Quand des dizaines de milliers de personnes avaient investi le centre de Kiev (Ukraine) durant l�hiver 2004, les m�dias occidentaux �taient aux anges, multipliant les reportages, donnant la parole � l�opposition men�e par celui qui deviendra chef d�Etat, Viktor Youchtchenko, qualifiant cette �r�volution orange� comme un exemple majeur devant �tre suivi par les r�publiques de l�ex-URSS. Et c�est vrai.
L�Ukraine �tait dirig�e par un pouvoir politicomafieux soutenu pour des raisons strictement g�opolitiques par la Russie de Poutine. Cette derni�re se m�fiait, non sans raison, que l�Ukraine n�adh�re � l�Otan comme le voulait George Bush. Dans cette affaire, l�aspiration l�gitime � la d�mocratie et aux libert�s des Ukrainiens a �t� instrumentalis�e par les Occidentaux. Ce qui importait � leurs yeux, c��tait d�isoler un peu plus la Russie, coupable de vouloir leur parler d��gal � �gal et de ne pas ouvrir ses march�s aux multinationales, afin de la faire plier. A ce stade, soyons clairs et ouvrons une parenth�se : le r�gime de Poutine n�est pas ma tasse de th�, et ce, en raison, des atteintes r�p�t�es aux libert�s et de sa politique r�pressive en Tch�tch�nie, car on ne r�gle pas la question nationale tch�tch�ne militairement mais politiquement. Bref, s�agissant du Liban o�, apr�s la mar�e humaine de vendredi � pr�s d�un million et demi de personnes, dont plus de 100 000 passent leur nuit sur les places Riadh-Solh et des Martyrs dans le centre de Beyrouth, je lis dans la presse occidentale et j��coute les m�dias fran�ais et anglosaxons, que l�opposition libanaise men�e par le Hezbollah, aux ordres de Damas et T�h�ran, cherche � provoquer la guerre civile en provoquant la chute d�un gouvernement d�mocratiquement �lu ! Etant un t�moin direct de cet �v�nement, je peux affirmer que les gens qui demandent, � tort ou � raison, le d�part du gouvernement, ne sont pas, loin s�en faut, que des militants et sympathisants du Hezbollah. Dimanche, par exemple, ils �taient plusieurs milliers de Libanais chr�tiens assistant dans la rue � une messe � l��glise Saint-Georges qui, au demeurant, ne peut contenir que quelques centaines de personnes, et ce, avant de se rendre sur le lieu du rassemblement. Eh bien, vous pouvez v�rifier : ce fait a �t� pass� sous silence par les m�dias occidentaux. Comme a �t� pass� sous silence le fait que ce dimanche a �t� celui des �massihs� (chr�tiens) favorables � Michel Aoun et Sleimane Frangi�. En effet, ce jour-l�, les Libanais chr�tiens ont d�ferl� par dizaines de milliers dans le centre de Beyrouth comme pour d�mentir que la gigantesque manifestation de vendredi n��tait pas le seul fait du Hezbollah. V�tus de couleur orange � la couleur du parti chr�tien, le Courant patriotique libre (CPL) du g�n�ral Michel Aoun � et de vert � celle du parti chr�tien des Marada de Sleiman Frangi� � ils scandaient �Siniora fel, fel� ( Siniora, va-t-en) et dansaient sur des airs patriotiques de Magda Roumi qui, beaucoup de ses fans alg�riens ne le savent pas, est de confession chr�tienne. Le probl�me est que ce rassemblement populaire d�range la strat�gie am�ricaine et fran�aise mais aussi arabe dans la r�gion. La France et les Etats-Unis ne le soutiennent pas. Qui plus est, le Liban n�est pas l�Ukraine : c�est un ennemi d�Isra�l ! Et � l�unisson, Washington, Paris, Londres, Berlin, le Caire et Riyadh (Arabie saoudite) soutiennent le gouvernement de Fouad Siniora. Pour le Caire et Riyadh, un mouvement populaire pluriel s�inscrivant dans le cadre des valeurs de la d�mocratie et des libert�s est un mauvais exemple pour les r�gimes autoritaires arabes. Ce qui importe, � leurs yeux, c�est le statu quo. En tout �tat de cause, une chose est s�re : ce qui se passe au Liban montre que les lignes de fracture ne sont plus religieuses � musulmans contre chr�tiens � mais politiques. Et tant mieux que �a d�range les apprentis sorciers occidentaux, leurs alli�s dans la r�gion et leurs relais m�diatiques !
H. Z.

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