Culture : BIBLIOTHEQUE NATIONALE/RENCONTRE LITTERAIRE AUTOUR DU DERNIER ROMAN DE MOULOUD FERAOUN
"La cit� des roses" exhum� de l'oubli


Une rencontre litt�raire autour de l�in�dit de M. Feraoun s�est tenue � la BNA dimanche dernier. Exhum� de l�oubli, extirp� d�une gangue tiss�e par 50 ans de silence, La cit� des roses rena�t par la gr�ce d�une jeune maison d��dition Yamcom, qui en fait sa rentr�e litt�raire, rentr�e fracassante, au demeurant. C�est � l�universitaire et critique litt�raire Mohamed Lakhdar Maougal qu��choit l�honneur de pr�senter l��uvre in�dite et posthume.
D�embl�e, le conf�rencier justifie la non-parution du roman chez Seuil, l��diteur d�origine : celui-ci avait exig� certains r�ajustements � apporter au texte initial, lesquels ont fait l�objet d�une fin de non-recevoir de la part de l�auteur. Le roman ne sortira du silence qu�un demi-si�cle plus tard. Puis, l�analyse se focalise sur le terme �cit� dans le titre. Ce r�f�rent renvoie � une appellation antique qui correspond, selon le conf�rencier, � un type de culture m�diterran�enne, dont deux composants, l�amour et la mort, en constituent les fondements tragiques. La construction du roman en deux parties suivies d�un �pilogue pr�sente une intertextualit� avec le roman L��tranger de A. Camus, qui pr�sente une structure identique. Premi�re partie : mise en place du d�cor, pour Feraoun et vie quotidienne d�un employ� de bureau pour Camus, et seconde partie, rencontre avec la jeune femme pour l�un et jugement et isolement pour l�autre. Le premier personnage du roman, directeur d��cole, est conscient de sa fonction dans un monde tragique, et ce n�est pas par hasard que l�auteur campe une histoire romanesque (entre le directeur d��cole arabe et l�enseignante fran�aise) dans une �cole, situ�e dans un bidonville de Bir Mourad Ra�s appel� �La cit� des roses�. Ironie du lieu, symbole de r�clusion, de mis�re, de trag�die et de d�tresse dans lequel va se d�rouler une op�ration de civilisation. Le conf�rencier apporte un questionnement sur la port�e philosophique de cette �uvre. Quelle place est r�serv�e � une mission civilisatrice dans un monde de barbarie ? Et il renvoie l�auditoire au premier roman de M. Mammeri dans lequel le romanesque s�imbrique avec le th��tre et la trag�die dans un monde en d�composition qui d�bouche sur la mort. La cit� des roses prend forme � la fin de l�ann�e 1957. C�est le roman de la bataille d�Alger, l�un des �v�nements les plus importants de l�histoire de la d�colonisation. Le dialogue n�est plus possible ni entre Alg�riens et Fran�ais ni entre le directeur et l�enseignante (venue de sa Bretagne natale pour exercer en tant qu�auxiliaire). Celle-ci doit apprendre les valeurs de la fonction d�enseignante faites essentiellement d�humanisme, et c�est l�instituteur kabyle qui va les lui enseigner. Puis l�orateur op�re un flash-back sur la trilogie qui a fait la c�l�brit� de M. Feraoun. Les soci�t�s qui y sont d�crites sont rurales, et les th�ses avanc�es sur la Kabylie (� l��poque !) pr�sentent une soci�t� vivante, turbulente, au sein de laquelle la femme est active ; dans l�un des romans, l��migr� �ram�ne� une �pouse fran�aise qui s�assimile et devient kabyle. Volont� d�apporter une r�ponse au processus inverse mis en place en m�tropole par lequel l�assimilation est refus�e aux travailleurs immigr�s. Dans La cit� des roses, la relation entre le directeur et la Fran�aise est une relation d�attraction : l��crivain interpelle la Fran�aise : elle doit choisir. Durant les trois ans qu�aura n�cessit� l��criture du roman (novembre 57 - d�cembre 60), les probl�matiques de l�heure seront ax�es autour du devenir des Alg�riens, de celui des relations alg�ro-fran�aises et des interrogations concernant l�avenir, selon M. Maougal, ce sont ces questionnements qui sont approch�s de mani�re romanesque. L�impossible liaison avec l�enseignante, mari�e, ancr�e dans sa soci�t�, partag�e entre le directeur � arabe � qui lui apprend les valeurs universelles du m�tier de transmission du savoir, et son mari, sollicit�e par M. G., pied-noir, chauvin, patriote et extr�miste obligera la Fran�aise � choisir : elle ira vers celui qui lui transmet l�humanisme : l�Arabe. L��uvre se cl�t sur une idylle entre deux �instits�. Feraoun a 49 ans. Ce roman para�t 49 ans plus tard...
Nora Sari

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