Panorama : A FONDS PERDUS
Les nouveaux investisseurs
Par Ammar Belhimer
ammarbelhimer@hotmail.com


M. Abdellatif Benachenhou, l'ancien ministre des Finances (1999-2001 et 2003- 2005), vient de publier Les nouveaux investisseurs, un ouvrage dans lequel il fournit une mine d'informations et livre son appr�ciation des nouveaux acteurs de la croissance qui se d�ploient en Alg�rie. L'ouvrage m�rite naturellement d'�tre lu parce qu'il �mane d'un acteur de la politique �conomique, doubl� d'un analyste avis� des pulsions commerciales et financi�res.
Il est aussi bien un acteur qu'un fin observateur. Le th�me est d'une actualit� br�lante pour une premi�re raison : l'attractivit� de l'�conomie alg�rienne qui en fait le premier pays d'accueil des investissements �trangers au sud et � l'est de la M�diterran�e en 2004 � ann�e o� elle a accueilli 5,9 milliards de dollars, devan�ant le Maroc (4 milliards), la Turquie ( 2,9) et l'Egypte (2,6). Nos partenaires traditionnels regroupent les pays europ�ens qui d�veloppent des strat�gies diff�rentes en direction de l'Alg�rie. L'auteur les traite successivement dans cinq chapitres diff�rents : �la diversit� fran�aise, �la d�termination� allemande, �l'engagement� espagnol, �la perspicacit� scandinave et �l'avanc�e� britannique. La diversit� fran�aise a pour locomotive la banque qui accompagne la mont�e en puissance des groupes dans l'agroalimentaire, l'industrie pharmaceutique et le pneumatique. Parmi les seize banques �trang�res qui se sont install�es en Alg�rie depuis l'ouverture du secteur � la concurrence, en 1990, la Soci�t� G�n�rale occupe une place � part. Soci�t� G�n�rale Alg�rie est n�e en 1999 de la rencontre de la soci�t� m�re (61%), d'actionnaires priv�s alg�riens (Fiba holding pour 29%) et de la SFI (une filiale de la Banque mondiale, pour 10%) � avant de racheter leurs parts en 2004. SGA est aujourd'hui la premi�re banque priv�e en Alg�rie avec un capital de 2,5 milliards de dinars, un portefeuille de 25.000 clients, un r�seau de treize agences qui doit s'�tendre � une quarantaine d'ici fin 2007. La Soci�t� G�n�rale a cependant �t� �vinc�e par BNP Paribas pour la reprise du CPA, la cinqui�me des six banques publiques avec 15% de leur bilan global et un million de comptes bancaires servis par 120 agences. Les banques fran�aises accompagnent avec succ�s l'activit� d'op�rateurs comme Aigle Azur dont le fret assure le plus gros du chiffre d'affaires estim� � 400 millions d'euros, Go Fast en lice pour l'acquisition de la filiale dite Nord de la Cnan, Danone, Michelin, Total, KPMG ou Alstom. Les entreprises fran�aises sont leaders dans les branches suivantes : la banque, le m�dicament, le yaourt, les boissons gazeuses et le pneumatique. �La d�termination� allemande est illustr�e par Siemens dont les capacit�s d'adaptation sont unanimement reconnues : hier l'�lectricit�, aujourd'hui la t�l�phonie et le m�tro, demain le chemin de fer. Cette adaptation a pour fil conducteur le passage du commerce � l'investissement. �L'engagement� espagnol longtemps circonscrit � l'entreprise Gragados qui a particip� avec succ�s aux appels d'offres de r�alisation des grandes infrastructures hydrauliques et de transports couvre aujourd'hui les secteurs de l'�nergie (avec Cepsa, Repsol, Gas natural et Iberdrola) perturb� par un regain de nationalisme dans leurs anciennes zones de pr�dilection d'Am�rique latine, mais aussi dans le domaine du dessalement (avec Geida), des engrais (avec Fertiberia). �La perspicacit� scandinave contraste fort avec le militantisme des ann�es qui avaient ouvert la voie aux fournisseurs su�dois de bois. Aujourd'hui, elle repose sur les �paules de Siemens, Statoil, Scania et Novordisk. �L'avanc�e� britannique tient � la forte pr�sence de British Petroleum, dans le p�trole, Rio Tinto, dans les mines, le groupe bancaire HSBC et GlaxoSmithKline qui veille � tirer le maximum de profit de la manne des 800 millions d'euros que repr�sentent les importations annuelles de m�dicaments. L'Europe semble incapable de contenir �l'opportunisme� am�ricain et �l'efficacit� canadienne. Les cinq milliards de dollars investis par les Am�ricains dans notre pays sont tous localis�s dans les hydrocarbures o� leurs soci�t�s d�tiennent le plus grand nombre de contrats de recherche et d'exploration. Anadarko donne l'image d'une prise de risque couronn�e de succ�s, d'une coop�ration exemplaire avec Sonatrach, d'un formidable effet d'entra�nement sur les services p�troliers et d'un atout majeur pour la pr�servation de l'environnement et de la s�curit�. Anadarko, Arco, Amerada Hess et d'autres compagnies p�troli�res am�ricaines sont accompagn�es par Citibank depuis 1990. Dans leur sillage ont afflu� Ionics pour le dessalement, Pfizer pour le m�dicament, Procter and Gamble dans la poudre et les cosm�tiques. �L'efficacit� canadienne est illustr�e par SNC Lavalin, groupe d'ing�nierie et de construction d'infrastructures strat�giques dans l'eau, l'�lectricit� et le transport. Ce pionnier canadien en Alg�rie est constructeur, investisseur, passeur de qualifications et partenaire, souligne M. Benachenhou. L'autre pr�sence canadienne qui m�rite d'�tre relev�e est celle de P�trocanada, la plus ancienne des soci�t�s p�troli�res dans notre pays. First Calgary Petroleum a fait mieux qu'elle, pr�cise l'auteur. Elle a obtenu plusieurs permis d'exploration, �d�couvert une belle �patate� et investi 200 millions de dollars dans le d�veloppement du gisement. � Ces partenaires traditionnels du Nord sont soumis � rude comp�tition de la part des pays �mergents : �La foi� indienne, �la pouss�e� chinoise, �la vague� �gyptienne et �la pers�v�rance � arabe. La signature des accords de partenariat entre Sider et LNM cr�ant Ispat Annaba en novembre 2001 affecte 70% des parts de la nouvelle soci�t� au groupe indien. Hausse de la production d'acier, utilisation plus efficace des ressources de production, accroissement des ventes de produits sid�rurgiques sur le march� national, installation d'un deuxi�me laminoir de rond � b�ton : toutes ces actions lui ont permis de franchir d�s 2004 le cap de 130 millions de dollars de r�sultat net. Si bien que �dor�navant, l'entreprise peut voler de ses propres ailes, se passer des exon�rations fiscales de la part d'un Etat, qui a �t� fort g�n�reux, et se passer aussi d'une protection tarifaire surann�e�. �La pouss�e� chinoise est particuli�rement sensible dans le domaine du p�trole (avec Sinopec et CNPC), des march�s de la construction (avec CSCE et Cetic), mais elle est peu pr�sente dans l'investissement. �La vague� �gyptienne est port�e par Orascom dont la filiale t�l�coms a r�alis� un �petit miracle� en d�but 2003. La filiale enregistre des profits croissants (qui ont atteint 300 millions de dollars en 2005) et un nombre impressionnant d'abonn�s (8 millions pour 64% de parts de march�). L'autre filiale du groupe, Algerian Cement Company, est tout aussi active : elle a conquis 20% du march� du ciment par une production locale en un temps record (trois ans). La cimenterie de M'sila produit 4 millions de tonnes de ciment gris pour desservir le march� r�gional de quatre wilayas en d�veloppement rapide. ACC a finalis� en d�cembre 2005 le montage financier pour la production de ciment blanc � Mascara, un produit totalement import� et dont la consommation annuelle est estim�e � 100.000 tonnes. �La pers�v�rance� arabe est illustr�e par l'attribution, en f�vrier 2004, de la troisi�me licence mobile � l'op�rateur El Wataniya du groupe kowe�tien Kipco dont les activit�s couvrent les assurances, les banques et la t�l�phonie. Deux ans apr�s l'achat de la licence, El Wataniya annonce d�j� des b�n�fices avec 11% de parts du march�, ce qui est consid�rable pour 18 mois de pr�sence et face � une concurrence tr�s rude. Lafico, le holding libyen charg� des investissements � l'�tranger, participe au capital de soci�t�s mixtes charg�es de r�aliser trois �Sheraton� (Alger, Oran et Hassi Messaoud) � hauteur de 70% du capital. Il s'agit de la conversion d'�normes d�p�ts effectu�s en 1987-88 aupr�s de la Banque d'Alg�rie (345 millions de dollars) en investissements.
A. B.

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