Panorama : KIOSQUE ARABE
Zarqaoui est parmi nous !
Par Ahmed HALLI
halliahmed@hotmail.com


Si j'�tais un tant soit peu certain d'�tre entendu, je joindrais ma voix � celle du penseur jordanien Chaker Naboulci qui r�clame vengeance pour les victimes de Zarqaoui. Quelques heures avant l'annonce de l'assassinat de nos deux diplomates qu'il tenait pour in�luctable, le penseur jordanien Chaker Naboulci interpellait les Etats arabes.

S'adressant plus directement � l'Egypte et, � travers elle, � l'Alg�rie, l'�crivain proposait une force d'intervention arabe en Irak. "L'Egypte, rel�ve-t-il, ne nous a pas dit comment elle comptait agir pour punir les assassins de son ambassadeur. Nous n'avons pas entendu l'Alg�rie sur la fa�on dont elle comptait venger demain le meurtre de ses deux diplomates ". Chaker Naboulci rappelle d'abord la fa�on dont l'Egypte a r�agi au meurtre de son ambassadeur. Il cite les propos du ministre �gyptien des Affaires �trang�res : "L'Egypte se vengera des meurtriers de l'ambassadeur Ihab Cherif en renfor�ant son action diplomatique et juridique. Elle traquera le ph�nom�ne du terrorisme dans le cadre de la l�galit� internationale." "Le sang des Egyptiens s'est-il d�valoris� � ce point alors que le terrorisme a d�j� cibl� en Egypte des pr�sidents, des ministres, des hommes de culture et de simples citoyens?", s'�tonne le penseur jordanien. "L'Egypte se mobilisera-t-elle rapidement demain pour laver le sang de son d�funt ambassadeur comme l'ont fait d'autres peuples soucieux d'honneur, de dignit� et de ferveur patriotique? Ou bien ces mots ne sont-ils que slogans et chansonnettes lors des manifestations? s'interroge notre �crivain. "Le ministre �gyptien des Affaires �trang�res, politicien averti, n'ignore-t-il pas que les grandes guerres de par le monde ont �clat� parce que des Etats ont entrepris de venger le sang de leurs ressortissants? Sait-il que la premi�re "Guerre de l'Opium" (1840- 1842) qui a oppos� la Chine et la Grande-Bretagne est la cons�quence du meurtre d'un simple citoyen (et non d'un ambassadeur) chinois par un marin anglais? Le ministre des Affaires �trang�res �gyptien ne sait-il pas que la premi�re guerre mondiale (1914-1918) s'est d�clench�e � cause de l'assassinat de l'h�ritier du tr�ne d'Autriche par un �tudiant serbe? Que cette guerre a co�t� la vie � 8 millions de personnes et a impliqu� 65 millions de soldats, rien que pour laver l'honneur et la dignit� de l'Autriche et venger l'un des siens? "L'Egypte prendra-t-elle l'initiative d'envoyer par exemple cent mille soldats en Irak pour mater les opportunistes fondamentalistes ?� (1) Pourquoi pas, r�pond Chaker Naboulci. L'Egypte n'a-t-elle pas envoy� 60.000 soldats en 1962 au Y�men pour aider le peuple y�m�nite. L'imam Badr �tait-il alors plus dangereux pour l'Egypte que ne le sont les terroristes de "Abou Al-Gha�t" (2) aujourd'hui? Le peuple irakien ne m�rite-t- il pas un tel sacrifice de l'Egypte et m�me plus encore? Que fera l'Alg�rie apr�s le meurtre de ses deux diplomates par les terroristes fondamentalistes? L'Alg�rie se contentera-t-elle de condamner et de faire allusion � d'�ventuelles repr�sailles, comme l'Egypte, et de laisser ainsi le sang alg�rien couler en vain? Que feront les autres Etats arabes, � l'exception de la Syrie (3), demain lorsque se poursuivra la s�rie d'enl�vements d'ambassadeurs et de diplomates arabes? Verrons-nous des arm�es arabes � � l'exception de l'arm�e syrienne qui se r�serve pour la lib�ration du Liban, du Golan, de la Palestine et de l'Irak � se d�verser sur l'Irak non pas pour l'honneur de l'Irak et des Irakiens mais pour d�fendre la nation arabe ? Cette nation arabe que le terrorisme fondamentaliste menace de ramener au Moyen-Age avant que le soi-disant colonialisme occidental n'ait eu le temps de la hisser au si�cle des lumi�res", conclut Chaker Naboulci. Dans le sillage des crimes crapuleux et des kidnappings du groupe Zarqaoui, affili� � "Al Qa�da", la disparition de notre confr�re �gyptien R�dha Hillal a connu un �pilogue inattendu. On sait que ce journaliste, r�dacteur en chef adjoint � Al- Ahramest port� disparu depuis le 11 ao�t 2003. Deux ans apr�s son enl�vement, le groupe int�griste Al-Djihad a provoqu� une certaine surprise mercredi 27 juillet en revendiquant son enl�vement et son assassinat par balles. Curieusement, c'est par une lettre �lectronique � l'historien Seyed Qomni que le �Djihad� a r�solu un myst�re qui durait depuis pr�s de deux ans. Dans cette lettre, le "Djihad" magnanime informe l'�crivain qu'il accepte sa d�cision de se repentir et de cesser d'�crire. On sait que Seyed Qomni avait fait un mea-culpa retentissant il y a deux semaines. Menac� de mort, l'�crivain, auteur de plusieurs ouvrages de r�f�rence, avait abjur� et annonc� sa retraite intellectuelle. Le mouvement int�griste qui a remport� une pr�cieuse victoire sans coup f�rir a annonc� au "repenti" Qomni que tout �tait pr�t pour qu'il subisse le sort de R�dha Hillal et qu'il avait �chapp� de justesse � la mort. Toutefois, l'avocat attitr� des groupes int�gristes en Egypte, Mamdouh Ismail, a contest� le bien-fond� de cette version concernant la disparition de R�dha Hillal. Mais comme l'enqu�te pi�tine depuis la disparition du journaliste, cette nouvelle piste islamiste a autant de cr�dit que celles d'une disparition volontaire ou d'un r�glement de comptes. Ceci �tant, les menaces islamistes contre des intellectuels la�ques ou suppos�s tels n'est pas la pr�occupation majeure du pouvoir en Egypte. C'est le cas d'ailleurs de la plupart des pays arabes confront�s au m�me probl�me. On y est beaucoup plus soucieux d"�viter les manifestations explosives de l'int�grisme que par son travail de sape et d'intimidation en direction des populations. En t�moignent les inepties et les horreurs prof�r�es ces derniers jours par certains de mes concitoyens dans l'affaire de nos deux diplomates assassin�s. Je sais depuis longtemps que les Alg�riens sont partag�s en deux cat�gories : il y a d'un c�t� ceux qui aiment l'Alg�rie pour la vie. De l'autre, il en est qui l'aiment jusqu'� la mort (celle des autres, rarement ou si peu la leur). Dans la premi�re, j'ai rang� arbitrairement ceux qui se ont �mus et r�volt�s � l'annonce de l'assassinat de deux Alg�riens � l'�tranger. Dans la seconde caste ou secte figurent ceux qui font all�geance au drapeau national mais en filigrane de l'embl�me de l'islam politique. Ceux-l� sont pr�ts � �liminer tous les Alg�riens pour le service de leur cause absurde. En Irak, Zarqaoui s'est d�volu la m�me t�che concernant les Irakiens et il s'en acquitte avec constance et d�termination. Il poss�de en Alg�rie des alli�s de poids en plus des soutiens inconscients de tous les esprits malades qui pullulent sous ce ciel jadis lumineux. S'�tonner que Ali Benhadj soutienne Zarqaoui, c'est croire que l'imam expuls� de France va renoncer au "djihad" sit�t qu'il aura foul� le sol alg�rien. Benhadj et Zarqaoui s'abreuvent � la m�me source pollu�e. Leurs cerveaux malades leur dictent des visions de destin national, voire universel. Ce sont des r�surgences de tyrans comme Caligula ou N�ron. Ces derniers se prenaient pour des dieux. A l'heure du monoth�isme, Benhadj et Zarqaoui ne peuvent pr�tendre au m�me statut. Leur litt�rature les pr�sente comme les h�ritiers des proph�tes. Proph�tes du malheur, s�rement!
A. H.

(1) L'auteur joue � dessein sur les mots "Oussouliyounes" (Fondamentalistes) et Woussouliyounes (opportunistes, arrivistes).
(2) Il s'agit de Abou Moussaab Al Zarqaoui surnomm� ici Abou Al-Gha�t, lequel renvoie directement au mot de Cambronne.
(3) Curieusement, la Syrie est �pargn�e par le terrorisme. A tel point que, selon l'opposition, les services syriens ont simul� en juin dernier une fusillade dans le centre de Damas pour faire croire � un danger terroriste.

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