Panorama : KIOSQUE ARABE
Si tu vois une oie �vanouie�
Par Ahmed HALLI
halliahmed@hotmail.com


C'est � peine croyable ! Ce qui n'�tait qu'un exercice d'autod�rision, des �lucubrations de chroniqueur, est devenu une r�alit�. Depuis la sortie de cheb Mami, improvis� premier personnage de l'Etat livr� � la providence, on n'a pas fait mieux. Souvenez-vous ! La semaine derni�re, je vous parlais de la foucade d'un confr�re �gyptien, Khaled Mountassar.

Ce dernier sugg�rait que le chanteur Chabane Abderrahim, Monsieur Moi je n'aime pas, fasse un tube contre la grippe aviaire. En lan�ant cette id�e un peu folle, il brocardait simplement l'artiste qui fait refrains de tout. Khaled Mountassar doit se sentir dans l'attitude de l'arroseur arros�. Qu'il ait lu la chronique de Mountassar ou pas, un d�put� �gyptien a repris la balle au bond. Il a propos� en s�ance parlementaire de faire appel au chanteur le plus populaire du moment. Aussit�t dit, aussit�t fait : les autorit�s �gyptiennes ont demand� � Chabane Abderrahim de faire une chanson pour appuyer la lutte contre la grippe du poulet. Je pr�cise tout de suite qu'il ne s'agit pas pour l'omnipr�sent chanteur de jouer les �pouvantails. Il n'aura pas � faire peur aux volatiles migrants pour les �loigner des bords du Nil. Quoique, de ce c�t�-l�, il soit physiquement dou� pour terroriser les moineaux et les hirondelles (1). Non ! Il s'agira simplement pour Chabane Abderrahim de sensibiliser les masses au danger du virus. Il sera une esp�ce de �Hadj Tamiflu� avant la lettre. Il apprendra au peuple comment se pr�munir contre la grippe aviaire avec le m�me entrain et la m�me conviction qu'il en a manifest�s pour lui faire aimer les Danois. Le magazine Elaph nous livre en exclusivit� des extraits de cette nouvelle chanson dont le clip est d�j� en chantier. En voici un passage: Si tu vois une oie �vanouie, m�fie-toi ! Prends le t�l�phone et avertis (les autorit�s) ! Suivent les autres recommandations concernant les canards, les pigeons, etc. Ce qu'il y a de bien en Egypte, c'est que la moindre atteinte au pays devient une cause nationale. Ce n'est pas au Caire que vous entendrez des �Vive Zarkaoui� � la gloire de l'assassin de l'ambassadeur d'Egypte en Irak. De leur c�t�, les Fr�res musulmans d'Egypte ne pouvaient rester dans l'expectative. Entre p�dagogie et d�magogie, les d�put�s du mouvement ont mang� du poulet sur le parvis du Parlement. Bien s�r, les cam�ras des t�l�visions satellitaires arabes �taient l� par hasard. Pour bien montrer les limites de l'union sacr�e, les �lus du parti au pouvoir n'ont pas particip� � la f�te. Toutefois, et au lendemain de cette d�monstration, le gouvernement a indiqu� incidemment qu'apr�s le Conseil des ministres, les participants ont d�jeun� avec du poulet. C'est l'�crivain Youssef Al-Qaid qui nous l'apprend dans le quotidien du Qatar Al-Raya. Il affirme �galement que le poulet a d�sormais un parti en Egypte. Lors d'une manifestation d'�leveurs de volailles au Caire, l'un des manifestants, interrog� sur la nature du mouvement, a r�pondu : �Nous sommes le parti du poulet.� Le probl�me est tellement s�rieux qu'il a �clips� le drame du ferry �gyptien qui a coul� il y a quelques semaines en mer rouge, note encore l'�crivain. �Cependant, croit savoir Youssef Al-Qaid, la grippe aviaire se transmet aussi rapidement par le porc. Or, pr�cise-t-il, ce sont les coptes les plus pauvres qui pratiquent cet �levage, souvent sur des d�charges publiques � la p�riph�rie des grandes villes. Ce probl�me, personne n'en parle. Il est tr�s sensible car il soul�ve l'�pineuse question de la relation entre la majorit� musulmane et la minorit� copte�, nous dit l'�crivain. Autrement dit, les autorit�s craindraient d'imposer aux coptes des mesures de sant� publique qui concernent tous les Egyptiens. Si je comprends bien le raisonnement, on peut attaquer des coptes lorsqu'ils veulent agrandir leurs lieux de culte, en tuer quelques-uns � l'occasion mais gare � leurs cochons ! Ainsi, par une curieuse et tr�s conjoncturelle approche de la tol�rance, les autorit�s �gyptiennes h�siteraient � heurter les traditions des coptes ou � l�ser leurs int�r�ts. C'est � croire que la raison s'efface syst�matiquement d�s qu'il s'agit de religions. Un exemple : le cheikh de la cha�ne Al-Jazira, Karadhawi. Le cheikh pr�f�r� de nos oies blanches est confront� � un d�fi intol�rable, celui du t�l�pr�cheur Omar Khaled. Ce dernier a brav� l'interdit du ma�tre et a organis� la semaine derni�re une conf�rence � Copenhague pour y faire conna�tre le vrai visage de l'Islam. Karadhawi ne tire pas � boulets rouges sur Khaled parce qu'il pr�tend repr�senter l'Islam r�el. Ce n'est pas son probl�me et il sait pertinemment que le ma�tre et l'�l�ve sont loin d'�tre l'image d'un Islam rayonnant et humaniste. Omar Khaled a tout simplement d�sob�i � une fetwa de Karadhawi ordonnant le boycott de tout ce qui est danois. Il a organis� sa conf�rence, y a fait de beaux discours et a vers� les larmes d'usage. La t�l�vision �tait l� aussi et ce n'est pas par hasard. Du coup, Omar Khaled est trait� de tous les noms, sauf celui d'apostat r�serv� exclusivement aux musulmans qui ne sont pas d'accord. Le qualificatif qui revient le plus souvent est �opportuniste�. Or, si l'opportunisme a toujours le m�me sens, Karadhawi et Khaled en sont les dignes repr�sentants. Ils sont dans le camp fond� jadis par Muawiya. C'est le camp o� le r�alisme politique et les int�r�ts de caste l'emportent sur toutes les consid�rations religieuses ou morales. A contre-courant de cet islam dominant et politiquement correct, se trouvent heureusement des r�sistants comme Djamal Al- Bana, le fr�re cadet de Hassan Al-Bana, fondateur du mouvement des Fr�res musulmans. Dans une interview � Al- Arabia.net, Djamal Al-Bana, musulman et th�ologien �clair�, revient sur la question du hidjab. Il affirme qu'il n'y a rien dans l'Islam qui �taye son obligation. �Le hidjab, dit-il, a �t� impos� � l'Islam. Ce n'est pas l'Islam qui l'a impos�.� (2). Et il ajoute : �Les cheveux de la femmes ne sont pas une partie honteuse. Elle peut accomplir sa pri�re individuelle t�te nue.� Djamal Al- Bana cite alors un Hadith authentique selon lequel les hommes et les femmes faisaient leurs ablutions dans le m�me bassin � l'�poque du Proph�te. �Cette pratique a persist� du vivant du Proph�te et a surv�cu jusqu'au califat de Omar qui l'a supprim�e�, pr�cise-t-il avant d'ajouter : �Ce sont les soci�t�s masculines qui ont impos� ce regard sur la femme. La mixit� est une n�cessit� m�me si elle donne lieu � des fautes. Ce n'est pas parce qu'une personne a �t� heurt�e par une voiture qu'il faut interdire la rue aux pi�tons.� Le plus jeune fr�re de Hassan Al-Bana qui se dit �coraniste�, c'est-�-dire partisan du retour au seul Coran, comme source th�ologique, va encore plus loin. Il affirme qu'une femme a le droit de conduire la pri�re si elle en a les capacit�s.� �Si elle est plus savante que l'homme, c'est � elle de diriger la pri�re collective�, ajoute-t-il. Mon commentaire : ma tinsistich, Si Djamal, hadi ma texistich.(3) ,
A. H.

(1) Dommage qu'il ne soit pas possible de vous montrer ici une photo du personnage. �a vaut le d�tour. Pour ceux qui veulent le frisson de la peur, voici l�adresse : http//www.elaph.com/ElaphWeb/ Music/2006/3/132842.htm
(2) Le pr�sident Bouteflika a raison: le hidjab ne fait pas partie de nos traditions, le �hayek mrama�, si. Vous voyez la premi�re repr�sentante de l'Alg�rie ind�pendante � l'Onu monter � la tribune en �hayek mrama� ?
(3) Il parait que "ma tinsistich" (n'insiste pas) et "ma texistich" (�a n'existe pas) sont de graves d�viations de notre langage quotidien. Je pense, pour ma part, que ces deux n�ologismes sont tout � fait conformes aux canons du moment.

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