
Actualités : Kabylie : partenariat pouvoir-arouch, est-ce la fin ?
Ayant revendiqué et obtenu la dissolution des assemblées locales issues des élections controversées d’octobre 2002, les arouch, qui ont applaudi et cautionné la tenue des élections partielles du 24 novembre 2005, relancent le débat sur la légitimité populaire et posent des questions sur leur représentativité en tant que délégués des populations dans les quartiers des villes et villages. Le pouvoir qui a engagé le dialogue autour de ce qui est appelé par les médias “la crise de Kabylie”, acceptera-t-il de reprendre langue avec ses anciens partenaires alors que les citoyens de Kabylie viennent de donner mandat par le suffrage universel à des hommes et à des femmes qui vont les représenter au niveau des institutions élues de l’Etat ? Souvenons-nous, quelques jours avant la tenue des élections locales d’octobre 2002, Yazid Zerhouni, ministre de l’Intérieur répondant à une question d’un journaliste qui l’interrogeait dans une émission d’information de la Chaîne III si l’Etat allait engager des discussions avec les représentants d’alors du mouvement citoyen de Kabylie sur les revendications posées par ce dernier, aura cette réponse lapidaire, en disant que l’Etat allait dialoguer avec les représentants du peuple qui seront désignés par la voix des urnes. Beaucoup avaient crié aux errements d’un ministre de l’Intérieur chez qui on décelait un art consommé de la provocation alors que la fièvre de la rue kabyle était à son comble qui conférait, alors, aux délégués des arouch une aura d’animateur de la contestation. La suite on la connaît. Zerhouni ne tiendra pas ses promesses et après de longs mois où l’Etat laissait s’installer une situation qui frisait la chienlit et le désordre, finira par dissoudre des assemblées, tout en reprenant à son compte, sans avoir peur de se dédire, le peu glorieux vocable “d’indus élus”, stigmatisant des personnes réellement mal élues et relayant la littérature d’un mouvement qui, à force d’être miné par des contradictions et des luttes d’influence, a fini par perdre sa force de protestation et son pouvoir de mobilisation. Et c’est dans ces conditions que les animateurs du mouvement des arouch sont reçus par le représentant de l’Etat et chef de gouvernement comme partenaire politique et représentants d’une population qui constate que ses délégués traditionnels dans les villages et ceux des associations de quartiers sont restés à la maison. Plusieurs rounds du dialogue, successivement, en 2003 et en 2004 et début 2005 vont réunir les deux partenaires. Les discussions aboutiront à la signature d’un protocole d’accord où l’Etat promet “la mise en œuvre de la plate-forme d’El-Kseur dans le cadre des lois de la République”. Aux adversaires des arouch qui ont vu dans cet accord que des concessions cosmétiques qui se sont concrétisées par l’effacement des ardoises fiscales au profit des commerçants et par la dissolution des assemblées locales puis la tenue récente des élections partielles, Bouteflika vient peut-être de donner raison, suite à sa fameuse déclaration de Constantine où il opposait une fin de non-recevoir à l’officialisation de tamazight, point du document de revendications d’El-Kseur donné comme acquis imminent par le protocole d’accord sur lequel s’est engagé le Premier ministre de Bouteflika, Ahmed Ouyahia. Depuis, silence radio entre les deux parties qui peut-être, mènent, comme se laissent à le dire d’aucuns, des contacts et des discussions en sous main. Un silence qui laisse la voie libre aux conjectures quant au choix du partenaire dans le dialogue entamé par les pouvoirs publics ? Et s’ils acceptent de jouer les prolongations avec les arouch, ne courent-ils pas le risque d’ouvrir une brèche dans la nouvelle ère de stabilité et détente qui s’installent à la suite de ces élections partielles à l’issue desquelles le pouvoir local est revenu à des forces politiques comme le RCD et le FFS pour qui des arouch, il faut désormais parler au passé, leurs représentants, dûment mandatés par les électeurs de Kabylie sont la force de leurs arguments. Les pouvoirs publics concrétiseront-ils la promesse faite en 2002 par le ministre de l’Intérieur ? S. A. M.
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