Actualit�s : L'angoisse du pain et le caprice des �lites
Par Mohamed Benchicou


Qu�une ann�e commence par une autre journ�e rouge, de col�re celle-l�, quel meilleur signe ? Depuis mardi, nous savons au moins qu�il y a une Alg�rie qui s�angoisse pour le pain et une autre pour un troisi�me mandat de Bouteflika. Et que la plus influente n�est pas celle que l�on croit.
Car enfin, qui s�attendait � ce tableau incroyable ? Des millions de salari�s unis dans une si imposante gr�ve � l�appel de si modestes syndicats libres ! Qui donc soup�onnait possible de se faire entendre par tant d�Alg�riens, sans les cam�ras de Habib Chawki ni les mosqu�es de Belkhadem ? Qui, jusqu�� ce mardi rouge, pensait possible de paralyser le pays sans les moyens de Sidi Sa�d ni les appareils des partis ? Qui, enfin, imaginait une si spectaculaire mort de l�UGTA ? Car c�est bien de cela qu�il s�agit : d�une d�faite magistrale du pouvoir. Sa citadelle du mensonge, la Centrale syndicale, n�est plus en mesure de lui garantir la �paix sociale� et de l��pargner de la col�re ouvri�re. Elle n�a plus d�autorit� aupr�s des salari�s. C�est le cr�puscule d�Abdelmadjid Sidi Sa�d. Il a perdu la capacit� de �r�guler�, en quelque sorte, la grogne prol�taire : tournant le dos � son �pacte social�, des millions de travailleurs ont bascul� dans le camp des syndicats autonomes. Ce mardi, le divorce entre le peuple et ses dirigeants semble avoir pris la couleur de l�irr�versibilit�. Ce mardi a confirm� ce quelque chose d�invisible et de tr�s profond qui s�est produit � notre insu : la soci�t� alg�rienne se d�livre de ses peurs. Elle a fait le choix de l�autonomie. Elle ne vote plus, n��coute plus les sermons politiques et, surtout, a renonc� aux fables des puissants. Les artisans de ce mardi rouge sont rentr�s chez eux en nous l�guant deux belles le�ons. D�abord une le�on d�unit�. A l�heure o� l�on disserte sur la meilleure fa�on de cr�er l�union des d�mocrates, les syndicats libres ont �difi� une puissante conf�d�ration en utilisant une m�thode infaillible : la modestie. Peut-�tre devrait-on r�aliser, depuis mardi, que l�union d�mocratique ne doit pas se confondre avec une addition d��tats-majors mais ressembler plut�t � cette masse imposante d��mes d�termin�es � changer les choses. Ensuite une le�on politique. Ce peuple dont on d�sesp�re, ce peuple sait pr�ter l�oreille � ceux qui savent encore dire des choses qui arrivent au c�ur. Alors l�id�e se d�gage d�elle-m�me : dans l�Alg�rie qui s�angoisse encore pour le pain, le d�bat politicien autour du troisi�me mandat ressemble � une comp�tition factice entre deux �forces� d�vitalis�es, les courtisans suppl�tifs et les �lites passionn�es de changement mais sans aucune influence. On serait tent� de revenir � la v�rit� de Hugo : �Qui n'est pas capable d'�tre pauvre n'est pas capable d'�tre libre.� Cela dit, les animateurs du mardi rouge nous auront quand m�me donn� une belle cl� : avec la d�route de l�UGTA, il s�av�re bien que la capacit� man�uvri�re des partisans d�un troisi�me mandat ne repose plus que sur des forces moribondes. Merci de nous l�avoir d�montr�.
M. B.

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