Panorama : DECODAGES
Quand sortirons-nous du �tout p�trole� ?
Par Abdelmadjid Bouzidi


Fin de la d�cennie 70. Le FLN, toujours parti unique, inscrit � l�ordre du jour de la deuxi�me session de son comit� central, le dossier de l��nergie et la r�solution adopt�e introduit un concept nouveau, celui de �r�serves strat�giques� et pr�conise, entre autres, de commencer � pr�parer l�apr�s-p�trole.

Au d�but des ann�es 80, une notion fait flor�s : celle d�exportations hors hydrocarbures. Sachant que nous n�avons pas et que nous n�aurons pas d�exc�dents agricoles � exporter, qu�en mati�re de services nous �tions plut�t structurellement importateurs, par exportations hors hydrocarbures, on ne pouvait entendre, d�abord et avant tout, qu�exportations de biens industriels, exportations de produits manifactur�s. 25 ans apr�s, o� en sommes-nous ? Il faut commencer par rappeler un fait constat� par tous les Alg�riens: en 2005, l�apr�s-p�trole c�est encore et toujours le p�trole. La structure sectorielle du produit int�rieur brut est en effet en 2005, la suivante :

Agriculture  7,7%
Hydrocarbures  45%
Industrie  5,2%
BTP  7,4%
Services  19,3%
DD et TVA  7,7%
A.P.  8,6%

En 1980, les hydrocarbures repr�sentaient 26% du PIB. En 2005, ils en repr�sentent 45%. Pour sa part, l�industrie, qui repr�sentait 18% du PIB en 1980, n�en repr�sente plus en 2005 que 5,2%. Il y a donc d�sindustrialisation depuis pr�s de 15 ans et en sachant que notre agriculture attend toujours sa �r�volution verte�, notre �conomie est toujours renti�re et m�me monorenti�re. En dehors des hydrocarbures, qu�exportons-nous ? Rappelons d�abord un chiffre : entre 1980 et 2003, la valeur moyenne annuelle de nos exportations hors hydrocarbures n�a pas d�pass� 500 millions de dollars courants. Maintes fois, l�objectif de 1 milliard de dollars a �t� annonc� par les diff�rents gouvernements qui se sont succ�d�, il n�a jamais �t� atteint alors m�me qu�il constitue un objectif bien modeste puisqu�il �quivaut � peine � moins de la moiti� de la facture pay�e par notre industrie pour l�importation de ses imputs et autres pi�ces de rechange, soit quelque 2,2 milliards de dollars en moyenne annuelle. L�industrie alg�rienne (publique et priv�e) ne peut m�me pas couvrir, par ses exportations, les imputs n�cessaires � son fonctionnement et reste encore loin de satisfaire � tous nos besoins en produits industriels divers. Mais ce qui est plus int�ressant encore � examiner, c�est la composition de nos exportations hors hydrocarbures. En 2005, la structure de ces exportations, qui ont atteint 800 millions de dollars, est la suivante :
Demi-produits : 67%. Il s�agit des d�riv�s suivants : m�thanol, gaz rares, ammoniac. Il y a aussi les solvants et les aromates. Point de produits manifactur�s !
Produits bruts :
Il repr�sentent 17% des exportations hors hydrocarbures. Il s�agit de d�chets ferreux et non ferreux, phosphates, zinc, sel, li�ge, peaux. Point de produits manufactur�s !
Produits alimentaires :
Ils repr�sentent 9%. Il s�agit de dattes, vins, crevettes et mollusques. Point de produits manifactur�s !
Produits finis industriels :
Hors secteurs p�trochimique. Ils repr�sentent 6% des exportations hors hydrocarbures, soit une valeur de 48 millions de dollars. Notre industrie, dans sa composante publique et priv�e, exporte pour une valeur totalement insignifiante rapport�e aux 40 milliards de dollars d�exportations globales r�alis�es en 2005. Il faut rappeler que le Maroc exporte pour une valeur de 7 milliards de dollars de produits manifactur�s et la Tunisie presque autant. Cela fait 25 ans que les pouvoirs publics sont cens�s pr�parer notre �conomie � �tre moins vuln�rable, plus diversifi�e, moins prisonni�re des hydrocarbures. Mais l�apr�s-p�trole ne peut pas �tre r�duit � une litanie r�p�t�e � sati�t� par les gouvernements qui se succ�dent. De m�me qu�il ne peut pas �tre r�duit � quelques mesurettes r�glementaires ou faiblement incitatives. L�apr�s-p�trole est une strat�gie : il s�agit de construire, par une politique volontariste, un v�ritable mod�le exportateur comme ont su le faire les pays asiatiques : Cor�e du Sud, Malaisie, Ta�wan et maintenant la Chine. Dans le cas de notre pays, quel pourrait �tre ce programme de construction d�une �conomie d�exportations ? L�Etat a, bien �videmment, un r�le important � jouer. Il a � remplir trois missions : 1) animateur, 2) facilitateur, 3) investisseur. Il s�agit d�abord d�identifier les entreprises nationales � potentiel comp�titif. Nous savons que dans notre pays existent des plates-formes industrielles autour desquelles pourront �tre construits des p�les d�excellence. Il s�agit de l�industrie m�canique (Rouiba, Constantine), l�industrie �lectronique (Bordj-Bou-Arr�ridj, Sidi-Bel-Abb�s), l�industrie sid�rurgique (Annaba), l�industrie agroalimentaire (B�ja�a), l�industrie p�trochimique (Skikda, Arzew). Il y a l� des possibilit�s pour l�Etat de travailler � faire �merger des champions qui porteront la nouvelle politique d�exportation. Ces actions se r�aliseront dans le cadre d�un partenariat avec des champions �trangers qu�il faudra rechercher et attirer. Bien �videmment, l�Etat r�alisera sa part d�investissement de mise � niveau (Etat investisseur). Mais l�Etat aura aussi un r�le d�animation en cr�ant une agence nationale de d�veloppement industriel � laquelle il confiera la mission d�animer cette nouvelle strat�gie industrielle en soutenant et en accompagnant les diff�rents p�les d�excellence. Autour des plates-formes industrielles que nous avons cit�es, l�Etat aura � cr�er des grandes �coles sp�cialis�es, des unit�s de recherche-innovation, des cercles de qualit� au sein m�me des entreprises (Etat animateur). Enfin, l�Etat aura � mettre en place une nouvelle r�glementation et de nouvelles institutions charg�es de faciliter l�acte d�exportation (Etat facilitateur). Ces quelques orientations sont formul�es dans le seul but de souligner qu�une nouvelle strat�gie industrielle exportatrice est tout � fait possible, ici et maintenant. De m�me cette contribution vise-t-elle � montrer, si besoin est, qu�une autre utilisation plus �rentable� pour le pays des disponibilit�s financi�res actuelles m�rite d��tre pens�e et d�taill�e.
A. B.

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