Monde : DEBAT TV
S�gol�ne a gagn� le d�bat, mais pas encore l'Elys�e
De notre bureau de Paris, Khadidja Baba-Ahmed


A l�issue du d�bat de mercredi soir opposant les deux pr�tendants � la pr�sidence de la R�publique fran�aise, 53% des Fran�ais, selon un sondage Opinianway, consid�raient que Sarkozy a �t� plus convaincant que S�gol�ne qui ne l�a �t� que pour 31% des Fran�ais, les 16% restants ne se pronon�ant pas. Le d�bat a toutefois montr� que rien n�est encore jou� et m�me si elle n��tait pas �lue dimanche, S�gol�ne Royal a d�montr� qu�elle avait toutes les capacit�s et les comp�tences pour �tre pr�sidentiable.
Un d�bat de deux heures et demie suivi par plus de 20 millions de t�l�spectateurs fran�ais selon M�diam�trie, sans compter les auditeurs radio et compte non tenu aussi de tous ceux qui l�ont suivi de l��tranger et les internautes. Les deux comp�titeurs, S�gol�ne Royal pour la gauche et Nicolas Sarkozy, pour la droite, n�ont pas jou� leur destin sur cette ultime confrontation publique et le d�bat ne d�placera probablement pas massivement les voix. Fran�ois Bayrou cependant, dont les deux candidats draguent les 7 millions d��lecteurs qui ont vot� au premier tour en sa faveur, a attendu l�issue du d�bat pour d�clarer au journal Le Monde de vendredi, qu�il ne voterait pas Sarkozy et qu�il consid�rait que S�gol�ne Royal s�en �tait tr�s bien sortie, sans toutefois appeler clairement ses partisans � soutenir la candidate socialiste. Si globalement le rapport de force ne va probablement pas changer, les Fran�ais ont eu droit � beaucoup de surprises et la plus grande de toutes est sans conteste l�inversement des r�les attribu�s � l�une et � l�autre des deux candidats au cours de ce face-�-face. Beaucoup en effet misaient sur une direction de d�bat par Sarkozy �plus exp�riment�, ayant une plus grande ma�trise des dossiers�, disaient-ils, et pr�disaient que la candidate allait se planter. Il n�en fut rien. La premi�re des surprises est venue de ce c�t�-ci, S�gol�ne Royal ayant carr�ment orient� le d�bat, chamboulant m�me l�ordre du jour initial : �Tout se tient : la dette et la relance �conomique�, a-t-elle eu � r�torquer lorsque l�on rappela � l�ordre. C�est aussi sur la connaissance des dossiers qu�elle marqua des points. Sur le nucl�aire, par exemple, m�me si elle fit une erreur sur la part du nucl�aire dans la production de d��lectricit� en France, qu�elle annon�a �tre de 17%, alors que ce chiffre repr�sente la part du nucl�aire dans la consommation finale �nerg�tique, Sarkozy s�est plant� plus lourdement. Alors qu�il a �t� ministre de l�Industrie, tutelle de l��nergie, il a affirm�, et � trois reprises, que le r�acteur nucl�aire EPR (European Pressurized Reactor) est de 4�me g�n�ration (alors qu�il est de 3�me g�n�ration). Quant aux questions �conomiques de fond, et comme il fallait s�y attendre, chacun des candidats a ass�n� ses recettes de droite ou de gauche, m�me si pour certains observateurs, S�gol�ne Royal a plus fait dans l�incantation que dans les solutions. En v�rit�, ceux qui ont �mis ce reproche ne pardonnent pas � la candidate d�inscrire dans son projet le dialogue social avant toute d�cision importante, en fait, une nouvelle fa�on de pr�sider et de gouverner. S�il y avait encore des doutes sur la capacit� r�elle de la candidate � bousculer les dogmes, au d�bat de mercredi, elle eut l�audace d�ass�ner : �Je veux que le peuple fran�ais devienne un peuple d�entrepreneurs.� On est, bien s�r, loin du discours socialiste classique. La deuxi�me des surprises est venue du caract�re affich� cette soir�e de d�bat, par rapport � celui pr�sum�, de chacun des deux candidats. On attendait Sarkozy nerveux, il a �t� courtois, d�contract�, se for�ant � se faire aimable, donnant du �madame � � profusion suivant manifestement les conseils pour se ma�triser, et se faisant ainsi violence durant plus de deux heures. S�gol�ne que l�on disait molle a plut�t donn� l�image d�une pr�tendante pugnace, d�cid�e � ne rien laisser passer. C�est justement ce caract�re tremp� qui a amen� le moment fort du d�bat, une passe d�armes sans pareille dans les joutes �lectorales pr�c�dentes. �On atteint le summum de l�immoralit� politique�, s�est indign�e S�gol�ne Royal en regardant dans les yeux son rival, qui venait de d�clarer que dans son programme, il a pr�vu que chaque enfant handicap� allait avoir droit � la scolarisation. �Ce que vous venez de dire est proprement scandaleux car quand j��tais ministre, j�ai cr�� le plan Handiscol et c�est votre gouvernement qui a supprim� ce plan.� Reprochant � Sarkozy de d�fendre �l�arme � l��il� les handicap�s, la candidate a encore poursuivi avec col�re et l�index point� sur son adversaire : �Tout n�est pas possible dans la vie politique.� Et lorsque Sarkozy, compl�tement d�stabilis�, lui dit �calmez-vous, vous perdez vos nerfs�, elle eut cette r�ponse royale : �Non, je ne perds pas mes nerfs, je suis en col�re et il y a des col�res parfaitement saines.� Un d�bat loin d��tre morne, mais qui a �t� marqu�, au plan du fond, par son caract�re franco-fran�ais, comme si la France pouvait exister aujourd�hui par elle-m�me. Les relations internationales ont �t�, en effet, le parent pauvre de cette rencontre. Les banlieues, l�immigration ont �t� aussi tr�s peu �voqu�es. Au plan de la forme, les journalistes, mod�rateurs de ce d�bat, se sont tr�s peu manifest�s, pour ne pas dire qu�ils ont �t� compl�tement absents d�une rencontre investie, d�entr�e de jeu, par la candidate socialiste.
K. B.-A.

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