
Actualités : Nabil Belghoul, 40 jours déjà...
Reporter-photographe de talent, Nabil Belghoul nous a quittés depuis 40 jours. 40 jours de tristesse, de douleur et d’interrogations. Sa famille, ses amis et ses confrères se sont rencontrés, hier, à la maison de la presse Tahar- Djaout, pour lui rendre hommage. Tarek Hafid - (Alger Le Soir) - Les lunettes noires de Souad cachent mal sa tristesse. La fiancée de Nabil — ils avaient prévu de célébrer leur mariage le 23 août — avoue qu’elle ne croit toujours pas à sa mort en regardant les photos exposées dans le hall d’entrée de la Maison de la presse. “Aujourd’hui, je ressens une très forte nostalgie mêlée à un puissant sentiment de fierté. Je suis fière d’avoir fait un bout de chemin avec Nabil et de savoir aussi tout ce qu’il représente pour les membres sa corporation. Le 23 août devait être le plus beau jour de ma vie, mais il en a été autrement…”, dit Souad d’une voix calme. Ouahab, Yanis, Samir, Souhil, Malika, Omar, Bilal, Ryadh… tous les photographes de presse se sont donné rendez- vous pour commémorer la mémoire de Nabil. “Il était incroyable. Un vrai professionnel. Et je ne dis pas ça parce que c’était mon frangin”, déclare Yanis Belghoul sur un éclat de rire. Atef, journaliste au quotidien El Djazaïr Newsest également présent. Lui aussi regarde les photos de Nabil prises lors d’un reportage qu’ils avaient effectué ensemble dans les “villages africains” de l’oued Tafna, près de Maghnia. “En fait, nous n’avions pas prévu de nous rendre dans ces villages. C’est au cours d’une sortie médiatique organisée par la Gendarmerie nationale au niveau des frontières ouest du pays que nous avons appris leur l’existence. Nabil voulait absolument faire un reportage sur ces immigrants clandestins malgré les mises en garde des habitants de la région. Il en a fait une obsession. Nous avons donc faussé compagnie à notre groupe pour nous y rendre avec un agriculteur du coin. Il faut savoir que ces africains vivent en communauté. Il y a le village, pour ne pas dire l’Etat, du Mali, celui du Sénégal et un troisième du Cameroun”, note Atef en précisant qu’il leur a été très difficile de travailler devant la méfiance des Africains. “L’accès au village malien nous a été interdit par le chef de tribu. Nabil a donc décidé que nous devions nous rendre au village sénégalais situé un peu plus loin. A peine arrivé sur place, Nabil n’a pas hésité un instant et a commencé à photographier tout ce qu’il voyait. Le responsable de la sécurité, un grand gaillard, nous a interpellés. Il était curieux de savoir ce que nous faisions là”, ajoute Atef. Nabil trouvera très vite la parade en affirmant à leur interlocuteur qu’ils sont membres d’une ONG humanitaire. “Il avait trouvé la solution qui nous a permis de réaliser ce reportage. Nabil a pris des photos absolument incroyables des conditions de vie de ces gens-là.” Des aventures comme celle-ci, Nabil Belghoul en a vécu des dizaines. Pour la petite histoire, quelques semaines seulement avant son décès, Nabil devait se rendre dans les territoires du Sahara occidental occupés par le Maroc afin de couvrir l’intifada du peuple sahraoui. Il faut savoir que cette partie du monde est totalement fermée à la presse internationale, encore plus à la presse algérienne. Ce voyage n’aura finalement pas lieu pour des raisons purement techniques. “Il ne faut surtout pas croire que Nabil était un casse-cou. Non, c’était un véritable professionnel”, précise Ouahab Hebbat, patron de New-Press. Mais Ouahab ne peux cacher sa préoccupation au sujet de la perte tragique de son fidèle ami. “Nabil était plus qu’un frère pour moi. Je ne peux concevoir qu’il soit décédé des suites d’une crise cardiaque. Nabil a évité de me le dire, mais je sais aujourd’hui qu’il été passé à tabac quelques mois avant sa mort. Il en a gardé des séquelles qui se sont avérées fatales. D’ailleurs, c’est parce que sa mort a été jugée suspecte que son corps a été autopsié. Mais nous attendons toujours les résultats de cet examen…”, note Oauhab qui soutient que son ami est une énième victime de la hogra. T. H.
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