Panorama : DECODAGES
STRAT�GIE INDUSTRIELLE
Un dossier de premi�re importance
Par Abdelmadjid Bouzidi


Notre pays a besoin d�une nouvelle strat�gie industrielle. Nous r�p�tons cela depuis la fin de la d�cennie 90. L�industrie est indispensable � une croissance �conomique durable et est n�cessaire � l��quilibre macrofinancier de l��conomie � moyen et long terme. Le gouvernement �tudie actuellement un document portant strat�gie industrielle et pr�sent� par le ministre des Participations (et non pas le ministre de l�Industrie� encore une �originalit�.) L��v�nement est s�rieux et m�rite d��tre soulign�.
Il est d�ailleurs �tonnant qu�un tel �v�nement, majeur pour le devenir de notre �conomie, n�ait pas �t� annonc� solennellement par le pr�sident de la R�publique lui-m�me. La strat�gie industrielle de l�Alg�rie est tout de m�me plus importante que la mise en valeur de la Baie d�Alger ! Bien �videmment, cet �v�nement m�rite aussi d�bat. Le gouvernement va-t-il organiser ce d�bat ? Va-t-il seulement le permettre ? Bien s�r, nous parlons d�un vrai d�bat et non pas d�un pr�che comme celui qui a r�uni les partenaires sociaux et le gouvernement (en fait, le gouvernement avec lui-m�me) � l�occasion de l�adoption du pacte �conomique et social, un document insipide et sans int�r�t dont personne ne parle plus et qui montre bien que notre pays a rat�, encore une fois, une formidable occasion de dynamiser la d�mocratie sociale, de vivifier le dialogue social. S�agissant de la strat�gie industrielle, celle-ci se justifie par trois constats largement �tablis :
1- L�industrie nationale affiche depuis plus de dix ans des performances bien faibles et malgr� le desserement de la contrainte financi�re ext�rieure, n�arrive toujours pas � sortir de la croissance z�ro.
2- Les ressources tir�es des hydrocarbures � c�est-�-dire les ressources du pays � sont volatiles et ne peuvent garantir � elles seules, sur le moyen et long terme, le financement du d�veloppement. Il faut exporter �autre chose� que le p�trole et le gaz.
3- Les mutations de l�industrie mondiale ont d�class� notre �mod�le industriel� enferm� dans les productions standardis�es et abrit� de la concurrence �trang�re, comme d�ailleurs de toutes contraintes d�efficacit�. Le maintien de l�industrie nationale dans sa structuration actuelle conduirait � p�renniser trois handicaps s�rieux :
a) accepter les faibles niveaux actuels de productivit� du travail et de rendement du capital et se r�signer � perdre r�guli�rement des parts de march� int�rieur et � rester incapables de conqu�rir des march�s ext�rieurs ;
b) compromettre s�rieusement les �quilibres financiers d�j� pr�caires des entreprises et les condamner � la faillite ;
c) continuer � d�pendre des recettes d�hydrocarbures incertaines et insuffisantes pour assurer le fonctionnement de l��conomie et de la soci�t�.
Quel sont les objectifs � assigner � la strat�gie industrielle ?

Nous en identifions trois :
1- Mettre fin � la crise de performance de l�industrie nationale
 En s�attachant � en r�duire les facteurs de vuln�rabilit�, notre industrie tra�ne depuis longtemps cinq handicaps :
a/ la faible densification du tissu industriel national ;
b/ l�orientation quasi exclusive de notre industrie sur le march� int�rieur qui se r�duit de plus en plus et qui ne procure pas les devises n�cessaires pour financer les approvisionnements dont ont besoin les entreprises industrielles ;
c/ la forte d�pendance de notre industrie des approvisionnements ext�rieurs en mati�res premi�res, demi-produits et pi�ces de rechange.
d/ le retard technologique et la ma�trise insuffisante des proc�s de production et de reproduction.
e/ l�insuffisance des capacit�s manag�riales et leur retard dans le domaine des m�thodes modernes de gestion.
2- Le second objectif � atteindre est celui de l�am�lioration de la balance devises du secteur industriel

L�industrie nationale importe pour plus de 2 milliards de dollars par an pour ses besoins de production et exporte en produits manufactur�s pour 1 million de dollars ! Comment am�liorer la situation ? Deux orientations :
� Parachever le processus de substitution � l�importation en int�grant de plus en plus le tissu industriel national. Notre industrie doit diminuer sa d�pendance des importations pour fonctionner.
� Pr�parer notre industrie � r�ussir sa nouvelle insertion dans le march� mondial. Il s�agit de valoriser nos avantages comparatifs et faire �merger progressivement des activit�s industrielles d�exportation susceptibles de diversifier les ressources d�accumulation. Et encore une fois, l�exportation de produits manufactur�s proc�de de la mise en place d�un v�ritable mod�le exportateur.
3- Le troisi�me objectif concerne l�augmentation de la part du secteur priv� dans l�industrie nationale
Cet objectif sera atteint tant par des op�rations de privatisation que par des mesures incitatives � l�investissement nouveau. Il faut en effet rappeler que la situation actuelle de l�industrie nationale est marqu�e par la pr�dominance du secteur public. Les entreprises industrielles priv�es qui repr�sentent plus de 90% du nombre d�entreprises dans l�industrie ne produisent que pr�s de 20% de la valeur ajout�e industrielle et occupent 21% de la main-d��uvre.
Dans quel cadre global devra �tre pens�e la strat�gie industrielle ?
C�est, bien s�r, � l�Etat qu�il revient d�afficher ses choix strat�giques et de se repositionner en cons�quence. C�est � l�Etat d��tablir les priorit�s, d�identifier les moyens d�intervention ainsi que les mesures institutionnelles et incitatives de soutien et d�encadrement (Etat animateur et facilitateur). Quatre orientations m�ritent d��tre rappel�es ici qui doivent guider les actions au cours des ann�es � venir :
1/ La restructuration de l�industrie nationale, en particulier celle relevant du secteur public, doit s�effectuer en r�f�rence au principe de d�sengagement progressif de l�Etat des activit�s concurrentielles au profit des initiatives priv�es. Toutefois, la complexit� du processus de restructuration industrielle et les enjeux qu�il charrie plaident pour la n�cessit� de maintenir la pr�sence de l�Etat en tant qu�actionnaire durable ou temporaire selon les cas dans un contexte bien �videmment d�monopolis� et ouvert au partenariat. Ainsi, l�Etat devra �tre pr�sent dans les branches n�cessaires � la densification du tissu industriel : m�tallurgie, m�canique, industries �lectrique et �lectronique... Dans les branches o� le potentiel d�avantages comparatifs existant permet de construire une comp�titivit� : p�trochimie, gazochimie, ciments.
2/ La seconde orientation touche � l�am�lioration des performances du capital industriel disponible. Notre industrie a besoin de recourir aux alliances et au partenariat avec des champions mondiaux pour acc�der � la technologie, � l�expertise manag�riale, � la connaissance des march�s ext�rieurs.
3/ L�investissement productif, l�investissement de capacit� sera le fait de plus en plus du capital priv� national et �tranger. L�Etat doit construire l�attractivit� du site Alg�rie. Les retards pris dans ce domaine sont consid�rables.
4/ Une mesure dont on a souvent parl� mais qui est encore � l��tat de litanie est celle qui concerne le mode de financement de l��conomie. Il est clair que l��tat de l�interm�diation bancaire et financi�re dans notre �conomie est un des principaux facteurs bloquants : banques inefficaces, march�s des capitaux inexistants, produits bancaires et financiers largement insuffisants. Il y a bien s�r beaucoup � faire. Comme on peut le voir, l�adoption d�une strat�gie industrielle puis sa mise en application exigent d�abord un d�bat s�rieux sur l��tat des lieux et les options � retenir. Ce qui est en jeu ici c�est bien le devenir de notre �conomie. Plus que partout ailleurs, il faut que fonctionne pleinement ici le syst�me des �trois D� : diagnostic, dialogue, d�cision.
A. B.

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