en 2003 sont �galement beaucoup plus petites que la normale poursuit-il.
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Qu’en est-il de notre c�draie dont les types de sol qui les caract�risent, sont aptes � se dess�cher rapidement. M. A. Bentouati est cat�gorique. Les observations faites sur les carottes montrent de fa�on irr�futable que la s�cheresse exceptionnelle de l’ann�e 2002 marque le d�but de ce d�p�rissement aux Aur�s. Il faut, poursuit-il associer � cela d’autres facteurs biotiques qui sont derri�re l’aggravation de la situation tel le facteur entomologique (chenilles d�foliateurs) facteurs pathologiques comme l’armillaire et d’autres champignons probablement non encore identifi�s se d�veloppent sur les racines. D’apr�s K. Abdessemed (1981), les cedraies des Aur�s compar�es avec le reste des c�draies m�diterran�ennes s’av�rent des plus s�ches. M. Melki (1992), dira que le c�dre est en r�gression permanente en raison du r�chauffement d’une part et d’autre part du facteur anthropique sous un climat qui flirte avec l’aridit� du d�sert et des conditions �dapho-�cologiques souvent d�favorables. Les facteurs de destruction ont provoqu� en Alg�rie en 120 ans une r�gression de 25 � 30% de l’armature bois�e surtout en montagne (Boudy 1955 et Abdessemled K. 1984). Devant ces hypoth�ses aux aspects effrayants les responsables du parc national du Belezma cr��e pour la protection du c�dre au m�me titre que ceux de Theniet El-Had, Chr�a et Djurdjura ne d�sarment pas. Depuis 1984 date de sa cr�ation, le milieu fragile et vuln�rable est pris en soin et l’on fait ce que l’on peut pour pr�server la biodiversit� dans cette for�t � facies sec. En plus de la sauvegarde des esp�ces prot�g�es. L’�radication des d�gradations caus�es par l’homme, le souci principal est de trouver des solutions � la reg�n�ration en collaboration avec l’universit� de Batna. Fort dre l’exp�rience de r�g�n�ration r�ussite en 1948 � Theniet El-Gontas au milieu du Parc national du Belezma, 150 hectares ont �t� plant�s et cl�tur�s donnant des r�sultats appr�ciables malgr� la s�cheresse des derni�res ann�es. Plusieurs techniques ont �t� test�es : semi-direct dans des placeaux traill�s, semi � la vol�e, plantation, chrochetage … toutes les tentatives de reboisement ont �t� concluantes � travers plusieurs sites Chelia, S’gag, Bourdjen … d�montrant que le c�dre peut r�ussir � condition d’�tre suivi et pourquoi pas irrigu�. De plus, une op�ration d’assainissement a �t� entam�e entre 1987 et 1992 permettant l’�vacuation de pr�s de 1200 m2 de bois sauf que la situation s�curitaire � partir de 1992 n’a pas permis l’ach�vement de l’op�ration. Aujourd’hui, la c�draie se trouve dans un �tat de d�p�rissement inqui�tant. Les risques de disparition des c�draies existent, mais la solution � mettre en œuvre pour �viter ce d�sastre �cologique existe aussi. Profitant de la pr�sence de deux avions de lutte contre les incendies (�t� 2004), les massifs forestiers de la wilaya de Belezma, S’gag et Chelia ont �t� film�s permettant de mesurer l’ampleur des d�g�ts. Une mission conjointe DGF/INRF d�p�ch�e sur les lieux a, en �troite collaboration avec la direction du Parc national du Belezma et le conservateur des for�ts de la wilaya de Batna, dress� un plan de sauvegarde de la c�draie des Aur�s. Comme le tiers du peuplement du c�dre est touch� par le d�p�rissement (1490 hectares sur plus de 5000) l’urgence a �t� donn�e � l’extraction des c�dres morts de la for�t pour �viter les risques de contamination avant de repeupler au plus vite les aires nues. Toutes les m�thodes de plantation d�j� essuy�es par les cadres du Parc national du Belezma et les chercheurs de l’universit� de Batna restent bonnes sauf trop compter sur la r�g�n�ration naturelle lente et capricieuse. Le programme d’urgence mis en place s’articule autour de l’assainissement de 1490 hectares, le repeuplement de 50 hectares au Belezma, Chelia et Guetiane entre 2005 et 2006 en plus de 600 hectares par an pr�vue � compter de 2007 au Belezma (300 ha) et Rafa� (300 ha). De plus, le dispositif de recherche avec six placettes de suivi et d’alerte de l’�volution du d�p�rissement, l’�tude d’endrom�trique � r�aliser par l’INRF, l’�valuation pr�cise des superficies touch�es par le d�p�rissement, le renforcement de l’infrastructure et des �quipements du parc, sera l� pour le suivi et surtout la mise en place de m�canismes subtils de repousse. Le Parc national du Belezma et pourquoi les autres parcs sp�cialis�s dans la protection du c�dre (Theniet El-Had, Chr�a et Djurdjura) doivent b�n�ficier de moyens humains, financier et mat�riel pour faire face � ce ph�nom�ne de d�p�rissement. Si des c�draies artificielles ont �t� cr��es avec succ�s dans plusieurs pays (France, Italie, Allemagne, Bulgarie, et Etats-Unis), il ne sera pas question pour nous d’�chec, surtout que les plantations se fassent dans l’aire naturelle du c�dre. M�me plus, il faut envisager la cr�ation d’autres cedraies dans diff�rentes r�gions du pays o� l’altitude le permet. Le c�dre de l’Atlas constitue une richesse botanique qui ne se rencontre qu’en Alg�rie et au Maroc o� il est l’�l�ment moteur du tourisme � Ifr�ne, Michlifen, Boutrouba. Chez nous aussi le col du Telmet o� jadis la Sonatrach, accueille ses estivants Chr�a aussi et bien d’autres sites paradisiaques doivent �tre exploit�s en tourisme vert. Mais en attendant, veillons en tant que forestiers, chercheurs, et citoyens jaloux de notre richesse � repenser les m�thodes, les techniques ainsi que les strat�gies les mieux adapt�es pour sauver nos c�draies et �tendre leurs superficies.
H. M.



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