Actualités : UN DOCUMENT DE LA CHEFFERIE DU GOUVERNEMENT L'A ÉTABLI
Drogue-terrorisme, jonction établie


“Les ravages de la drogue au sein de la population, particulièrement les jeunes, constituent une véritable hécatombe.” Ces mots sont extraits d’un document de l’Office national de lutte contre la drogue et la toxicomanie (ONCDT), une structure consultative placée sous la tutelle du chef du gouvernement et chargée de définir une politique nationale de lutte et de prévention contre la drogue et la toxicomanie et de veiller à son application en concertation avec les autres acteurs concernés.
Praticiens de la santé mentale, représentants d’institutions judiciaires et de sécurité ainsi que des acteurs de la société civile présents à la rencontre scientifique organisée jeudi dernier à Tizi- Ouzou, à l’initiative de l’établissement hospitalier de Oued-Aïssi, spécialisé en psychiatrie, et sous le haut patronage du ministère de la Santé et de la Population, font part de leur inquiétude et s’accordent à reconnaître l’ampleur d’un phénomène qui est au centre d’enjeux sanitaires et socioéconomiques, avec les répercussions négatives que l’on sait sur la sécurité et l’ordre public. S’il est notoirement admis que la toxicomanie et la consommation illicite de drogues et de substances psychotropes constituent un danger pour la santé mentale et physique des individus et une menace permanente pour la cohésion sociale, les services chargés de lutter contre ce fléau soulignent l’influence de la toxicomanie dans la manifestation de la délinquance et de certains crimes et délits. Vols, coups et blessures volontaires, viols, accidents de la circulation, tentatives de suicide et suicides sont, pour l’essentiel, des actes commis sous l’effet de la consommation des drogues. Pour le Dr Ziri, de l’EHS de Oued-Aïssi, l’un des organisateurs de la Journée médicale internationale sur la toxicomanie, “l’angoisse du praticien, et d’autres intervenants concernés, quant à ce phénomène est parmanente. Ceux-ci sont souvent désarmés face aux conduites violentes des toxicomanes, surtout ceux reçus dans les services hospitaliers. L’un des objectifs de cette journée est de constituer des relais et des réseaux pour véhiculer l’information nécessaire à la prévention, à la prise en charge et à la lutte contre le phénomène de la toxicomanie”. M. Abdenouri, directeur général de l’ONLCDT, souligne pour sa part que “les études épidémiologiques réalisées à ce jour ne permettent pas de faire un état des lieux fondé sur les données précises et fiables sur l’origine, l’ampleur et les causes de l’abus des drogues dans notre pays” mais les chiffres existants sont assez éloquents sur la gravité des retombées du trafic et de l’usage illicite de la drogue en Algérie où la conjugaison de plusieurs facteurs favorise la montée en puissance du fléau de la drogue. A l’heure de la mondialisation et de la libéralisation des échanges économiques, le phénomène va grandissant en Algérie qui a, durant plus d’une décennie, fait face au terrorisme. Un phénomène aggravant qui se trouve à l’interconnexion de plusieurs trafics illicites dont, bien sûr, celui de la drogue et autres substances stupéfiantes. La courbe ascendante enregistrée par la saisie annuelle (1992 à 2004), de cannabis est sans doute symptomatique à cet égard (voir tableau) “le volume des quantités de drogues saisies et les conclusions des investigations et des enquêtes entreprises font apparaître que notre pays tend à devenir un marché de consommation. Il n’est plus seulement un pays de transit de la drogue”, lit-on dans le rapport de l’ONLCDT. Il est établi, d’après les conclusions du même rapport, que “le trafic illicite des stupéfiants et des substances psychotropes constitue l’une des formes les plus redoutables et pernicieuses de la criminalité organisée. De plus, la relation entre les différentes criminalités, en particulier le terrorisme et la drogue, est nettement établie”, même si, reconnaît-on, “il est difficile d’étudier et de cerner une question complexe, aux aspects très variés, et de la cerner séparément des autres formes de criminalité qui s’opèrent par l’intermédiaire d’entreprises et d’officines commerciales clandestines gérées par des organisations implantées un peu partout dans le monde et disposant de moyens financiers et de supports de communication aussi variés et performants.” De par sa proximité géographique avec plusieurs pays, l’Algérie constitue une plaque tournante pour les réseaux de trafic et de transit de drogue. Ainsi, les quantités de drogue provenant de la région ouest, entendre le Maroc, passent par les ports d’Oran et d’Alger pour être acheminées vers l’Europe. Les frontières est et sud du pays, en passant, notamment, par Ouargla et El-Oued, constituent la porte de sortie pour les trafiquants de drogue vers le Moyen-Orient, la Libye et la Tunisie. “Plus de 90% des quantités saisies par les services concernés ces dernières années sont destinées à être commercialisées dans les pays d’Europe, d’Afrique et du Moyen-Orient”, lit-on dans le document présenté par M. Abdenouri, de l’ONLCDT. Si la résine de cannabis constitue la plus grosse part des quantités interceptées, on signale également la saisie d’autres substances comme la cocaïne et l’héroïne, en quantités de moindre importance, provenant d’Europe par fret maritime ou aérien, et même des pays subsahariens à travers des réseaux possédant des démembrements à Alger et dans les gros centres urbains. Pour l’heure, l’Algérie n’est pas recensée en tant que pays producteur de drogue, même si, reconnaît-on, il existe des surfaces très limitées de production de cannabis. Cela n’évacue pas l’inquiétude de tous les acteurs concernés face à la propagation du fléau de la toxicomanie qui touche l’ensemble des couches sociales (voir tableau) et, essentiellement, les jeunes.
S. A. M.



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