Actualit�s : CONTRIBUTION
Pour un pacte de d�veloppement sportif
Par Si Mohamed Baghdadi


Cela a �t� dit et r�p�t� � sati�t�, le ministre de la Jeunesse et des Sports a eu pour mission d�assainir le mouvement sportif national. Certains ont parl� de nettoyer les �curies d�Augias. Et il n�y a pas �t� de main morte, provoquant vagues et turbulences au sein des f�d�rations nationales ; mais aussi un �moi certain, au CIO et dans les f�d�rations internationales, notamment celles de football et d�athl�tisme, les plus grosses cylindr�es du sport mondial. Des �baronnies� vacillent, certaines naviguent dans l�incertitude, alors que d�autres sont d�j� tomb�es.
Des accusations sont lanc�es de part et d�autre ; des insultes ont m�me fus� loin de grandir leurs auteurs. Des menaces ont �t� brandies, des anath�mes prof�r�s, et l�on a pouss� l�outrecuidance jusqu�� en appeler � l�arbitrage du chef de l�Etat.
Pourquoi risquer l�excommunication ?

Les techniciens, les athl�tes, les sportifs, les amoureux du sport, du fair-play, des beaux gestes et de l��thique sportive n�ont rien compris, ou pas grand-chose, � cet �norme chambardement, � cet assourdissant charivari qui a consomm� tant de temps et d��nergie, bris� des carri�res et des hommes, pour des r�sultats que l�on ne per�oit pas encore avec pr�cision dans toute leur ampleur et leurs effets n�gatifs. Tant de bruit et de fureur pour un jeu qui n�en valait peut-�tre pas la chandelle. En tout cas, pas au point de risquer l�excommunication du sport alg�rien � et de ses athl�tes qui luttent pour gagner une place au soleil d�un monde comp�titif impitoyable � de la part des f�d�rations internationales qui ont leur politique, leur logique et leurs statuts, avec lesquels on peut ne pas �tre d�accord, mais qui sont l�.
Mais au fait, de quoi s�agit-il au juste ? Et quels sont les v�ritables enjeux ?
Il est maintenant reconnu que, depuis pr�s de quinze ans, l�Etat s��tant progressivement d�sengag� de la chose sportive, le mouvement sportif national a �t� pratiquement livr� � lui- m�me, ou presque. Il est incontestable que les ASP, prises en charge financi�rement par les plus grosses entreprises nationales, d�s la mise en application biais�e du code de l�EPS, ont g�n�r� des app�tits et aiguis� des int�r�ts, chez tous les protagonistes : dirigeants, entra�neurs et athl�tes. Cette p�riode de vaches grasses a pu faire illusion et donner l�impression que l�on venait de d�couvrir la panac�e pour assurer le d�veloppement durable du sport national. Toutefois, aux premiers plans d�ajustements structurels, dict�s par le FMI, le r�veil allait �tre brutal. Il fallait d�graisser, et c�est le sport et la jeunesse qui commenc�rent � payer les frais de cette op�ration chirurgicale sans �tat d��me ni r�mission.
Reculades et d�p�rissement de l�Etat

Au cours de la m�me p�riode, le pays entrait dans l��il du cyclone terroriste. Le d�sastre et le d�sordre gagnaient, comme un chancre, toutes les sph�res de l�activit� nationale. C�est ainsi que, durant ces quinze ann�es d�outrage, de rapt et de rage, et, pour aller � l�essentiel, l�on vit grandir l�influence des forces de la politique et de l�argent au sein du MSN. Leur intrusion anarchique ou calcul�e, de plus en plus pernicieuse et canc�rig�ne, allait causer les d�g�ts que l�on identifie aujourd�hui avec stupeur. Et ce, dans le m�me temps o� l�on d�couvre que le pays a �volu�, que les valeurs et le rep�res ont aussi chang� de cap et cinglent vers le large de tout ce qui rapporte, ici et maintenant, le maximum de profits. Les jeunes, las d�attendre d�hypoth�tiques emplois de la part d�un syst�me rentier, d�cident d�arracher leur place au soleil des adultes, en cr�ant toutes les fili�res de l��conomie informelle repr�sentant, aujourd�hui, 40% du PIB. Le trabendo est d�sormais reconnu. Il a pignon sur rue, et gangr�ne l��conomie administr�e, en accentuant son niveau de corruption. Terrorisme, trabendo et effets n�fastes de la mondialisation commerciale et financi�re entra�nent l�Etat dans les reculades et renoncements de la d�r�gulation, de la d�r�glementation et de la privatisation forc�e ; triptyque infernal auquel nulle nation n��chappe, surtout celles des pays en voie de d�veloppement.
Le pouvoir : enjeu essentiel !

C�est dans ce contexte r�el, qui voit l�Etat c�der le pas � l�intervention des multinationales et son r�le se r�duire � leur servir de marchepied ou de vicariat, qu�il faut appr�hender et appr�cier les d�rives affectant le monde �conomique, social, culturel et �ducatif et, enfin le sport. Le sport ne vit pas en dehors de la soci�t�. Il y baigne et se trouve affect� par les m�mes maux et les m�mes travers. L�argent et la politique y font bon m�nage, et y occasionnent des ravages connus de tous. Des int�r�ts et rentes de pouvoir ou de situation s�y d�fendent, des alliances s�y tissent et se d�font au gr� des rapports de force. Aujourd�hui que le pouvoir veut reprendre sa place, r�affirmer son autorit� et exercer ses fonctions de contr�le et de r�gulation, voil� que la maison du sport s�en trouve surprise et �branl�e. Ne nous y trompons pas, l�enjeu essentiel est un enjeu de pouvoir, puisque l�Etat veut r�affirmer sa position de ma�tre du jeu, face � une soci�t� sportive qui, depuis 1989, s�est dot�e de r�gles nouvelles, forg�es de nouvelles pratiques, assurant sa quasi-autonomie par rapport au pouvoir de l�Etat, sauf au plan financier. Il est donc tout � fait normal que la soci�t� sportive appelle la d�mocratie � la rescousse, d�s lors que l�Etat veut � nouveau jouer son r�le, en imposant ses hommes, en modifiant lois, d�crets et r�gles du jeu.
Pour sortir de la crise

Et dans ce jeu du pouvoir et de l�autorit�, dans ce bras de fer du bruit et de la fureur, l�on finit par perdre de vue, des deux c�t�s de la barri�re, l�essentiel de la mission : d�abord, d�velopper la pratique de l��ducation physique et du sport au b�n�fice du plus grand nombre de jeunes et de citoyens ; pour, ensuite, assurer la repr�sentation du pays au plan international ; c�est-�-dire construire un sport comp�titif et performant au plus haut niveau. La crise actuelle a pour avantage de nous recentrer sur le probl�me essentiel que l�on a tendance � perdre de vue, obnubil�s par les conflits secondaires et les querelles d�egos ou de chapelle : comment stimuler le d�veloppement sportif dans tous ses compartiments et assurer leurs n�cessaires et compl�mentaires articulations ? Le d�veloppement sportif, nous le savons tous, est une �quation � quatre variables interd�pendantes : d�abord les sportifs, que l�on oublie le plus souvent sur le bord du chemin, tout en �tant l�alibi de tous, puis les entra�neurs, les dirigeants et officiels, et les repr�sentants de l�Etat, rassembl�s au sein du minist�re de la Jeunesse et de Sports � tous les niveaux de la hi�rarchie administrative. Pour l�assurer, il est indispensable de sortir de ce face-�-face st�rile entre l�Etat, d�une part, et la soci�t� sportive, de l�autre (soci�t� sportive, partie int�grante de la soci�t� civile), pour d�finir fonctions et r�les devant �tre assum�s par les uns et les autres, pour mettre en �uvre, apr�s dialogue, concertation et clarification, les plans et/ou programmes d�un d�veloppement sportif durable, � l�abri des remaniements minist�riels ou des changements de majorit�, au sein d�une assembl�e g�n�rale �lective. C�est dans cette perspective qu�il me para�t opportun de convoquer des �tats g�n�raux du sport alg�rien, pour, d�une part, affronter, avec le maximum de chances, l��ch�ance imm�diate des Jeux africains (nous ne sommes plus qu�� dix mois de la date fatidique), celle des Jeux olympiques de P�kin et, � plus long terme du d�veloppement sportif dans son ensemble. Ces �tats g�n�raux, s�ils venaient � se tenir, permettraient de rassembler les forces sportives du pays, pour d�finir les grands axes d�un pacte national du d�veloppement sportif (un autre PNDS), o� chaque partie s�engagerait � promouvoir, en articulation avec les autres, dans le respect du droit, g�n�r� par la concertation, le dialogue et le d�bat d�mocratique. Les Jeux africains sont � nos portes. L�heure est aux urgences et aux r�conciliations authentiques. Car il n�est de �guerre plus juste� que celle consistant � contribuer au d�veloppement de son pays et non � sa ruine. Le docteur Mohammed Yunus et sa Grameen Bank, r�cent prix Nobel de la paix, viennent de le confirmer avec �clat. Puissions-nous nous inspirer de ce f�cond exemple !
S. M. B.

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