Panorama : ICI MIEUX QUE L�-BAS
Tr�ve illimit�e
Par Arezki Metref
arezkimetref@yahoo.fr


Si on a un mal fou � acc�der, en tant qu'opinion publique, au bulletin de sant� du pr�sident, on n'a, en revanche, aucune sorte de difficult� � consulter celui de l'UGTA. La centrale souffre d'une maladie sp�cifique qui s'appellerait le �syndrome de d�pendance absolue au pouvoir�. Pas de quoi, pour autant, s'alarmer : ce mal se soigne bien, mais il faut du temps et surtout des rem�des de cheval ! En ce moment, le malade est dans un �tat plut�t cafardeux. Un de ces sympt�mes s'est r�v�l� lors de la r�union du secr�tariat national du 7 d�cembre.
Alors que le monde du travail se d�bat dans les cons�quences sociales de la politique lib�rale du pouvoir, le secr�tariat national de l'UGTA arr�te, en guise de premier point de son ordre du jour, l'�tat de sant� du pr�sident de la R�publique. Les observateurs les plus avis�s sont incapables, pour le moment, d'expliquer si le choix de ce premier point se fonde sur la solidarit� entre grands malades ou si c'est, plus simplement, un renvoi d'ascenseur au pr�sident de la R�publique qui, pour condamner le multisyndicalisme naissant, avait d�clar�, il y a quelques licenciements de cela, qu'en dehors de l'UGTA, ne reconnaissait aucun syndicat. En d�autres circonstances, on se serait �tonn� de cette facilit� avec laquelle le plus vieux syndicat d'Alg�rie endosse une identit� qui n'est pas la sienne, car discuter de l'�tat de sant� du pr�sident de la R�publique est du ressort soit d'une commission sp�cialis�e de m�decins, soit, � la limite, d'une cellule de communication. En quoi l'UGTA, syndicat dont la nature et la vocation sont de d�fendre les int�r�ts des travailleurs, est-elle habilit�e � discuter toutes affaires cessantes, c'est bien le cas de le dire, de l'�tat de sant� du pr�sident ? La r�ponse est donn�e clairement, nettement, sans ratures, dans le communiqu� sign� de Sidi Sa�d. On y lit que, �fid�les � nos traditions s�culaires de solidarit� et de respect, la direction nationale de l'UGTA appelle l'ensemble des travailleuses et des travailleurs � observer une tr�ve sociale�. Une tr�ve est un r�pit dans un combat. Quel est donc ce combat que la direction de l'UGTA veut interrompre en signe de respect et de solidarit� avec le pr�sident de la R�publique ? Jamais autant qu'aujourd'hui le monde du travail n'a �t� aussi min� et jamais l'UGTA ne s'est rang�e aussi clairement du c�t� du pouvoir. Ce qu'il convient d'appeler �l'affaire du port� sert � la fois de catalyseur des courants divergents qui traversent l'UGTA et de r�v�lateur de la puissance avec laquelle le pouvoir tient la plus grande organisation de masse en Alg�rie. Le secr�taire g�n�ral du Syndicat des douanes, Ahmed Badaoui, a �t� suspendu. Il confie � Alger R�publicain que Sid-Ali Lebib, le directeur des douanes qui l'a suspendu, n'a pas pris la d�cision tout seul. �Avant de prendre sa d�cision, ce dernier a re�u la visite de deux secr�taires nationaux de l'UGTA et d'un ministre�, dit-il. Que la d�cision soit ill�gale, personne n'en doute. Mais la direction de la centrale, sans la complicit� de laquelle un tel arbitraire n'aurait pu �tre impun�ment commis, montre d�j� de quel c�t� elle veut se tourner. La mise sur place d'une coordination des syndicats du port, qui s'�l�ve contre la s�paration � partir du 1er janvier 2006 des activit�s commerciales et des activit�s de gestion portuaires, en laquelle ils voient � raison une privatisation d�guis�e, perturbe la direction de la centrale dont le cahier des charges semble de contenir le monde du travail dans le respect de mesures ultralib�rales du pouvoir approuv�es par la coalition pr�sidentielle repr�sent�e, place du 1er-Mai, par Sidi Sa�d pour le FLN et Djenouhat pour le RND. La tr�ve sociale demand�e par l'UGTA profite au pouvoir. Elle signifie que la direction se d�solidarise des travailleurs du port qui pr�voient deux journ�es de protestation les 13 et 25 d�cembre prochains et, si aucune suite n'y est donn�e, une gr�ve illimit�e � partir du 3 janvier 2006. La direction d�nonce aussi par anticipation, au pr�texte que le pr�sident est malade, les travailleurs de l'�ducation qui pr�voient le d�brayage comme recours. Cette agitation, cons�quence de la politique lib�rale de d�mant�lement de l'�conomie nationale conduite par le pouvoir et appuy�e par l'UGTA, la direction de l'UGTA doit certainement en rendre compte aux partis de la coalition pr�sidentielle. Chacun doit �tre tenu de tenir les siens. Mais la base �refuse d'accompagner les r�formes lib�rales�. Celle du port refuse de laisser faire la privatisation du port car, comme le dit Abbas Guermadj, secr�taire g�n�ral de l'Entreprise portuaire d'Alger de l'UGTA, �on ne privatise pas la fronti�re�. Le 11�me congr�s de l'UGTA est pr�vu pour le premier trimestre 2006. Ahmed Badaoui ne se fait aucune illusion. D'ores et d�j�, il sait que �nous allons faire l'objet d'une purge syst�matique�. L'UGTA, qui se comporte en parti politique inf�od� � un autre parti politique, continue � �tre un anachronisme dans un monde o� la mondialisation a induit le pluralisme. Le refus de la comp�tition syndicale est une attitude de parti politique unique. Quand le lib�ralisme fait tant de d�g�ts parmi les travailleurs, il est tout de m�me particuli�rement aberrant qu'un syndicat p�nalise encore davantage les victimes en d�fendant les int�r�ts du pouvoir. La tr�ve, �a fait 50 ans que l'UGTA l'observe. A des moments historiques, elle �tait compr�hensible � d�faut d'�tre fond�e. Mais aujourd'hui, l'UGTA doit se soigner de cette d�pendance au pouvoir.
A. M.

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