Pour prot�ger la flamme, il a plant� sa bougie, symbole de m�moire et d�espoir, dans un quinquet. Sous la chaleur accablante de ce 14 juin, il parcourut d�un bon pied la distance entre la place de la Libert�-de-la- Presse et la Maison de la Presse. Jeans, baskets, chemise ouverte sur la poitrine, osseux, cheveux gris, rides sur le visage, barbe de deux jours, il a conserv� le souffle long, la marche �lastique, le pas alerte, une allure de jeune homme, une forme qui vous rendrait jaloux d�un �ge aussi bien port�.
Il a port� son quinquet, bien en �vidence, � hauteur de poitrine indiff�rent aux regards �tonn�s des passants ou des badauds. Il avait envie de dire ce que repr�sentait pour lui cette journ�e du 14 juin, prenant pour oriflamme ce magnifique quinquet de cuivre et son long tube de verre dont les jeunes ne soup�onnaient m�me pas l�existence �tant n�s sous la lumi�re �lectrique et qui r�veillait chez les vieux, les bien vieux, le souvenir des soir�es �clair�es � la flamme de p�trole de ces quinquets � r�servoir de cuivre ou de verre. Personne singuli�re dans la foule, individu au milieu de la horde, autonome dans ce pays aux m�urs moutonni�res, alt�rit� dans notre culture clanique, diff�rence tranquille dans une soci�t� patriarcale, provocation sereine � l�expression libre. Je suis ! Et cette bougie est mon embl�me. Il faut avoir une sacr�e force de caract�re pour se distinguer ainsi des normes au moment o� tout passe � l�uniformit� des paroles, des costumes, des attitudes. Cette d�marche est en elle-m�me porteuse de sens, de subversion, de r�volte et tout simplement porteuse de la revendication du droit � exister de l�individu hors les barri�res et les fronti�res des normes et du socialement correct. Rien que pour cette marche flamboyante sous les yeux m�dus�s des gens socialement corrects, merci l�homme au quinquet.
M. B.

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