Panorama : KIOSQUE ARABE
Des milices � l'universit� Al-Azhar
Par Ahmed HALLI
halliahmed@hotmail.com


C'est l'hebdomadaire cairote Rose-al-Youssef qui a r�v�l� les faits : le 10 d�cembre dernier, des �tudiants Fr�res musulmans ont fait une d�monstration de force martiale sur le campus de la v�n�rable universit� Al-Azhar. Les photographies publi�es dans la revue montrent des �tudiants portant des tenues paramilitaires, avec le visage masqu� par un keffieh. Autour de leurs t�tes, ils ont ceint un bandeau portant cette inscription : "Samidoun" (Nous restons fermes, nous r�sistons).
Ce n'est pas le slogan qui a choqu� mais la nature de la parade elle-m�me : les "�tudiants" islamistes se sont livr�s, en effet, � des d�monstrations de karat�, comme seuls ces gens-l� savent en faire, loin du champ de bataille. Bien entendu, la police est intervenue pour disperser cet embryon de milice. Une fa�on pour le pouvoir de se d�marquer d'un alli� nouveau et encombrant : le mouvement des Fr�res musulmans. La presse publique qui a fait cause commune avec l'islamisme dans l'affaire du hidjab a embouch� les trompettes de l'indignation. Elle a d�nonc�, � travers cette d�monstration de force paramilitaire, la renaissance de la fameuse "Organisation secr�te" que le mouvement int�griste avait mise sur pied dans les ann�es quarante. Cette organisation �tait charg�e, entre autres, de la liquidation des adversaires politiques du mouvement de Hassan Al-Bana. Conform�ment au sacro-saint principe de dissimulation, les responsables "fr�rots" ont ni� que cette parade ait eu un caract�re paramilitaire et agressif. "Ce n'�tait qu'une mise en sc�ne, a rassur� le guide supr�me du mouvement, Mehdi Akef, en rappelant que son parti avait renonc� � l'usage de la force. "Alors, � qui est destin�e cette parade ? r�plique notre confr�re �gyptien Achraf Abdelkader dans le magazine Elaph. Qui a pratiqu� le lavage de cerveau sur ces jeunes �tudiants ? Qui a ramen� des professeurs d'arts martiaux pour les entra�ner � ces disciplines? Est-ce que ce ne sont pas les �officiers� des �Fr�res�. Et si le �Hitler �gyptien� a adopt� �une m�thode r�formiste pacifique et progressive�, qu'est-ce qui l'a pouss� � mobiliser ces �tudiants et � les inciter � une telle d�monstration de force ?" M�lant la d�rision et l'indignation, Hamdi Rizk f�licite le mouvement des Fr�res musulmans pour cette nouvelle conqu�te. "En attendant la premi�re op�ration-suicide contre le r�gime d'occupation �gyptien, le mouvement des Fr�res musulmans a baptis� ses premiers commandos-suicides, �crit-il. F�licitations au guide Akef, au bureau de la guidance et au madjlis choura du mouvement pour cette premi�re promotion de kamikazes. Je vous f�licite de tout c�ur et � l'avance pour la premi�re action de "djihad" que vous allez lancer sur la place "Ettahrir" pour en �radiquer les sans-hidjab (moutabaridjate) et les la�cs (�) Et vous qui appelez � dialoguer, � contenir et � boire l'eau du �fleuve fr�re musulman�, n'avez-vous pas honte apr�s avoir vu toutes ces photos publi�es ? Quel est le fou qui s'imagine que ces gens nous veulent du bien avec de tels comportements ?". Dans le m�me quotidien, le journaliste Kha�ri Ramadhan ne cache pas son inqui�tude. "Le r�gime a-t-il atteint un tel point de faiblesse qu'il incite ces gens � montrer publiquement quel grand danger nous menace ? Je regarde la soci�t� cibl�e par ces partisans de la terreur et je d�couvre qu'elle est malade et vaincue. Les chiffres d�filent sous mes yeux et je sens les dangers qui planent sur nos t�tes : 7 millions de handicap�s, 8 millions sont atteints d'une affection virale du foie, 7 millions de ch�meurs et des millions d'hommes souffrant d'impuissance sexuelle. 9 millions de c�libataires. Et si nous excluons de ces chiffres les enfants et les vieillards, que nous reste-t-il ? Et qui pourra affronter ces milices dont tout indique qu'elles sont diss�min�es partout, pr�tes � ex�cuter un plan quelconque ? Le lien est peut-�tre arbitraire mais je consid�re que le syst�me immunitaire de la soci�t� est d�truit, ce qui a permis l'apparition de toutes les petites et grandes maladies. Le virus s'est r�pandu et s'est g�n�ralis� et je ne vois pour mes enfants qu'un avenir de peur et de terreur." Sur un ton aussi pessimiste, Hassanein Kerroum, qui excelle dans la satire sociale, traite du m�me sujet dans le quotidien londonien Al-Quds. "Oui, souligne-t-il, le r�gime �gyptien est un fruit pourri et le �Hitler d'Egypte� (Akef) tend d�j� la main pour le couper." Rebondissant sur la question de l'impuissance sexuelle, il vitup�re les apprentis kamikazes qui pensent que le paradis est la maison des plaisirs sexuels. "Le paradis est un lieu pour ceux qui ont la foi et qui ne sont pas des frustr�s. C'est un lieu de bonheur spirituel o� on ne trouve pas sur les lits des traces de sang des vierges �hourris�. Ce n'est pas, non plus, un endroit pour les �martyrs� qui tiennent leur phallus dans la main, envelopp� dans une armature d'acier, comme le font les kamikazes du Hamas. Dieu m'est t�moin que les �fr�res musulmanisants�, � Al-Qaida, Hamas ou en Egypte, mentent � une jeunesse frustr�e." Revoil� notre professeur kowe�tien Ahmed Baghdadi qui ne compte plus que sur une intervention occidentale pour imposer la d�mocratie dans les pays arabes. Reprenant sa chronique habituelle dans le quotidien Al-Siassa, Ahmed Baghdadi la consacre aux r�centes �lections � Bahre�n. Brodant sur le th�me de "La belle et la b�te", il compare la d�mocratie � une belle, prisonni�re des griffes de la b�te (les islamistes) qui joue avec elle avant de la d�vorer. "Ce qui est regrettable, note-t-il, c'est que les peuples arabes observent ce monstre qui s'appr�te � tout d�vorer, sans r�agir. Ils ont sans doute peur des groupes religieux ou bien ont-ils l'espoir d'�tre pay�s de retour par des avantages mat�riels, des postes ou des influences." "De plus, note encore Ahmed Baghdadi, m�me les constitutions actuelles n'�chappent pas aux assauts de la b�te. Les islamistes appellent � changer la Constitution pour �riger un Etat religieux. Ils militent aussi pour l'islamisation des lois, m�me si celles-ci sont en contradiction avec la d�claration universelle des droits de l'homme. Bien plus, ils d�nigrent syst�matiquement et falsifient le sens de cet acquis de l'humanit�." "La b�te s'attache aujourd'hui � d�manteler l'enseignement priv� � l'instar de ce qu'elle a fait � l'enseignement public sous couvert d'islamisation. L'enseignement civil n'est plus le terrain o� s'exercent les esprits libres et la pens� logique. La terminologie religieuse r�gne d�sormais en ma�tre dans les syst�mes �ducatifs, y compris dans les disciplines scientifiques. Si vous pensez que l'Alg�rie est � l'abri de ces m�saventures, demandez- vous pourquoi la r�forme du syst�me �ducatif tourne en rond. Et si vous n'�tes pas totalement convaincus, allez devant les instituts qui forment nos enseignants et observez les accoutrements des �l�ves. Sachez, aussi, que des adolescentes sont somm�es aujourd'hui de se mettre sous hidjab dans l'�cole r�publicaine, sinon� J'ai ou�-dire, enfin, que des enseignantes, � peine sevr�es, se croient autoris�es � donner des coups de pied � des adolescentes, dans les coll�ges de la r�publique o� les ch�timents sont interdits. Et si une m�re proteste, pour peu qu'elle soit divorc�e, on lui ass�ne que la prof, tireuse de coups francs, est une "ustaza muhtarama". Aux yeux de la sainte ligue, le professeur qui a fait le p�lerinage est autoris� � cracher sur une coll�gienne. Et j'en passe, et des pires. Vous avez bien raison, Monsieur le Ministre du Culte, l'Alg�rie n'est pas un Etat la�que ! En affirmant cela, vous avez tout dit. Il ne reste plus qu'� voter les lois idoines, les choses seront plus claires pour tout le monde.
A. H.

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